Supermassive a perdu la formule

Formule que le studio n'avait finalement su exploiter que dans Until Dawn, qui conserve encore aujourd'hui un vrai capital affection auprès des fans de jeux narratifs. Les titres épisodiques de l'anthologie Dark Pictures qui ont suivi ont reçu un accueil plutôt mitigé, même si je n'ai fait que Man of Medan que j'avais trouvé moyen. Malgré tout, j'étais impatient de voir ce que pourrait réussir à faire Supermassive en retournant à un format de jeu plus long dans lequel ils avaient déjà brillé, même si The Quarry a été développé et est sorti dans une discrétion plutôt inquiétante.

Au bout du compte, le jeu souffre de multiples problèmes : le scénario est plat et la clique de personnages jouables peu attachante. Je peux comprendre que le studio essaie de toucher un certain type de public, mais personnellement incarner des accros au smartphone et aux réseaux sociaux passablement imbéciles qui passent leur temps à prendre les pires décisions du monde ou à parler romance alors qu'ils pissent le sang, ça ne m'amuse qu'un temps. De plus, il y a trop de protagonistes, ce qui a tendance a diluer l'action plus que nécessaire, surtout que les QTE sont souvent trop faciles (une simple pression sur une direction plutôt qu'un bouton aléatoire qui créerait plus de tension). En passant, les QTE inutiles pour attraper un objet qu'on nous lance ou faire un high five, y'en a marre.

Si tout cela rend le jeu ennuyeux, d'autres défauts le rendent injuste, ce qui est pire : certaines mécaniques sont obscures (le blocage de respiration par exemple) et se soldent par plusieurs échecs ou une recherche sur Internet avant de réussir à les comprendre. On se retrouve parfois aussi dans des situations où se joue la vie d'un ou de plusieurs personnages sans que le jeu ne nous laisse suffisamment de temps pour comprendre ce qui est attendu de nous, ce qui se conclut là aussi par des morts frustrantes, car on n'a pas le sentiment qu'on aurait pu les éviter. La recherche de collectibles est pénible puisqu'elle ne peut pas se faire en un run, certains des objets étant inaccessibles selon le cheminement choisi. Parfois, le fait d'emprunter un passage déclenchera une cinématique qui empêchera de revenir en arrière alors qu'on n'avait pas fini d'explorer, sans qu'on n'ait réellement moyen de le prévoir. Si je peux à la limite comprendre le choix d'empêcher le joueur de sauvegarder lui-même et ainsi de le forcer à assumer les conséquences de ses actes sans pouvoir revenir dessus, c'est dommage de devoir subir des erreurs de game design à cause de cette feature.

L'impossibilité de skip les cinématiques et les nombreux dialogues, même lors de runs ultérieurs, n'est pas un bon choix non plus : il va annihiler de nombreuses velléités de replay (ce qui est quand même l'essence de ce type de jeu), même chez les gens comme moi qui apprécient habituellement de voir les diverses fins et cheminements. Mais là, il faut avoir envie de s'infliger une certaine dose de souffrance pour faire les 3 parties (minimum) nécessaires à l'acquisition du platine sans pouvoir passer certaines platitudes et autres dialogues peu inspirés.

Au niveau technique, c'est chouette d'avoir embauché des acteurs connus mais la motion capture n'est pas des plus réussies : tant que les expressions sont fixes, ça passe encore, mais lors des discussions ça se gâte : les visages font preuve d'une physique et d'une élasticité qui sont assez peu réalistes, plus particulièrement en ce qui concerne les personnages féminins.

Au final, The Quarry va se retrouver offert sur le PS+ Extra en février seulement 8 mois après sa sortie et ce n'est peut-être pas si surprenant étant donné tous ses problèmes. Ca reste probablement la meilleure façon de faire le jeu, puisque la durée de vie très courte (dix petites heures nécessaires pour arriver au bout du scénario) ne justifie pas le tarif plein demandé lors de la sortie, comme malheureusement trop souvent avec les titres narratifs.