Hello Mountaineer, wellcome to the Peaks of Yore !
- Pixofiore tu dis ? 'Connais pas ! C'est quoi ton jeu ?
- Calme toi Gérard, je suis là pour t'expliquer, Peaks of Yore c'est un jeu d'escalade à la première personne et...
- Pourquoi tu m'appelles Gérard ? Enfin bref, ça file pas un peu le vertige ça ? Et puis moi j'aime pas ça l'escalade, c'est fatiguant. J'ai du mal à voir l'intérêt.
- Attends, j'y viens. En fait le jeu n'est pas structuré comme une aventure, pas d'open world à parcourir ici, pas de crafting ni même de scénario épique. On est plutôt sur un jeu de pur défi de plateforme, on choisi l'obstacle depuis un petit hub (un chalet) et nous voilà parti pour une séance d'escalade. Le gameplay du jeu est assez arcade dans le sens où les commandes sont très simples : un clic gauche pour tendre la main gauche, un clic droit pour tendre...
- La main droite !
- ... Oui Gérard, bonne réponse. Tu peux aussi jouer à la manette mais je n'ai pas tester. Mais reprenons plutôt, tendre la main permet de s'agripper aux différentes parois, il faut maintenir le clic pour rester accrocher à une prise, il suffit d'une main accrochée pour rester stable et ne pas tomber.
- Super fastoche ton jeu, tu sais bien que j'ai terminé tous les Souls, c'est pas un mur d'escalade qui va me faire peur !
- Et bien à vrai dire, on escalade aussi bien de petits obstacles comme des rochers ou même un moulin que des montagnes de plus en plus imposantes. Je reviendrai sur la difficulté par la suite mais sache que les Souls c'est mignon à côté de Peaks of Yore de ce côté là.
- Pfff... Si tu l'dis...
- Bon et bien allons-y alors, parlons-en de la difficulté. Il existe toutes sortes de prises plus ou moins contraignantes, ça va de la prise simple sur laquelle on peut se reposer à la prise friable qui disparait si on la tient trop longtemps en passant par la petite prise qu'on ne peut maintenir qu'un court laps de temps mais qui ne disparait pas pour autant ou encore la prise glissante qui est particulièrement inconfortable. Il est facile de tomber et quand ça arrive on recommence son parcours depuis le début, pas de checkpoint dans Peaks of Yore. Sur les premiers parcours on se démerde sans trop de souci, mais plus on s'achemine vers de hauts sommets et plus la tâche est ardue, aussi bien que tendue.
- Hmmm, ok mais quand on escalade une montagne on prend bien de quoi se sécuriser, non ? Ton jeu est trop "arcade" pour proposer ça ?
- Non, non. Le jeu est bien foutu figure toi, on a effectivement des cordes pour se sécuriser, en nombre limité par contre. On en obtiens en les trouvant sur les parcours ou bien en récompense après en avoir terminé un. On peut donc s'attacher à une corde et fixer cette dernière à une paroi. A partir de là, une chute ne sera plus mortelle, on restera maintenu par la corde et il suffira alors de se hisser jusqu'à son point d'ancrage en utilisant la touche prévue à cet effet. Ceci dit, la corde a une longueur limitée, forcément, ainsi il est impossible de parcourir de grosses portions de chemins sans être bloqué par cette dernière. Vient alors forcément le moment fatidique où l'on doit se décrocher et prendre un risque.
- C'est là que ça devient flippant !
-Oui mais c'est aussi là que ça devient intéressant, le stress que le jeu provoque, l'adrénaline d'une véritable ascension est parfaitement restituée. La moindre erreur peut couter très cher et ça décuple donc forcément les sensations de jeu.
- ...
- Heu, Gérard ? T'es toujours là ?
- ...
- Faut vraiment que j'arrête de dialoguer tout seul dans ma tête, Gérard-ment été aussi atteint moi. "La montagne ça vous gagne" qu'ils disaient, ça vous fait surtout perdre la boule, ouais.
Mountains are not fair or unfair, they are just dangerous
Débarrassé de mon double, il serait temps que j'évoque mon expérience personnelle sur le jeu. Mais commençons par le commencement, voulez-vous ? J'ai découvert ce jeu en cherchant de quoi me réconcilier avec l'alpinisme (dans le jeu vidéo) après la petite déception qu'a représenté Jusant. Ce dernier misait sur une imagerie assez poétique sous la forme d'une aventure qui se voulait envoutante. Malheureusement son message politique prenait le pas sur l'émerveillement, la lecture de tartines de textes peu intéressants voire carrément gonflants avaient eu raison de ma patience et m'avait fait sortir de l'expérience. Il m'aurait semblé tellement plus pertinent d'opter pour une narration environnementale plus subtile.
