Âmes sensibles s’abstenir ! Nous allons causer soins de conservation et salons funéraires. (Donc si faisiez partie du lot de fuyards pour ma critique sur Graveyard Shift, vous pouvez faire la même chose ici, les tutos mascara c’est l’autre porte).

Voilà un jeu qui ne ressemble pas aux autres, c’est le moins qu’on puisse dire !

On incarne Rebecca, jeune thanatopractrice qui vient de passer son diplôme et qui a trouvé un petit travail chez les Pompes funèbres de River Fields. Ambiance fiesta, DJ et cotillons pour fêter cette réussite ? Que nenni. Juste un modeste verre dans le diner du coin avec mamie un peu inquiète, parce que bon un métier sur "la mort"... c'est toujours un peu inquiétant.

Raymond, son patron -aussi raide que ses cadavres et tout aussi chaleureux – nous évalue en début de jeu pour faire les soins de conservation classiques sur un défunt, ce qui sert de tuto au petit joueur novice et pétrifié que nous sommes.

Heureusement, Rebbeca a à portée de mains un petit bloc note avec une to-do-list de toutes les étapes à cocher en matière de thanatopraxie. Elle inspecte d’abord le corps du défunt (pour ceux qui n’auraient pas encore testé le jeu, je vous rassure : les corps sont tous en très bon état, le jeu lui-même ayant ses limites avec le réalisme, on ne se retrouve pas avec un cadavre sorti de l’IML avec la boite crânienne qui reste dans les mains…). Ensuite on reporte les blessures ou marques du défunt dans un fichier sur ordinateur puis on imprime le tout et on classe la fifiche au dossier. Jusqu’ici rien de terrible.

C’est après que la suite devient plus… plus moche.

On manie des instruments assez barbares comme un trocart ou un injecteur d’aiguilles pour fermer la bouche du défunt (ce dernier instrument n’est pas – à ma connaissance – utilisé en France dans les soins courants de conservation et cela me rassure car sur le moment, j’ai vraiment eu l’impression de casser une mâchoire).

J’ai rencontré des difficultés de maîtrise sur ce tutoriel car évidemment les étapes sont assez précises et le contrôle n’était pas des plus instinctif, notamment l’accès à l’inventaire qui est à revoir. La manipulation du chariot fut aussi un grand moment, j’ai eu l’impression de pousser un chariot sur un sol lustré à l’huile d’olive alors qu’en fait j’étais juste pas dégourdie.

Sinon Rebecca doit avoir de toutes petites mains car elle ne peut pas porter plus de deux gros objets à la fois, ce qui est assez casse-pied (inventez-lui une poche kangourou, je ne sais pas moi).

Lorsque le tuto démarre, Raymond se tient debout derrière son bureau pendant que nous nous affairons sur le mort (et hop un petit coup de lingette Nivea sur la frimousse) observant la scène d’un air impassible, la journée tire à sa fin et un grand soleil orange tombe à l’horizon par l’unique fenêtre de la pièce. Je crois distinguer au dehors un début de campagne presque bucolique mais je ne suis pas ici pour rêvasser et m’inventer cinquante vies : j’ai un cadavre à formoler.

Puis le bougre nous chasse un peu précipitamment en disant « je finirai, tu peux y aller ».

On rentre donc chez nous, toute contente du devoir accompli. Le plan suivant représente Rebecca dans son appartement (très sympa pour ce que j’en ai vu). Dehors, il fait nuit noire et une pluie lourde s’abat sur les vitres sans discontinuer. Ambiance cocooning, je me serais presque emballée dans un gros plaid toudoux en regardant des navets à la télé. Je pense que c’est aussi ce que la pauvresse avait en tête sauf que c’est ce moment que choisit Raymond pour nous appeler à la rescousse à la morgue en mode « oh je me sens pas très bien ce souar, il faudrait que tu me remplaces pour le service de nuit, il y a des corps à préparer allez steuplé ».

Grrrr. Il pleut quoi. Et il fait nuit. Et mes pâtes carbonara viennent de finir leur valse dans le four à micro-ondes. Mon canapé me tendait les bras avec tant de conviction.

