Sonic Heroes
5.8
Sonic Heroes

Jeu de Sonic Team et Sega (2003Xbox)

Bande-sons, décors et narrations qui se subliment malgré un gameplay loufoque

Là où je rejoins les critiques sur le gameplay bâclé sous champignons et la narration totalement random écrite le temps d’avaler trois cafés, je justifierai ma note en décrivant comment les bandes-son de chaque niveau s’harmonisent parfaitement avec les décors et la narration, et comment cette symbiose crée un monde multi-sensoriel ultra captivant. La note dépend donc de ce à quoi on est réceptif de la part du jeu : le côté plus concret, gameplay, fluidité. Ou le côté plus abstrait : univers créé par le jeu.
Je précise qu’il s’agit de mon jeu d’enfance, et ça explique mon impression subjective tintée de la bonne vieille nostalgie que ce jeu me laisse.

Monde 1

Seaside Hill — La promesse enthousiaste

C’est une explosion de lumière, de couleur, de mouvement. Un monde de falaises tropicales, de colonnes antiques et de ponts suspendus au-dessus de l’océan, baigné par une musique ensoleillée, lumineuse, légère et motivante. Elle évoque les débuts d’une aventure, pleine de promesses, où tout est encore possible. Elle rit presque, cette musique, et donne l’élan d’y croire. Optimiste, gaie, parfaitement accordée à la topographie éclatante du niveau : elle symbolise ce moment crucial où l’on choisit d’avancer, le cœur léger, les yeux brillants.

Ocean Palace — La volupté masque le défi

L’espace s’épaissit. Le palais remplace les plages, les architectures deviennent plus monumentales. On entre dans un lieu peu théâtral, rempli de statues, de colonnes massives et de blocs qui s’effondrent. La musique, elle, ne se contente plus d’accompagner : elle rayonne. Elle explose de luxe, s’amuse comme une diva. Elle rit d’elle-même, pleine d’assurance, comme si elle portait des lunettes de soleil hors de prix sur un yacht. C’est l’exaltation assumée, la flamboyance consciente de son propre style. Et pourtant, derrière cette légèreté apparente, quelque chose s’installe : le rythme s’accélère, les pièges se multiplient. L’enfance du voyage se termine, les premières véritables tensions apparaissent, sans pour autant briser l’élan joyeux du début.

Monde 2

Grand Metropolis — L’utopie sous tension

Une ville lumineuse, fluide, aux surfaces électrisées. Chaque plateforme semble vivante, chaque ascenseur de lumière fait partie d’un système harmonieux. Tout circule, tout glisse, rien ne résiste. L’ambiance est techno, rapide, mais sans dureté : elle inspire la pensée rapide, la logique bien huilée, une sorte de réflexion optimiste. Cette ville semble penser par elle-même, elle accueille la vitesse comme un langage naturel. Un groove électro urbain, à la fois doux et précis, évoque une mégapole futuriste sans anxiété, une technologie réconciliée avec la nature du mouvement. Ce niveau est l’image mentale d’un monde où la rationalité ne s’oppose pas à la joie.

Power Plant — La fusion chaotique

Mais tout système cache sa surchauffe. On descend dans les entrailles de cette ville parfaite, et la mécanique commence à fuir. Le métal vibre, la pression monte, les tuyaux crachent de la chaleur. La musique, elle aussi, semble sur le point de rompre : un peu criarde, espiègle, elle tourne sur elle-même, devient entêtante. Il y a là un petit grain de folie enfantine, une audace irrévérencieuse, presque gamine. C’est le niveau du trop-plein, de la surcharge, de l’étourdissement. Et pourtant, dans cette instabilité, un souffle de motivation persiste, comme un cri de héros dans le chaos.

Monde 3

Casino Park — Le mirage rose

Des lumières, des machines à sous, des paillettes. La musique est parfaitement dans le thème : une petite mélodie amusante, colorée, presque caricaturale. Elle amuse, séduit, fait mine de ne pas se prendre au sérieux. Mais attention : une heure là-dedans, et on bascule dans un univers saturé, répétitif, presque fou. Ce niveau, c’est le mirage du jeu, le plaisir facile mais hypnotique. Derrière le rose sucré et les clochettes sautillantes, un vertige se dessine.