Enfin bref, en découvrant l'existence de Peaks of Yore et en comprenant qu'il s'agissait d'un jeu de pure plateforme sous forme d'escalade, j'ai tout de suite été intéressé. Pas de superflu, que du jeu, moi ça me va très bien, let's go !
J'ai donc lancé le jeu et... première surprise : il est en noir et blanc par défaut. Pourquoi pas, ça a un certain cachet, aucun problème en soi mais les images que j'avais vu étaient en couleur. Il est effectivement possible choisir entre couleur et noir et blanc dans les options, j'ai finalement opté pour la couleur. A cet instant, on se situe donc dans le hub central du jeu, un chalet à partir duquel on va choisir sa destination, son petit périple de grimpette. N'étant pas encore familier du lieu, je regarde autour de moi à la recherche d'éléments d'interaction et mon choix fini par se porter au hasard sur un billet à l'intérieur d'une valise, tout proche de mon personnage : clic ! Une courte scène cinématique de voyage en train plus tard, me voilà fin prêt à jouer !
Les bases du gameplay me semblent très simples, je comprends ou crois comprendre rapidement de quoi il retourne et m'attaque donc à l'obstacle. La galère commence. Je bute facilement 30 minutes sans parvenir à progresser d'un iota dès le premier niveau du jeu ?! Ils sont fous ces développeurs, c'est à dégouter le nouveau venu. Rien n'est expliqué et un mur de difficulté se dresse déjà devant moi, allez donc vous faire... Attendez, serait-il possible que... Mais oui évidemment, j'ai dû accéder à l'extension (que j'ai acheté en même temps que le jeu de base) par inadvertance ! Il se trouve que c'était bien ça, simple erreur de ma part, mes excuses aux développeurs ainsi qu'à leurs familles qui ont gratuitement essuyé ma frustration initiale.
Bon, il va se magner Vorador à expliquer pourquoi c'est si bien Peaks of Yore ? Il a quand même mis un 9 le bougre, affublé d'une recommandation en plus ! Tiens voilà que ça me reprend, je parle de nouveau tout seul. Ahem ! Une fois remis sur les bons rails, j'ai pu me familiariser avec le gameplay du jeu et les outils qu'il met progressivement à notre disposition : cordes, crampons, harnais de sécurité, sac à magnésie, thermos de café et j'en passe. Tout est très simple à prendre en main en théorie mais dans le feu de l'action ça peut se compliquer, le jeu n'est pas là pour nous faire de cadeaux. Que ce soit les prises de plus en plus piégeuses que j'évoquais déjà plus haut, l'inclinaison de la paroi rocheuse ou quelques éléments extérieurs comme le vent ou les mouettes qui viennent nous picorer les mains. Et tout ça alors que les parcours vont devenir de plus en plus dantesques !
Pour être plus précis sur le déroulé, en plus du billet de train pour atteindre la zone de l'extension, on trouve dans le fameux chalet de départ un livre qu'on peut ouvrir afin de sélectionner un parcours d'escalade, il s'agit du livre I. Comme vous pouvez vous en douter, d'autres livres seront accessibles par la suite, au fil de notre progression. Le livre I nous apprend les fondamentaux, c'est à dire les parcours "faciles" du jeu. Le livre II consiste lui en des épreuves plus courtes mais techniquement plus relevées et qui constitueront par ailleurs des défis de vitesse à réaliser si le cœur vous en dit (récompense à la clé), il s'agit ici d'escalader des rochers plutôt que des montagnes. Quant au livre III, il propose les parcours avancés et j'aime autant vous dire que c'est ici que ça se corse sérieusement.
On passe donc de simples rochers ou de petits monts à de véritables montagnes extrêmement imposantes, particulièrement longues à escalader, aux routes complexes, c'est vraiment impressionnant. Les deux dernières que j'ai pu escalader avant d'obtenir les crédits (je n'ai pas fini le jeu à 100% pour autant, il me reste donc pire à voir), sont un sommet de tension que je crois n'avoir jamais connu jusqu'ici dans ma vie de joueur. Je pèse mes mots. Une heure ou plus s'écoule pendant mon ascension méticuleuse, alternant entre sécurité et prise de risque pour économiser mes cordes tant le parcours semble interminable. La tension monte, les mains se font moites et tremblantes et à partir de là 2 scénarios possibles :
- Soit c'est la chute fatale accompagnée d'une terrible frustration (qui chez moi ressemblait plus à une dépression sévère qu'à des injures proférées)
- Soit on parvient à nos fins (potentiellement après moults essais) et c'est une sensation absolument grisante, la satisfaction lors de la conquête d'un sommet aussi ardu est indescriptible.
