Super Mario Odyssey
7.8
Super Mario Odyssey

Jeu de Nintendo EPD et Nintendo (2017Nintendo Switch)

Malgré tout l'enthousiasme avec lequel j'y suis allé, je n'ai pas apprécié cette odyssée autant qu'escompté. S'il reste un bon jeu, je pense que je lui reproche finalement de sonner souvent un peu creux au regard de ce que j'ai pu tant aimer dans les épisodes principaux de la série. Sans refaire de background complet, disons simplement que je suis fan de SMB3, de Sunshine, que j'aime beaucoup Galaxy et que, plus j'y pense, plus je me dis que 3D Worlds était excellent. J'ai aussi joué à, à peu près, tous les jeux de la franchise qui concerne la plateforme et je pense que c'est cette base, ce concentré d'années et d'années à sauter pour esquiver des obstacles qui forme le terreau de ma déception.




Évacuons rapidement les "petites" choses. Le jeu est très joli; c'est modélisé et animé avec beaucoup de soin et de personalité. S'il y aura des dissensions quant à la direction artistique qui part un peu dans tous les sens, juxtaposant du low-polygone aux couleurs néons avec du cartoon classique de la série et quelques moments presque réalistes en terme de proportions et de textures, on tient quand même un melting-pot au résultat assez plaisant. Je lui préfère 100 fois la cohésion visuel d'un Sunshine ou Galaxy, mais en même temps, les habitants du royaume Flonflon sont les machins les plus mignons jamais créés, avec leur tronche de phoques blancs aplatis et leurs manches un peu trop grandes.


Musicalement, ça se discute aussi même si, de même, j'en tire un bilan plutôt positif. Mon problème principal vient de la longueur des boucles musicales, souvent assez courtes, créant du coup un peu de répétitivité qui n'est pas toujours la bienvenue (j'ai soupé du riff de guitare de la forêt). Rien d'extrêmement mémorable en ce qui me concerne (à part ce riff de guitare du coup) mais une OST qui fait le job en tout cas. Disons qu'en 2017, face à A Hat In Time qui n'a que des musiques topissimes et Snake Pass qui colle une pêche d'enfer avec ses percutions, Odyssey me paraît un peu en retrait.




Une fois qu'on a constaté qu'on a affaire à un jeu joli qui n'a pas été réalisé par des manches, on peut commencer à jouer vraiment.


Les contrôles sont exemplaires, comme d'habitude. La plupart des mouvements habituels de la série dans son pendant 3D sont présents. Triple saut qui mène à un salto, saut écrasé, se projeter en avant soit à la suite d'une roulade, soit d'un écrasement...tout cela adjoint à Cappy donne une palette de mouvements nuancée qui montre encore et toujours que ça n'est pas à Nintendo qu'on va apprendre à faire la grimace. Seul bémol, les quelques mouvements spéciaux liés au motion-control des joycons; j'aurais aimé avoir l'option de faire le lancer circulaire de Cappy sans secouer la console comme un débile.


Et puisqu'on évoque Cappy, parlons-en puisque c'est le nouveau gimmick de cet épisode. Après le jet-pack de Sunshine et la gravité changeante des petits astres de Galaxy, on a ici un objet qui permet deux choses:
1/ Étendre les mouvements de Mario, comme attaquer de plus loin ou se donner un peu plus de longueur à une série de sauts.
2/ Se transformer en un paquet d'objets/monstres/PNJs.
Dans l'idée, c'est juste formidable. Même si l'ajout aux déplacements me semble un peu complexe niveau manipulation pour pas grand chose (devoir maintenir le bouton de lancer puis saut écrasé/cancel pour sauter dessus, c'est laborieux) il faut bien admettre que cela offre une réelle courbe de progression dans la manière d'aborder certains challenges et certains pans de niveaux, comme les courses koopas par exemple.
Surtout, se transformer en tout et n'importe quoi permet de créer des poches de gameplay qui ne se reposent pas uniquement sur les mouvements de base de Mario, mais peuvent itérer avec une plateforme sous d'autres formes. On esquive toujours des pièges, mais en gérant la vitesse d'un boulet de canon, ou avec les sauts bien plus prononcés d'une grenouille etc. Et comme on sait Nintendo capable d'une ingéniosité assez diabolique avec ce genre d'idée, on n'est pas surpris de constater qu'il y a une cinquantaine de "chapimorphoses".


Avant que je ne me pose en rabat-joie, j'admets très volontiers que l'ingéniosité est là...par moment. On prend vite le plie de jeter son chapeau sur tout et n'importe quoi, parfois avec une petite surprise quant au résultat. J'ai particulièrement aimé certaines transformations comme le mille-pattes ou la graine aux longues jambes qui proposent de courts challenges rigolos. Beaucoup de transformations sont très amusantes à utiliser donc et clairement, chaque niveau foisonne de petites choses à découvrir avec cette idée...de petites choses.




Je pense que c'est ici qu'est réellement mon souci avec SMO; c'est un jeu de petites choses. Rempli à ras bord d'idées, mais de petites idées. Et pratiquement jamais le jeu ne parvient à élaborer, à détailler, à prononcer, à compiler les idées pour créer un challenge satisfaisant.


Le jeu est clairement, encore bien plus que tous les autres épisodes 3D, un collectathon. Seulement ici, IL Y A TROP DE LUNES. La plupart des lunes (les items dont il faut un minimum pour progresser au niveau suivant) sont disposées de manières évidentes ou dans des challenges qui se répètent de monde en monde. Typiquement, écraser une bosse de terre, poursuivre un lapin, trouver Captain Toad (pas franchement super bien caché), porter un certain type de vêtement etc. tout cela mène à la majorité des lunes. Et si ce n'est pas la majorité, c'est en tout cas ce que cela m'a semblé être. Le reste, plus intéressant, est divisé en deux catégories: les challenges de plateformes et les mini-énigmes.


