Marre de cette taule, j'me barre !

A l'approche de l'âge avancé de 34 ans, le vieux gamer blasé que je suis hélas devenu se prend parfois à s'abandonner à la nostalgie de vieux titres plus ou moins oubliés tels Duke Nukem 3D, Time to kill, Die Hard et Alien Trilogy ou encore ce méconnu Loaded, sorti sans fanfare en 1996 sur Saturn et PSOne. C'est sur cette dernière, la reine des consoles de 3ème génération, que je découvrais alors à l'époque ce shoot'em all joyeusement sanglant et décomplexé.

Nourri d'influences évidentes transparaissant tant dans le design général que le chara-design, Loaded est de ces jeux qui misent tout sur l'évocation d'un contexte aussi chargé qu'alléchant, empruntant autant à la SF craignos et au splatterpunk qu'aux comics les plus déviants tels The Mask, Lobo, ABC Warriors ou encore Judge Dredd. Projeté dans un futur indéterminé mais assurément lointain, on y incarne au choix un des six psychopathes les plus dangereux de l'univers. Six archétypes plus ou moins dérangeants dont les aspects en disent furieusement long sur leurs déviances. Entre Cap'N Hands, le corsaire stellaire rachétique, Butch le travlo colossal, Mama le monstre attardé se prenant pour un nourrisson, Bounca le simili Jaws de James Bond, Vox la mignonne demoiselle à l'appétit féroce et bien sûr Fwank, le psychopathe clownesque bien flippant, le joueur, probablement un rien timbré lui-aussi, n'a que l'embarras du choix pour se trouver une incarnation idéale.

L'intrigue du jeu prend pour principale unité de lieu une gigantesque prison spatiale de très haute sécurité renfermant tous les plus grands tarés de l'espace. Une sorte d'Asile d'Arkham du futur, aux couloirs tapissés de foutre et de sang et au personnel certainement aussi dérangé que les pensionnaires qui peuplent l'endroit. Nos six anti-héros s'étant probablement un peu lassés de l'établissement (on peut les comprendre), ils décident simplement de se faire la malle à grand coups de poings et de pétoires improbables. A nous de les guider dans leur évasion sanglante s'étendant sur une dizaine de niveaux dont les objectifs principaux ne se résument qu'à trouver plusieurs cartes d'identification ouvrant toujours plus loin les accès vers la sortie. On déambule sans discontinuer jusqu'à parfois se perdre dans un dédale de cellules et de couloirs sordides, bondés de tarés encamisolés et de gardiens vindicatifs à l'arsenal varié.

Simpliste certes mais d'une efficacité redoutable, les braves développeurs ayant compensé le manque d'originalité de leur scénario par un travail particulièrement remarquable sur tous les autres aspects du jeu, que ce soit dans sa durée de vie conséquente (15 heures c'est pas banal pour l'époque), la très bonne maniabilité des personnages et surtout dans un level design aussi varié qu'immersif, proposant une progression vue en hauteur pour palier aux contraintes graphiques du moteur 32 bits. Ce qui peut à priori paraître frustrant mais qui s'avère finalement judicieux, ce type de vue à la 3ème personne restituant à merveille par son large panel de couleurs antithétiques, le sentiment de folie ambiante qui règne dans l'ensemble des niveaux traversés, tous aussi glauques les uns que les autres. Autre preuve de la qualité générale du jeu, l'excellence de sa bande-son, rythmée par les musiques composées pour l'occasion par le groupe Pop Will Eat Itself. Une OST entêtante dont certaines mélodies (celles des deux premiers niveaux en particulier), n'ont jamais quitté la mémoire de l'auteur de ces lignes.

Un rien répétitif dans son action mais terriblement addictif, Loaded est donc de ces jeux archaïques, parfaitement représentatifs d'une époque où l'on se passait amplement de cinématiques toutes aussi chiantes qu'envahissantes pour privilégier le plaisir de jouer sans trop se prendre la tête. Un jeu idéal, tout comme sa suite Re-Loaded, pour certains jeunes cons des 90's. Lesquels sont aujourd'hui les vieux cons qui s'en souviennent avec nostalgie.