Bingo Highway — L’ombre du jeu

Le rythme ralentit légèrement, les tons se foncent. Toujours électronique, la musique devient plus versatile, moins candide. Le parcours aussi : plus complexe, plus stressant. Le décor scintille toujours, mais quelque chose s’est infiltré dans l’ambiance, une tension sous-jacente, une fatigue sensorielle. Le hasard n’est plus amusant, il devient imprévisible. On avance, mais avec moins d’insouciance. Le rêve devient stratégie, le jeu devient défi.

Monde 4

Rail Canyon — Le feu du crépuscule

Le soleil commence à baisser. Le ciel devient orange, le décor, un canyon sculpté à la vitesse du vent. Des rails partout, comme des veines tendues. C’est un niveau de vitesse et d’urgence. La musique, rock, affirmée, pousse en avant : elle donne envie de tout balancer et d’accélérer. C’est la première fois que le niveau dit explicitement : le temps presse, tu dois atteindre quelque chose. Il y a là une gravité nouvelle. Une détermination qui remplace la joie. Chaque personnage parle d’objectif, de mission. Le voyage devient mission.

Bullet Station — L’esquive tactique

Même énergie, mais avec un tempo plus tactique. Le décor est plus métallique, plus structuré. Les canons menacent, les sons se font plus lourds, plus précis. La guitare laisse un peu de place à l’électronique, et tout semble converger vers une idée : aller vite, mais sans se tromper. C’est un sprint réfléchi, une urgence méthodique. Le feu du canyon devient acier, l’adrénaline devient concentration.

Monde 5

Frog Forest — L’illusion du calme

Un décor de forêt tropicale, humide, verte et vivante. Après une cinématique intrigante, la musique semble ramener un peu de légèreté. Une forêt qui respire, une nature joueuse. Mais tout est trompeur ici. Le niveau est plus simple que les précédents, la bande-son plus claire… et pourtant, ce calme est un piège. C’est le repos du guerrier, mais un repos qui endort. Une fausse sécurité avant la tempête. Car ce qui suit ne pardonne pas.

Lost Jungle — L’appel du fond

Les racines se tordent, les marécages avalent. La jungle devient moite, menaçante. La musique évoque des tribus cachées, des incantations inquiétantes. Des sons ancestraux, une chaleur étouffante, des percussions qui accélèrent. Le niveau semble vivant, hostile. Chaque pas devient une fuite. On comprend que le soulagement précédent était naïf. La flûte obsédante qui revient par instants donne une profondeur rituelle, comme si on pénétrait dans un territoire interdit.

Monde 6

Hang Castle — La malice incarnée

Tout bascule. Le niveau joue avec les dimensions, les perspectives, les illusions. Les murs deviennent sols, les plafonds tombent, les boutons inversent la logique. Le château rit, se moque, se transforme. La musique, elle aussi, est une farce macabre, un cirque de fantômes moqueurs. Tout ici est double, ironique, imprévisible. L’humour noir règne. On avance dans un espace où le sens n’est plus fiable. Le manoir est un esprit, et il te regarde.

Mystic Mansion — L’énigme

L’étrangeté continue, mais devient plus mentale. Un électro très structuré, presque géométrique, remplace le chaos rieur. La musique virevolte, dessine des formes dans l’espace sonore. Le niveau est complexe, rempli d’énigmes, de détours. On garde la malice, mais avec un vernis de logique. C’est la version sobre du délire, mais moins indulgente. Un manoir savant, un labyrinthe élégant. Énigme et mystère.

Monde Final

Egg Fleet — Le survol héroïque

Un ciel en guerre. Des vaisseaux volants, des explosions, un discours épique au début du niveau. Les personnages apparaissent comme des géants, décidés, invincibles. La musique monte en panache, en éclat, en énergie brute. C’est le moment où tout devient clair : le but est là, il faut le saisir. Le flou mystique de la jungle et des châteaux disparaît. On fonce, concentré, animé. Le rock résonne, libérateur.

Final Fortress — Le verdict

La nuit tombe. Le ciel est noir, l’orage s’installe. C’est la dernière ligne, le cœur de la forteresse. La musique est grave, sombre, mais pas désespérée. Elle est digne. Elle parle de responsabilité, de force. Elle accompagne le héros dans son dernier combat, comme une symphonie de fin du monde. Électronique, mélancolique, mais majestueuse, elle donne une épaisseur tragique à l’effort. Elle rend hommage à tout ce qui a été traversé. Le voyage se clôture. Ce n’est plus un jeu. C’est un jugement.

thalex
9
Écrit par

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le 23 août 2023

Critique lue 7 fois

thalex

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