Les challenges de plateformes peuvent se montrer variés, malgré leur relatif petit nombre, et ce grâce à Cappy et aux transformations qui apporte parfois un twist bienvenu à la formule classique; mais même ceux-ci ne prennent jamais vraiment en épaisseur. Même après avoir battu le boss final, même après avoir largement parcouru le "end-game", mis à part une partie du tout dernier niveau, il n'y a rien d'extraordinaire ou de très demandeur en terme de plateforme, et encore moins qui demande une transformation.


Et les énigmes sont du même acabit. Parfois, il y a un truc vraiment rigolo à faire, ou alors il faut bien saisir quelle transformation est nécessaire pour quelle lune. Parfois même, comprendre comment amener la transformation au bon endroit est l'énigme en elle-même. Seulement ça n'est jamais évolué au point d'être un grand moment de jeu vidéo.




Je pense que tout cela a à faire avec le level-design du jeu que j'ai trouvé globalement fouillis.


Les niveaux sont soit assez larges sans être forcément très bien remplis, soit plus restreints mais tellement dense qu'on ne sait pas trop quoi regarder en priorité. Il y a une quinzaine de "royaumes", dont certains anecdotiques ne servent que pour quelques lunes, mais dont la plupart propose plus de 50 lunes au total.


On pourra arguer (et c'est tout à fait recevable) que la quantité de petits items est là pour récompenser l'exploration en détail des lieux, pour pousser le joueur à regarder tout ce qui a été mis dans ces niveaux. Un peu à la manière des graines et des épreuves dans Breath Of The Wild, dont le nombre sert à récompenser le joueur qui voyage. Sauf que Super Mario Odyssey n'a pas autre chose à proposer que ses niveaux et sa plateforme. Et ces niveaux ne sont pas extraordinaires à explorer, ni en taille, ni en détails.


S'ils sont assez jolis à voir et certains se montrent vraiment bien *level-designé*s (New Donk City est un très bon niveau pour l'exploration) je n'ai pas trouvé l'ensemble affolant en terme d'architecture. Je pense que cela est du au fait que, contrairement aux épisodes précédents, chaque niveau est ouvert à l'exploration complète pour les collectibles. Dans 64, Sunshine, Galaxy ou 3D Worlds, chaque niveau était construit pour une petite dizaines de challenges maximum. L'architecture était conçue en conséquence, et souvent les niveaux marchaient sur de courts challenges mais de plus en plus complexes. Certes il y avait de la réutilisation (pour 64 notamment, où l'on pouvait se taper parfois quatre fois le même chemin pour atteindre quatre étoiles différentes) mais atteindre une étoile était le but du jeu et cela réclamait de maîtriser le jeu. Odyssey semble plutôt s'orienter vers "l'exploration est le but"; et cela se fait sentir sur l'aspect challenge plateforme du jeu qui est utilisé avec parcimonie au lieu d'être le cœur de l'expérience.


Et comme je l'ai dit plus haut bah...les royaumes de Super Mario Odyssey, ce n'est pas le Hyrule de Breath Of The Wild. Il n'y a pas tant de chose à voir et avec cette direction artistique un peu touche à tout, il n'y a pas de sensation générale de lieu non plus. Les hubs sont sympathiques visuellement, chacun à leur manière, mais pratiquement aucun n'a vraiment sa propre mécanique forte qui le rend unique. En comparaison, un 3D Worlds qui manquait de personnalité avait par contre tout compris au niveau des challenges, avec une mécanique par niveau, et une manière incroyablement solide et maîtrisée de les utiliser et de les faire progresser en difficulté. Dans Odyssey tout m'a semblé un peu plat, au point de finir par jouer de manière automatique, et sans satisfaction particulière à chaque nouvelle lune trouvée.




J'ai bien conscience que ma perspective sur cet épisode est en grande partie biaisée par ma vision des épisodes précédents et je ne blâmerai pas Nintendo pour avoir tenté quelque chose de nouveau avec la formule. Quelque chose aussi de plus abordable pour les joueurs plus occasionnels qui trouveront ici de quoi s'amuser, puisque la plupart des challenges se trouvent dans l'exploration, l'observation et plus vraiment dans la maîtrise complète des contrôles. Super Mario Odyssey reste un bon jeu, j'en conviens. Simplement il me semble un peu faible en terme de level-design pour vraiment convaincre avec sa flopée de lune à trouver; aucune ne reste vraiment en mémoire, tout est sympathique, mais à petite échelle. Et si l'ingéniosité du concept de base est là et trouve quelques occasions de briller, ça manque globalement d'un moment "whow" où la qualité de la mécanique de jeu OU du level-design impressionne, comme cela pouvait être le cas même dans 3D Worlds, l'épisode le moins inspiré de la saga en 3D. Peut-être aurait-il fallut pouvoir transporter les "chapimorphoses" entre royaumes, histoire de s'offrir des challenges basés sur du back-tracking. Peut-être aurait-il fallut être plus restreint en nombre pour éviter la loi des rendements décroissants...en tout cas, il me restera comme un acte manqué. J'attendais un repas de Noël avec saumon, dinde et bûche, et je me suis retrouvé avec un apéritif dinatoire avec des petits feuilletés; c'était bon, mais pas vraiment roboratif.

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le 7 déc. 2017

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seblecaribou

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