Me revient le souvenir d'une conversation avec un joueur que j'ai constaté encore récemment en activité (compétitivement) sur ce jeu. Nous évoquions alors naïvement les possibilités d'une éventuelle suite, bénéficiant d'un moteur physique digne de donner à la force toute sa dimension en tant qu'élément central de gameplay, couplé avec un système de combat au sabre laser gagnant en esthétique et en intérêt, et conclûmes, justifiant la raison de notre entêtement à zoner sur des serveurs en désuétude, que rien ne remplaçait pour le moment Jedi Academy.
Nous étions alors en quelque chose comme 2006-2007, et si cette hypothétique suite tardait à venir, il y avait déjà fort à parier pour qu'elle ne voit jamais le jour.



  1. Les bandes annonces fusent à propos de "Force Unleashed ", un nouvel espoir, puis... il faut bien finir par y jouer, à ce truc. "Jedi Knight, je suis ton fils." - "Naooon." On tombe de haut.


Et puis le temps passe. Et puis Jedi Academy devient "rétro". Moi avec.
Une sorte de créature, ratatinée, maronnant dans son antre à propos de jeux, qui n'auront jamais leur équivalent, et qui pourtant, gnagnagna. Un nouveau philosophe, en somme. Un "rétrogamer". (Ooooh.)


Il est certain que nos premiers émois sont ceux qui comptent, et que la note que j'attribue à ce jeu ne dépend pas entièrement du travail des développeurs : nous ne parlons pas d'un "produit", et encore moins d'un "produit fini". Que certains le redécouvrent aujourd'hui est plutôt une bonne chose mais ça n'est pas la même. (chose. qu'avant.). Aucune patine, ne sauvera ce jeu aux yeux d'un néophyte d'un "7" peu convaincu, et pourtant ceux qui eurent le privilège de fréquenter le multi à la grande époque, ne peuvent décemment pas arborer un tel mépris.


Cette critique interminable, en plus de déterminer pourquoi, dressera une rétrospective de la licence "Jedi Knight", questionnant son évolution vers une autre façon jouer, et de consommer, plus généralement. Et oui, vous l'aurez deviné, ça va péter plus haut que son cul - en espérant apporter quelques pistes quant à la question soulevée tacitement dans cette introduction : "et la suite, pourquoi pas ?" (vous remarquerez l'ambiguïté formelle. Ça veut dire que ça va être laborieux.)



Il y a bien longtemps...



...en 1995, sortait Dark Forces, parce que DooM, et que la licence Star Wars devait (et doit-être encore) consommée à toutes les sauces. Il s'agit bien entendu d'un FPS à la papa, qui même si il bénéficie de quelques mises à jour techniques apportées par son "nouveau" moteur (Jedi. [...] ), est aujourd'hui considérable comme non pas une "purge", mais au moins comme un jeu sans grand intérêt. Y est introduit tout de même la figure emblématique de la série, Kyle Katarn, ici sans barbe ni pouvoir de la force. Piou piou, bang bang, on passe à la suite.


Dark Force était le DooM de LucasArts, aussi lui fallait-il son Quake, chose faite en 1997 avec Dark Forces II, un nouveau moteur, (Sith. [...] Non non, je ne ferai pas de commentaires.), des cinématiques de l'amour, et le nouveau look (pour une nouvelle vie) de Kyle Katarn, très écolo, comme le soulignera par la suite Desann dans Jedi Outcast.
Et bien que l'on soit toujours dans du FPS un peu con-con, on peut déjà noter les prémices de ce qui fera par la suite l'identité propre de la licence, avec en premier lieu la possibilité d'user des pouvoirs de la force, qui plus que complémentaires aux armes à feu, changent considérablement les aptitudes physiques du joueur. Et l'un ne va pas sans l'autre, l'apparition du sabre laser, se départissant d'un knife/gauntlet par sa portée, par sa capacité à renvoyer certains tirs ennemis, et last but not least à accéder à une vue à la troisième personne, plus adaptée à tout ce qui est phases de plates formes ainsi que pour les combats aux corps à corps, jouant principalement sur les distances dans leur sommarité.
Malgré l'implémentation du multi, nous nous situons avec Dark Forces 2 en deçà de la fine ligne qui sépare un jeu complet d'un autre, qui a le cul entre deux chaises. Il est tout de même important de constater que la série tire à présent parti pleinement du clavier, n'hésitant pas du coup à multiplier les armes et les pouvoirs, utilisables simultanément et offrant ainsi une profondeur de jeu inatteignable en terme de FPS par un jeu console. D'ailleurs à ce sujet, petit avertissement.


[N'ayant pas leur équivalent, les deux jeux qui vont suivre sont encore susceptibles d'être pratiqués, et de vous donner du plaisir. Seulement voilà. Ce sont des jeux PC, au gameplay étudié pour clavier/souris, et au contenu accessible à 100% sur PC. Lâchez immédiatement ces portages console à moins de vouloir absolument vous faire du mal, ce à quoi ramasser un direct pistonné dans la ganache pourrait remédier pour moins cher.]


