King Kong
6.3
King Kong

Jeu de Ubisoft Montpellier, Ubisoft et Michel Ancel (2005GameCube)

Le King Kong de Peter Jackson, c'est une des plus grosses sorties cinéma de ma période collège. Auréolé du succès de sa trilogie LOTR, tous les gamins attendaient sa prochaine oeuvre avec impatience et je n'ai jamais autant entendu parler du gros gorille qu'à cette période (n'en déplaise aux décisionnaires du Monsterverse). D'ailleurs c'est bien simple, si vous n'aviez pas un ticket de cinéma daté du 14 décembre 2005, dans mon collège vous étiez considéré comme un ringard (snif…).


On oublie toutefois qu'un jeu adapté du film a été produit, la sixième génération de consoles étant une sorte d'âge d'or pour les jeux à licence, King Kong aurait pu être noyé dans la masse de produits médiocres.
Ce serait pourtant oublier qui était à la tête du projet : Michel Ancel, le créateur de Rayman et des (futurs) Lapins Crétins, qui se serait vu confier le projet par Peter Jackson en personne, le bonhomme ayant adoré son Beyond Good & Evil. Personnellement je n'aurais rien confié au type responsable d'un jeu d'aventure aussi plat si je ne connaissais pas ses précédents travaux, mais soit.


Dans Peter Jackson's King Kong: The Official Game of the Movie (de son vrai nom), on incarne ce bon vieux Jack, écrivain fauché mais aussi expert en armes à feu, détenteur du record du monde de lancer de javelot et pilote d'avion chevronné à ses heures perdues. Tous ces talents ne seront pas de trop pour explorer Skull Island et sauver Ann des griffes du terrible King Kong.
Le jeu se présente comme un FPS où on progresse en compagnie de quelques personnages du film (Carl, Jimmy…), ce qui permet des interactions limitées avec chacun d'eux. On peut par exemple leur demander comment ils vont (ce qui entraînera invariablement une réplique d'un générique achevé) ou, plus utile, leur imposer de nous transmettre leur arme quand Jack est à court de munitions. Les PNJ ne sachant pas viser, autant que ce soit vous qui fassiez le boulot.


Et c'est con à dire, mais c'est un truc que j'ai trouvé très appréciable. On progresse en tout petit groupe sur l'île, et si les IA sont stupides, on s'attache à elles vu qu'elles peuvent nous rendre bien service, les munitions étant extrêmement limitées. Certains niveaux nous séparent du reste du groupe, et ça induit un stress monstrueux pour le joueur qui n'aura plus accès à certaines fonctionnalités bien pratiques.
Et là on touche à un détail qui m'a vite sauté aux yeux : l'influence survival-horror du titre. Et moi, j'adore les survival-horrors.


On n'est pas face à un FPS traditionnel où les munitions sont peu importantes. Celles-ci sont très limitées, et comme dans tout bon survival, on a intérêt à fuir les affrontements plutôt qu'à taper sur tout ce qui bouge, puisque tomber à sec est la pire punition imaginable quand on est pris en tenaille entre deux raptors. Surtout qu'on a le droit de ne porter qu'un seul flingue à la fois, Jack a beaucoup de qualités mais est strictement incapable d'avoir un fusil à la main et un revolver à la ceinture.
Le jeu sait cela et propose quelques outils au joueur pour éviter de gâcher ses précieuses balles. Rien de plus jouissif que de mettre le feu à un buisson où se cachait un énorme mille-pattes par exemple, on peut également lancer des appâts pour détourner l'attention des bêtes, ou même se servir du cadavre d'un animal fraîchement tué dans ce même but.
Même si les interactions avec l'environnement sont assez limitées en-dehors de ces quelques exemples, j'aime beaucoup le fait que le jeu récompense l'improvisation du joueur, et surtout ce côté réaliste de la faune et la flore. On a vraiment l'impression de débarquer dans un lieu hostile où tout est partie d'une chaîne alimentaire, et logiquement l'humain doit bien se trouver au menu de l'une ou l'autre de ces bestioles.


Pour rajouter au côté "naturel" de l'île, on peut si on le souhaite jouer sans aucun HUD, autrement dit aucun élément affiché à l'écran nous indiquant notre état de santé ou le nombre de munitions restantes. On est alors plongé en pleine diégèse : tout ce qui s'affiche à l'écran est vu par notre personnage, et on est dans le même état de flou que lui en ce qui concerne nos réserves (une pression sur Y nous informe du nombre de munitions qu'il nous reste, mais l'info reste assez vague, du genre "Deux chargeurs en réserve").
C'est con, mais ce genre d'immersion me rappelle vachement Jurassic Park Trespasser, autre FPS avec des dinosaures qui avait fait de l'absence de HUD un pilier de son game-design. Bon, c'était un jeu complètement bugué, mais je ne serais pas totalement surpris si Ancel disait un jour que ça avait été une source d'inspiration.


Le jeu contient l'étonnant total de 39 niveaux, ce qui paraît extrêmement long pour un FPS. Rassurez-vous, les niveaux sont en général assez courts et semblent avoir été découpés pour optimiser les temps de chargement, et un nombre non négligeable d'entre eux sont en fait des cinématiques déguisées, où on marche juste quelques instants en échangeant quelques dialogues avant d'assister à un rebondissement qui enchaînera sur le niveau suivant, plus classique.
Au final, le jeu est plutôt court, comptez 5h pour en voir le bout. Il souffre aussi d'une certaine répétitivité passé un moment, je peux comprendre qu'un habitué de FPS plus traditionnels s'ennuie au vu du faible nombre d'armes (seulement 6 dont 2 lances, qu'on découvre toutes dans la première heure de jeu) ou de la difficulté plutôt uniforme tout au long de l'aventure.


