Super Mario RPG
7.2
Super Mario RPG

Jeu de ArtePiazza et Nintendo (2023Nintendo Switch)

Un remake maîtrisé, mais trop fidèle ?

Temps de jeu : 20 heures
Mon deuxième Super Mario RPG
Test rédigé pour Nintendo-Difference [#103]

À chaque nouvelle annonce d’un remake ou d’un remaster, la même question : était-ce vraiment nécessaire ? En effet, si l’on peut s’interroger sur la pertinence d’une nouvelle version ressortie trois ans seulement après la parution initiale d’un titre (Marvel’s Spider-Man Remastered ou The Last of Us Part II Remastered), difficile de ne pas se montrer plus complaisant lorsqu’une œuvre nous revient des dizaines d’années plus tard. Un accueil d’autant plus chaleureux lorsque celles-ci proposent des nouveautés et/ou des améliorations ergonomiques, en plus d’un évident lifting graphique. On pense aux nombreux remakes de Pokémon, ceux de Metroid II : Return of Samus ou de Final Fantasy VII, ce dernier allant jusqu’à réimaginer ses fondations même. Alors forcément, quand Nintendo annonce le retour de Super Mario RPG, on saute de joie. Vingt-sept années plus tard, Mario et ses amis débarquent dans une aventure remise au goût du jour par ArtePiazza, essentiellement connus pour leurs travaux sur les remakes des Dragon Quest IV à VII et les remasters de Romancing SaGa 2 et 3. Disponible sur Nintendo Switch depuis le 17 novembre dernier au prix de 59,99 €, le titre en a profité pour être localisé en français ; une première dans son histoire. Après plus de quinze heures de jeu, nous pouvons désormais vous donner notre verdict sur les premières péripéties RPG du plombier, remises au goût du jour malgré des bases inévitablement vieillissantes.

Un saut dans le temps

Avant toute chose, il est bon de noter que le rédacteur de ce test – un amoureux des Paper Mario appréciant la saga des Mario & Luigi – n’a jamais joué à la version originale du titre avant la sortie du remake. Quelques sessions en parallèle ont été nécessaires pour comparer le matériau brut de sa refonte, toutes effectuées sur la SNES Mini. Évacuons donc tout de suite les différences qui sautent le plus aux yeux, à commencer évidemment par tout le travail graphique. La direction artistique, très respectueuse de celle de l’époque, fonctionne à merveille avec ses personnages et ses environnements écrasés façon coffre à jouets, tout en étant plus détaillé dans ses modèles et textures. Les couleurs y sont davantage chatoyantes, sa palette n’étant plus limitée par les contraintes techniques de l’époque, mais c’est davantage dans l’utilisation de ses jeux de lumière que le titre gagne en vie. Les nuances de noir y sont étendues, les décors sombres plus lisibles. Seule la vue en 3D isométrique risque de fâcher les joueurs, toujours aussi peu adaptée à certaines phases de plateforme précises. On regrette aussi les boîtes de textes de l’époque et leur effet « parchemin », remplacées par la froideur de cases bien moins stylisées.

Jadis plutôt impressionnant avec ses sprites et environnements pré-calculés, le remake parait « forcément » moins ambitieux dans sa volonté de respecter l’œuvre de base, à la manière de celui de The Legend of Zelda : Link’s Awakening. Moderne, joli, mais aussi assez technique car s’il y a bien quelques rares chutes de framerate ici et là, notamment durant l’animation d’un coup trio ou lors de la première cinématique en jeu, Super Mario RPG se révèle suffisamment fluide. Surtout, on apprécie grandement la réorchestration de la bande-son signée par la légendaire compositrice Yoko Shimomura, absolument magnifique de bout en bout. Le joueur y (re)trouvera un thème de combat particulièrement entêtant, l’enchanteresse et mystérieuse musique du Dédale de la Forêt, l’amusant morceau de country du mini jeu du wagon dans la mine ou encore l’élégante piste du rez-de-chaussée de la Tour de Booster. Toutes font mouche, parvenant à réinsuffler des notes auxquelles la série originale nous a peu habitué. La patte singulière de Yoko Shimomura nous a rappelé d’autres de ses compositions plus récentes, comme certains morceaux présents dans Xenoblade Chronicles. Un pur délice, que les plus nostalgiques peuvent troquer à tout moment contre les versions originales disponibles dans les options du jeu.