Mais Rebecca n’est pas une grosse feignasse de française comme moi (je pense que je devais être un gros chat domestique dans une vie antérieure, à tellement apprécier la chaleur, les siestes et les canapés), le jeu est américain, on est aux États-Unis donc si tu ne veux pas perdre ton job, il faut se bouger les fesses donc hop, ni une ni deux, Rebecca saute dans sa voiture pour débarquer à la morgue en pleine nuit sous la flotte.

Sitôt arrivée, sitôt enfermée. Raymond est un type bizarre, on le pressent un peu depuis le début et ça se confirme (mais pas dans le sens Me Too, du genre « il m’a plaquée contre le frigo et m’a embrassée »), puisque le bougre se trouve à l’extérieur des Pompes Funèbres et nous enferme pour qu’on réalise les embaumements. S’en suit une loOoongue tirade au téléphone pour nous expliquer pourquoi il fait tout ça (apparemment il y aurait des démons de partout, alala c’est infesté ma pauvre dame, la femme de ménage, le gardien de nuit et même l’entreprise de dératisation : il se sont tous enfuis en courant). Raymond nous explique qu’il a laissé des instructions sur des cassettes audios pour nous guider dans la chasse aux démons et qu’il a même alimenté une base de données dédiée à ce sujet (chacun ses passions hein, je ne juge pas).

Et c’est LÀ que le jeu se prend magistralement les pieds dans le tapis : liquider un démon va s’avérer horriblement compliqué parce qu’il faudra l’équivalent d’une notice IKEA pour en venir à bout (sans se tromper sinon ça ne marchera pas et on meurt).

Heureusement, Rebecca est une fille courageuse : on découvrira au cours du jeu qu’elle a un passé très dark (comme c’est original) et que justement, elle possède un grand courage et une certaine force de résilience qui vont beaucoup lui servir dans cette épreuve, que dis-je, ce calvaire (si elle avait été française, je pense qu’elle aurait contacté un syndicat pour se plaindre de ses conditions de travail et se serait barrée par la fenêtre à la seconde où Raymond l’aurait enfermé).

Tout au long du jeu, apparitions terrifiantes, possessions démoniaques et jump scares sont au rendez-vous… mais la narration est malheureusement figée par les étapes de l’embaumement de chaque corps, rendant le jeu finalement assez répétitif et contraint. Néanmoins, je pourrai désormais placer des mots comme "glutaraldéhyde", ou "formaldéhyde" dans ma prochaine partie de Scrabble.

Un autre reproche que je peux formuler envers le jeu : une certaine pauvreté en matière de personnages. En rajouter un ou deux, n’aurait pas été du luxe (un maître de cérémonie, un transporteur funéraire ... bref du peuple). Je trouve aussi très dommage que Raymond soit absent la majeure partie du jeu, des interactions un peu plus développées avec sa stagiaire auraient été bienvenues ! J’ai l’impression que les développeurs se sont dits : « ah mais non, si elle n’est pas toute seule, ce ne sera pas assez flippant! » ce qui n’est pas forcément juste.

L’originalité du jeu réside, au-delà de sa thématique assez osée finalement – dans les fins possibles, qui peuvent se compléter mais qui nécessitent de jouer durant plusieurs heures pour bénéficier des hantises susceptibles de vous faire avancer… et encore à condition de savoir où regarder et à quel moment.


Pour finir, je vous mets le lien d’une autre critique, très bien rédigée par mon ami sur le jeu (avec des images pour illustrer le propos) et notamment des précisions techniques que je n’ai pas apportées ici. Il a également largement développé ses essais pour obtenir les différentes fins possibles du jeu. Bref, si vous voulez du complet, c’est par ici :

https://www.videogiciels.fr/?post/2025/09/07/The-Mortuary-Assistant-%28PC%2C-PS5%29


Sur ce je vous abandonne (momentanément), j’ai une partie d’Alien Isolation qui me tend les bras !


Proximah
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le 14 sept. 2025

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Proxima

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