Cependant, le joueur acharné s'amusera à refaire chaque niveau pour obtenir un high score qui permettra de débloquer un niveau bonus où, tenez-vous bien… King Kong survit à la bataille de New York et rentre sur son île ! Evidemment c'est non-canonique, et de toute façon l'intrigue du film est déjà pas mal charcutée (Kong et Ann partagent trop peu de scènes à mon goût, on ne profite pas de l'évolution de leur relation) donc c'est pas bien grave. Notez que vous pouvez aussi débloquer ce fameux niveau bonus en entrant un code, je vous laisse deviner l'option que j'ai choisie.
Heureusement, les moments les plus cultes du long-métrage répondent à l'appel, citons le troupeau de dinosaures (quel pied de les esquiver et de tenter de progresser à contre-courant !) ou la cultissime scène du tronc…qui est malheureusement tronquée puisqu'une fois que Kong a fait son travail de nettoyeur, les personnages se retrouvent en bas du ravin et en sortent sans affrontement. S'il y a une scène qui aurait été incroyable à vivre en jeu vidéo, c'est bien celle-ci pourtant ! Autre scène un peu ratée : la présentation de Kong à New York qui se déroule…dans une ruelle. Il fallait payer des droits pour utiliser l'imagerie du théâtre newyorkais, ou ça se passe comment ?
A côté de ça, le jeu rajoute beaucoup de scènes inédites, comme l'enlèvement de Carl par une chauve-souris géante. Pourquoi pas, il fallait bien remplir les 39 niveaux, mais j'ai quand même un regret pour cette foutue scène du tronc !


L'autre originalité du jeu, c'est qu'on y incarne parfois King Kong dans des phases de beat'em all. La proposition est intéressante, on ressent toute la puissance de la bête qui dézingue en un tour de main des raptors qui embêtent bien les protagonistes humains, mais ses niveaux sont bien trop courts et simples pour qu'on s'investisse vraiment dans son gameplay, lui-même peu fouillé. C'est une bonne récréation quoi, mais certainement pas les moments que j'ai le plus appréciés du jeu, je pense même qu'ils ont été intégrés uniquement pour que l'action se termine à New York et pas juste par la capture du gorille.
Notons quand même qu'en termes de phases beat'em all qui détournent l'attention du gameplay principal, King Kong est beaucoup moins frustrant que Sonic Unleashed.


Les phases FPS ne sont toutefois pas irréprochables, étant très linéaires. Je trouve aussi que les munitions qu'on découvre au fil du temps sont toujours placées un peu trop intelligemment pour qu'on croie vraiment évoluer dans un monde réaliste : chaque gros affrontement est précédé d'une caisse de munitions, chaque obstacle a en général une clé cachée juste à côté… C'est évidemment indispensable dans un jeu vidéo, mais ça tranche avec la pureté du HUD et le (relatif) réalisme du gameplay.
Cela dit, le jeu est franchement beau pour de la GameCube, bien que la version 360 soit logiquement un bon cran au-dessus. On peut également débloquer des options pour rendre le jeu en noir & blanc, comme si on jouait à une adaptation de l'oeuvre de 1933, et ça rend étonnamment bien !


En revanche, le plus gros problème du titre c'est qu'il est parfois à la limite du fonctionnel. On est fréquemment obligé d'attendre que nos compagnons nous rejoignent pour faire une tâche ou déclenchent un dialogue pour faire avancer l'histoire, et parfois rien ne se passe, nos amis restent bloqués en boucle sur une même action. Ces gros problèmes de script me font penser que le jeu a sûrement été rushé pour être lancé en même temps que le film, et que la correction de bugs était malheureusement un peu courte, surtout qu'une demi-douzaine de versions ont été traitées à la fois par Montpellier.
Selon une interview de Peter Jackson débloquable dans le jeu, le développement aurait duré moins de deux ans, ce qui n'est pas totalement absurde pour un jeu de l'époque, mais si on rajoute le développement sur la toute première console HD… Les bugs sont contournables en rechargeant la partie, mais ça reste un gros souci qui m'est arrivé plus d'une fois (et même plusieurs fois dans le même niveau).


Enfin, je ne peux que vous conseiller de fuir la version PC du jeu. Celle-ci utilise un DRM absolument nul à chier, qui avait déjà pas mal fait parler de lui à l'époque mais que le futur a contribué à empirer puisque lancer l'installation du jeu sur un PC moderne entraînera tout simplement un crash de votre appareil suivi d'un reboot. Je me suis fait piéger à ce sujet il y a 10 ans, et c'est pourquoi ma partie a été réalisée sur l'émulateur GC Dolphin. J'aime pas spécialement pirater des jeux, mais là je considère que j'ai acquis celui-ci légalement et que la décision stupide d'Ubisoft m'oblige à recourir à cette solution.


Bref, King Kong sur GC c'est un jeu imparfait mais qui pose des bases très solides pour mélanger FPS et survie, avec un réalisme incroyable pour un jeu de 2005, qui plus est malgré le rush imposé pour sortir le jeu à Noël. Et si je ne suis pas un grand amateur du genre, je serais toutefois tenté de le désigner comme mon FPS préféré.
Si vous connaissez d'autres jeux avec ce genre de mélange, je serais curieux d'y jouer !

Sonicvic
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le 8 avr. 2023

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