La princesse est dans un autre château

L’histoire de Super Mario RPG narre l’énième enlèvement de la princesse Peach par l’infâme Bowser. Comme toujours, c’est à Mario que revient le devoir de la délivrer des griffes du mal. Fait intéressant, le prologue plonge le joueur directement dans le château du roi des Koopa ; un combat « final » plus tard, Bowser est défait et la princesse libérée. Ce n’est évidemment là que le début des ennuis, puisqu’à peine son duel achevé, le château est assiégé par Exor, une épée gigantesque et vivante ! Dans sa course, la lame détruisit également la route des étoiles, la scindant en sept morceaux qu’il faudra réunir. Mario, de nouveau séparé de Peach, doit se remettre en route pour la secourir. Sur son chemin, il fera la rencontre de nouveaux alliés et découvrira les funestes desseins d’Exor et de la bande de Forgeroi, le véritable antagoniste de cette aventure. Si le scénario est similaire à celui de la version SNES, le remake permet d’en profiter pour la première fois en français. Une localisation toujours aussi exemplaire, adaptant à la perfection calembours et clins d’œil.

Quelques dialogues ici et là ont été modifiés dans leur esprit, comme une scène où Mario est déguisé en statue, alors présenté par son artiste comme un personnage triste ; Super Mario RPG préfère adoucir cette scène et l’expose désormais comme une figure résolue et forte. Rien de gênant dans les faits et même plutôt raccord avec la vision moderne souhaitée par Nintendo vis-à-vis de la licence et de son héros. Bien que le scénario n’ait jamais été le focus principal d’un titre Mario, même lorsqu’il s’essaie au jeu de rôles, Super Mario RPG peine à susciter notre intérêt. Mélange raté entre le monde de Mario et de l’heroic fantasy, l’univers manque cruellement de liant, tandis que ses nouvelles figures ne parviennent pas à se montrer suffisamment intéressantes pour développer chez le joueur une attache particulière. Si Mallow possède bel et bien une quête personnelle et un développement tangible, Geno lui, parait fade et trop peu intégré au reste du groupe. Finalement, c’est davantage du côté des personnages déjà existants que l’on se plait à suivre et découvrir de nouveaux pans de leur personnalité, à l’image d’un Bowser pleurnichard et soucieux de son image ou d’une princesse Peach enfin désireuse de passer à l’action.

Souvenirs de Saint-Mallow

Dans Super Mario RPG, le jeu se découpe en zones bien distinctes, lesquelles se débloquent progressivement et peuvent être sélectionnées via une carte du monde à la manière d’un Super Mario Bros. ; le remake permet au joueur de voyager rapidement d’un point à l’autre simplement en passant par le menu de la carte. Les environnements y sont variés, allant d’un royaume Champignon méconnaissable à un lac habité par des têtards, en passant par des mines appartenant à des taupes, un volcan en activité ou encore une épave plongée au fond de l’océan. Là, de nombreux coffres – parfois invisibles – renferment pièces et objets, utiles pour acheter équipements et surmonter les potentielles difficultés d’un combat. Avec un inventaire assez limité, Super Mario RPG propose désormais une boîte de stockage dans la maison de Mario, transférant automatiquement l’objet en surplus acquis.

Sur leur route, Mario et ses amis viendront en aide à de nombreux personnages hauts en couleur, mais devront également se défaire d’ennemis en tous genres. Nouveauté là aussi propre au remake, un compendium dédié au bestiaire fait son apparition ; pour le remplir, il ne faut pas seulement croiser la créature, mais aussi utiliser la capacité « Mentaliste » du nuageux Mallow, laquelle révèle faiblesses élémentaires et points de vie du monstre en question. Les combats s’y déroulent au tour par tour, mais demanderont au joueur de réaliser des actions en temps réel. Après avoir choisi une technique ou une attaque, il faut en effet appuyer sur une touche en rythme avec l’animation du coup choisi. Selon la justesse du timing, la puissance des dégâts infligés peut grandement augmenter, mais également étendre une partie de l’attaque aux autres ennemis ; c’est ce que l’on appelle une action coordonnée. De même pour la défense, il suffit de presser le bon bouton au bon moment pour réduire, voire nullifier, les dégâts reçus.