Plutôt que de se fader la conception d'un nouveau moteur pour pas grand chose, LucasArt sort enfin du placard et confie la réalisation du prochain opus de la série des "Jedi Knight" à Raven Software, notamment développeurs de Soldier Of Fortune II : Double Helix, ici remarqué pour l'utilisation du moteur de Quake III associé au système d'animation GHOUL 2 (qui en somme décompose les modèles 3D afin de permettre des dommages localisés de type amputations, leur accessoirisation ainsi que l'animation de parties internes).
Ainsi faudra-t-il attendre 2002 pour que Jedi Knight II : Jedi Outcast fasse chauffer les GeForce et il faut bien l'admettre, le jeu, aussi bien au niveau du fan service que de ce qu'il propose fait complètement le taf, au point où sa suite ne sera qu'un ajout de contenu aux bases ici posées. Car "presque" tout est là, et respire la volonté de dépasser le simple cadre du FPS, par l'usage de la force, et par l'usage du sabre (simple, on est encore dans l'esprit de la trilogie originale) qui en plus de pouvoir être envoyé en attaque secondaire comme un boomerang au prix de quelques points de force, est à présent déclinable en trois styles de combat, chacun ayant son panel de mouvement propre et sa "super".
La combinaison de ce dernier avec les 9 pouvoirs de la force et les 12 autres armes disponibles (qui sont les "équivalents" Star Wars de ce que proposerait classiquement un fast FPS) laisse rêveur quant aux possibilités de strats à développer pour pourrir la vie de vos adversaires, et ce sentiment de liberté n'est pas démenti par l'ensemble des déplacements dopés au midichloriens, qui n'ont rien à envier à ce que proposera par la suite un "enter the matrix". Qui pour le coup n'a même pas de multi pour se défendre.
Parce que si le solo de Jedi Outcast présente un intérêt honnête, c'est le multijoueur qui selon moi fait l'histoire, et il faut l'admettre, un peu malgré lui.
En effet, le "Free For All" qui dans les FPS ne consistait jusqu'ici qu'à atteindre une limite de frags le premier, prend ici tout son sens : on peut voir sur une même map les joueurs s’adonner ici à une mêlée, ailleurs à un tournois de duellistes, ailleurs à pondre des NPCs, ou encore à tenir quelques conversations dans une zone safe - en somme, un coté "second life", "Sandbox", appelez ça comme vous voulez, mais avant l'heure.
Il n'en fallait pas plus pour que prolifère sur ce terreau taillé pour le modding (et par la richesse de son contenu initial, et par les outils mis à la disposition des joueurs) une communauté solide, dépassant majoritairement le simple stade de "consommateurs" et prompte paradoxalement à accueillir à bras ouverts ce que l'on peut définir aujourd'hui comme étant le meilleur coup à jouer pour l'éditeur.



...grosso-modo en 2003



Vous l'aurez compris, Jedi Academy ne consiste qu'à fournir au joueur plus de jouets, n'apportant techniquement que peu de choses par rapport aux bases posées par son prédécesseur, et même si les combats au sabre laser souffrent encore d'être un brin sommaires, on sent poindre (enfin) un système de parade, quoi que trop peu fiable pour être exploitable.
Si Jedi Outcast ne se nourrissait de références qu'à la première trilogie, Jedi Academy arbore avec entendement celle de la seconde, mettant par l'implémentation du dual et du staff en péril le versus miroir (ce que je pense être fondamentalement une bonne chose), et il en va de même avec la force, multipliant les nouveaux pouvoirs mais les groupant en deux catégories, soit coté clair et obscur, contraignant le joueur à adopter un style de jeu différent en fonction de son choix.


Si la direction globale des développeurs consiste de manière presque aveugle à proposer plus de tout, on peut légitimement se demander si cela suffit à faire de Jedi Academy un "bon" jeu, d'autant que la quête solo, qui n'en est que la vitrine, a de quoi laisser dubitatif, pour qui critiquerait encore les jeux vidéos en 2017 uniquement sur la base de critères scénaristiques. (Et paf, coco, ouais, celle là elle est pour toi.)

M'est d'avis qu'il n'y a pas grand chose à reprocher à cet opus, à moins d'être passé tout à fait à coté, tant les possibilités qu'il amène en matière de modding sont vastes et tant, plus prosaïquement parlant, la symbiose entre FPS/TPS est aboutie et offre de libertés.


Cette jonction entre une politique, consistant à fournir, et parfois clefs en main les outils de développements avec les jeux (je repense notamment la même année à UT 2003, et son maya personal learning inclus dans les galettes) afin de faire de la durée de vie potentielle d'un titre un argument de vente et de pérenniser une certaine manière de créer le jeu vidéo, et une autre politique, relativement indifférente à ce qu'un jeu puisse durer étant donné qu'il faut en vendre un autre derrière, tient pourtant du petit miracle.
On peut présumer, du je-m'en-foutisme ainsi que du peu de scrupules des éditeurs, quand sont balancés, et Jedi Outcast sur Gamecube, et Jedi Academy sur Xbox (à l'instar d'UT 2003, finalement), l'histoire de grappiller quand même quelques sous sur le dos de joueurs consoles peu avertis, pour ne pas dire à peine nés.
Où bien être mignons, et admettre qu'ils aient pu eux aussi, passer à coté de leur propre jeu !


Quoi qu'il en soit, la licence semble bel et bien enterrée, et aucun signe n'est donné ni coté LucasArt, ni coté Activision qui laisserait supposer à ce qu'on l'exhume. Si cela devait néanmoins arriver, affichez l'air le plus circonspect et accueillez la nouvelle avec "maxi mahousse précaution."

Créée

le 15 déc. 2016

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Rilloux

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