Découvert totalement par hasard lorsque le jeu fut donné sur l’Epic Games Store, je ne savais pas du tout à quoi m’attendre avec ce Stick it to the man!, et d’emblée je dois dire que la Direction Artistique fait mouche et pose l’univers à la fois sombre et loufoque dans lequel on va évoluer. Ce monde intégralement fait en carton, aux couleurs pétantes mais pourtant souvent lugubre, est tout à fait singulier et ne peut manquer de marquer le joueur.


Cette Direction Artistique soutient d’ailleurs les thématiques assez matures qu’aborde le jeu, puisque vous rencontrerez des escrocs, des fous, des personnages aux envies suicidaires, des personnages superficiels, des personnages plongés dans la solitude et dont le seul ami est un animal, mort ou vif, des couples au bord de la rupture, des cuisiniers cannibales, vous serez jeté de l’hôpital car votre assurance ne prend par en charge les blessures au crâne, etc. On ressent en permanence ce regard acerbe et pessimiste que les développeurs portent sur la société, et ça fait son petit effet en jeu. On a l’impression d’évoluer dans un monde pourri et corrompu jusqu’à la moelle, ce qui est à la fois désolant et le moteur de notre aventure, car on a envie de venir en aide à ces pauvres hères.


L’atmosphère et la Direction Artistique sont donc tout à fait prenantes et représentent le gros point fort du jeu, mais à côté de ça il ne faut pas oublier qu’il y a un jeu… il est maintenant temps de parler du gameplay. Le jeu est structuré autour d’un concept original : à l’aide du bras qui sort de la tête (oui, oui) de notre personnage, Ray, on peut lire les pensées des autres personnages pour ensuite interagir avec certaines vignettes que l’on «collera» dans les décors ou sur d’autres personnages pour résoudre les énigmes du jeu. Je dois que c’est une idée très intéressante, et on se prend vite au jeu : il est très amusant d’écouter les pensées des personnages atypiques de ce monde, de cerner leur personnalité, d’établir des liens entre lesdits personnages, et voir se dessiner une histoire à travers chaque tableau de jeu.


Seulement voilà, pour que le concept soit viable sur le long terme, il faut derrière que les développeurs parviennent à complexifier et renouveler le gameplay en travaillant sur le Level Design et sur des énigmes de plus en plus poussées. Malheureusement, ce n’est pas le cas dans Stick it to the man!, et si la formule est très amusante au début, elle finit vite par s’essouffler et par devenir répétitive. Le jeu souffre d’une trop grande linéarité, et par extension d’une trop grande facilité, et on ne peut qu’être frustré de voir que le jeu n’arrive jamais à exploiter son concept à son plein potentiel. Globalement, le Level Design est vraiment peu inspiré, très dirigiste, et on se contente de faire les mêmes choses en boucle, sans amener un brin de réflexion derrière les énigmes. Un objet manque, donc on se contente d'écouter les pensées des personnages que l’on croise jusqu’à trouver l’auto-collant approprié qui nous permettra de progresser… C’est dommage, vraiment dommage.


Allez, il y a bien quelques tableaux plus intéressants, je pense par exemple au niveau de l’asile qui est suffisamment grand et ouvert pour laisser un peu de liberté au joueur, ou encore vers les derniers niveaux certaines des course-poursuites avec les ennemis sont un peu plus techniques et demanderont de planifier une route pour éviter de se faire prendre. Mais globalement, le jeu peine vraiment à rendre intéressant son gameplay sur le long terme, qui finit par devenir un peu blasant, il faut le dire.


Stick it to the man! est donc une belle occasion manquée. Une idée originale et intéressante sur le papier, mais qui nécessitait d’être creusée plus en profondeur pour être viable en jeu. Si la patte graphique, l’écriture souvent juste et percutante des personnages, et l’univers maussade du jeu marqueront à coup sûr votre esprit, le gameplay se fait vite oublier et enlève tout intérêt de rejouer au jeu, puisque par sa linéarité le jeu n’aura rien de neuf à vous proposer lors d’une deuxième partie. C’est donc un titre assez limité que je ne conseillerais qu’à des joueurs curieux de découvrir un univers vidéoludique pittoresque et capables de faire fi des faiblesses du gameplay…

Charlandreon
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le 28 nov. 2020

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