Les 2 scénarios se sont évidemment produits. Sur l'une de ces deux fameuses montagnes j'ai eu de la réussite et je suis lentement parvenu à atteindre le sommet en réutilisant ma dernière corde sur une bonne portion du parcours, en grapillant du terrain petit à petit comme un petit malin, grande satisfaction au bout. Sur l'autre, la dernière en date, j'ai été très près du but dès ma première tentative et me suis viandé, sans aucune corde restante, après avoir fait disparaitre une bonne partie des prises disponibles (oui, celles qui s'effritent) sur une paroi particulièrement inhospitalière. La désillusion quand on se voit tomber d'aussi haut après tant de temps passé à faire extrêmement attention à chaque geste, c'est quelque chose. Il m'a fallu m'acharner plusieurs heures en tout pour enfin en voir le bout mais alors là, la sensation d'accomplissement est dingue.
The summit is what drives us, but the climb itself is what matters
Peaks of Yore m'a mis une claque, n'ayons pas peur des mots. Il peut passer pour un simple "Climbing Simulator" sans âme pour qui le regarde de loin sans réellement s'y intéresser, il est pourtant beaucoup plus que ça. Je n'ai pas évoqué l'ambiance, je la trouve très réussie à peu de frais. En fait il n'y a de musiques que celles qui sortent du gramophone de notre cher chalet, le reste du temps l'ambiance est simplement réaliste et faite de bruits naturels tels que le souffle du vent, la roche qui s'effrite, le chant des oiseaux, le halètement de notre personnage, etc. Pas besoin de plus à vrai dire, c'est aussi pour ça qu'on s'y croit. Le gameplay a déjà suffisamment été évoqué, là encore c'est la simplicité efficace mais qui s'étoffe intelligemment petit à petit. Quant au challenge, là aussi on l'a dit, il est véritablement relevé et fera plaisir aux try-hard autant qu'il fera fuir les joueurs les moins obstinés. De mon côté, j'ai besoin de faire une petite pause après avoir atteint les crédits mais je n'en ai pas terminé, loin de là. Il me reste à dénicher les quelques objets restants sur les différents parcours, les défis de vitesse à accomplir dans le livre II ainsi que 2 montagnes à gravir dans le livre III (et de potentielles surprises à découvrir ensuite).
Je sais déjà qu'une gigantesque montagne à échelle réelle, ou presque, constitue le véritable défi final du jeu. Et ça c'est sans compter l'extension dans laquelle je compte aussi m'aventurer plus tard.
Vous l'aurez compris, je conseille très chaudement Peaks of Yore à tous les joueurs en recherche de défi et de sensations vertigineuses d'escalade et de plateforme de manière générale, au risque de développer de l'hypertension artérielle, soyez prévenus. En tout cas chez moi c'est immédiatement culte, un indé immanquable de 2023. Rejoignez donc la confrérie des alpinistes de Peaks of Yore, vous ne le regretterez pas !
Merci à ceux qui m'auront lu en entier. C'est une critique écrite sans filet, en free solo comme on dirait dans le milieu de l'escalade, j'ai laissé mon euphorie me guider sans trop réfléchir en amont alors ça donne ce que ça donne. La motivation première c'était clairement de mettre en lumière cette perle injustement méconnue donc si je peux aider à le faire connaître, ne serait-ce qu'à quelques personnes, le pari sera gagné. Il fallait bien ça pour me faire sortir de ma zone de confort et retenter l'exercice de la critique. On tient avec Peaks of Yore un jeu qui fait honneur à l'alpinisme (le nouveau roi du genre à mon sens), un de ceux qui permettent aussi à ma passion du média de perdurer, le jeu vidéo peut encore nous surprendre et nous émerveiller. Et moi c'est encore une fois aux petits indés que je le dois, c'est devenu une constante. Cette critique constitue donc évidemment une lettre d'amour à Peaks of Yore mais aussi, au fond, à la scène indépendante en général.