Où il y a Geno, il y a du plaisir

Une mécanique de jeu qui n’est pas sans rappeler les Mario & Luigi, puisqu’il s’agit là de l’inspiration des titres de feu AlphaDream. Contrairement au jeu original, le remake de Super Mario RPG indique la fenêtre d’action à l’aide d’un point d’exclamation bien visible, facilitant l’entreprise bien qu’il faille posséder des réflexes aiguisés. Si les attaques et gardes parfaites sont évidemment le point névralgique du titre, la version remise au goût du jour y incorpore également une nouveauté de taille : la jauge d’action. Celle-ci se remplit à chaque action coordonnée, parfaite ou non, le gain engrangé devenant de plus en plus important selon la justesse du timing et la durée de la chaine. Plus elle est longue, plus elle confère de bonus à l’équipe, comme une augmentation de la vitesse, de l’attaque ou de la défense magique ; un critère dépendant de la composition du groupe actif. Mieux encore : à 100 %, le joueur peut activer une « attaque trio » aux effets surpuissants et dont la nature varie selon les membres sur le terrain.

Chaque attaque trio possède une cinématique qui lui est propre, toutes étant particulièrement réussies et plaisantes à visionner ; pour les plus pressés ou ceux qui parviennent à recharger la jauge d’action rapidement, il est possible de passer lesdites cinématiques à l’aide d’un bouton. Côté personnages, Mario est un personnage équilibré, possédant des techniques de feu et de saut. Mallow peut soigner une cible unique, mais aussi et surtout user de compétences liées à la foudre et la glace. Geno est un personnage rapide et dont les dégâts sont importants. Bowser est résistant et fort, mais dont la vitesse et la magie sont faiblardes, capable d’utiliser des techniques d’empoisonnement et d’effroi. Peach quant à elle, est davantage orienté soutien avec ses soins, sa capacité de faire revivre un allié tombé au combat, mais aussi d’annuler les altérations d’état du groupe comme le poison, la peur, la transformation ou le silence.

Trio minots

Ainsi, l’attaque trio de Mario lorsqu’il est accompagné de Peach et Mallow provoquera un soin de tout le groupe, actif comme passif, en plus de ressusciter les personnages éliminés. À l’inverse, l’attaque trio de Mario, Geno et Bowser infligera des dégâts de manière aléatoire à tous les ennemis. Mélangez Bower et Mallow au plombier moustachu, et vous obtiendrez une importante attaque élémentaire globale basée sur le feu, la glace et la peur. Tout le long d’un combat, il est possible d’alterner un personnage actif avec un autre passif pour répondre à n’importe quelle situation donnée. Comme souvent dans un RPG, tous les personnages ne se valent pas et tendront naturellement à trouver une place récurrente ou non dans le groupe actif du joueur. En ligne droite, le jeu n’est pas franchement difficile. Avec toutes les nouveautés propres au remake, comme la jauge d’action, Super Mario RPG semble même être encore plus accessible que la version SNES.

Et si jamais vous éprouvez des difficultés ou que vous souhaitez simplement suivre l’histoire sans trop en subir les embûches, alors un mode facile est désormais accessible à tout moment via le menu. C’est davantage dans le post-game que le challenge du titre réside. Outre les quêtes annexes permettant de mettre la main sur les équipements les plus puissants du jeu, il est dorénavant possible d’affronter à nouveau divers boss dans des versions bien plus complexes. Comptez entre onze et treize heures pour atteindre les crédits de fin, et la presque vingtaine pour le 100 %. Plutôt courte vis-à-vis d’autres titres du genre, l’aventure est au final bien calibrée : avec une durée de vie moindre, Super Mario RPG aurait été expéditif, mais en étant plus long, le jeu aurait souffert de la répétitivité certaine de son système de combat. Agréable dans sa simplicité et plaisant dans sa gestion du timing des coups, il n’empêche que le tout parait aujourd’hui terriblement basique. Pire, il ne parvient jamais à se réinventer au fil de l’aventure.

Jeu de drôles

Il y a bien la carotte de la progression des personnages, laquelle peut pousser les plus déterminés à enchaîner les affrontements, mais là aussi la personnalisation du groupe reste somme toute sommaire. À chaque passage de niveau, Mario et ses amis proposent au joueur d’augmenter un groupe de caractéristiques parmi trois : l’attaque et la défense, les points de vie ou l’attaque magique et la défense magique. Côté équipements ce n’est guère mieux, en attestent les trois pauvres emplacements dédiés à l’arme du personnage, son armure et son accessoire. À la manière des Final Fantasy de l’époque, chaque nouvelle boutique n’offre qu’un type d’équipement à acheter pour chaque héros, généralement meilleur que celui alors porté par le joueur. Finalement, seule la gestion du système de mana – représentée par les Points Fleur – parait intéressante. Nécessaires pour lancer une technique, les Points Fleurs peuvent être augmentés en trouvant des objets précis et en les consommant. Surtout, le groupe se partage l’entièreté de la jauge, demandant alors une certaine réflexion quant à leur utilisation optimale.

Vaut-il mieux privilégier les techniques d’un seul personnage ? N’utiliser que les compétences les plus puissantes, mais aussi les plus coûteuses en Points Fleur ? Pour contrebalancer son système de combat et ses mécaniques de progression très linéaires, Super Mario RPG incorpore tout au long de son aventure des situations inattendues prenant la forme de mini-jeux, comme la course de Yoshi, la composition de partitions musicales à l’aide de têtards, la descente d’une cascade regorgeant de pièces ou encore la traversée d’une mine en wagonnet. Tous ne se valent évidemment pas, mais chacun d’entre eux parvient à briser de manière bienvenue le rythme de l’aventure. Côté level design, force est de constater que le titre à pris un méchant coup de vieux : l’exploration y est particulièrement limitée par la taille réduite des zones, mais surtout par le manque d’embranchements disponibles. Pour dire, outre le Canal Croâ-croâc et de ses multiples niveaux (immergés ou non), rien ne se montre réellement mémorable.

Conclusion

Super Mario RPG est un titre solide pour quiconque souhaiterait découvrir en douceur le monde des JRPG. Avec une réalisation visuelle, sonore et technique presque sans défaut, difficile de ne pas le recommander au plus grand nombre. Enfin doté d'une localisation française et d'améliorations en tous genres, sans oublier quelques ajouts de contenu, rares sont les défauts qui semblent nuire à sa recommandation totale. Pourtant, on s'avoue partiellement déçu du remake d'ArtePiazzo, certes plein de bonnes intentions, mais fatalement handicapé par son matériau de base. Si vous faites partie de cette frange de joueurs n'ayant pas connu le titre original, mais que vous avez de la bouteille dès lorsqu'il s'agit de jeux de rôles gravitant autour de l'univers Mario, alors il y a de fortes chances pour que ce Super Mario RPG paraisse limité, voire carrément désuet. Le système de combat y est plus simple malgré l'addition des attaques trio, l'histoire trop gaguesque pour être intéressante, la durée de vie faiblarde et la difficulté globale peu palpable. Le charme ne fonctionne plus autant qu'à l'époque et s'il fallait absolument trancher entre ce remake et celui à venir de Paper Mario : La Porte Millénaire, vous auriez moins de risque à jeter votre dévolu sur l'épisode GameCube, moins générique et oubliable. Pour les amoureux du titre d'origine, Super Mario RPG est une version modernisée et réussie, mais aussi très (trop ?) fidèle de la version SNES ; si vous l'aviez adoré à l'époque, aucune raison que ce ne soit pas le cas avec la mouture Nintendo Switch.

Créée

le 30 nov. 2023

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Kalimari

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