What Remains of Edith Finch, développé par Giant Sparrow, ces mêmes développeurs qui nous avaient enchantés avec le titre « The Unfinished Swan » en nous proposant une expérience complétement dépaysante, innovante et touchante. Quelle ne fut pas ma surprise au détour de quelques lectures sur le net, en découvrant qu’ils avaient sorti un nouveau jeu. Connaissant leur précédant titre, je n’avais pas rechigné une seule seconde à mettre les 20 euros demandés, et, clairement, je ne le regrette toujours pas.


Je voulais commencer par une brève description du jeu, mais là, nous sommes déjà confrontés à un problème de taille … Voici le dilemme :


« Décrire une expérience indescriptible »


Je m’en remettrai ainsi humblement à une interview de Ian Dallas, Directeur Créatif du jeu :
« WROEF est une collection d’histoires courtes à propos d’une famille maudite et vous incarnez Edith Finch, revenue dans la maison dans laquelle elle a grandi, pour tenter de comprendre pourquoi elle est la dernière de sa famille à être encore en vie. »


Dès le départ, l’ambiance est déjà posée, il y a cette atmosphère mystérieuse, morbide et pesante qui rôde dans cette maison, avec le joueur ayant pour motivation principale de savoir ce qui est arrivé à cette famille décimée.
L’environnement fourmille de détails, et je ne peux que vous conseiller d’y prêter une attention toute particulière.
Et puis nous allons être amené, au travers du récit de chaque membre de la famille, à non seulement, enlever une partie du voile qui plane sur la famille d’Edith, mais aussi à découvrir différentes mécaniques de gameplay, toutes plus innovantes les unes que les autres, au travers de séquences oniriques, permettant à la fois une immersion totale et également d'aborder avec brio des thématiques à la fois si simples et si difficiles à appréhender, qui sont : l’existence, la vie et la mort.


Comment ne pas souligner ce choix ingénieux de lier « histoires tragiques » et « séquences oniriques » par le biais desquelles elles nous sont racontées.
Un tour de maître qui permet d’impliquer directement le joueur, de l’interpeller au plus profond de lui-même, sans pour autant produire l’effet inverse en dédramatisant la scène, le contexte.
Un réel travail d’équilibriste.
Cela renforce par ailleurs l’identification et permet une immersion totale. Nous sommes partis d’Edith, au début du jeu, que nous incarnons avec une certaine « distance », un certain détachement, pour ensuite, au fil de l’aventure, avoir la sensation de faire presque parti intégrante de cette famille.


Le jeu ne nous met jamais devant le fait accompli. Au travers de l’histoire racontée par Edith, celle-ci se pose des questions, légitimes, qui vont amener à des réflexions, jusqu’à finir en apothéose dans la dernière ligne droite, avec notamment cette réflexion qui est posée au joueur :


Qu’est ce qui est le plus important dans tout ça ? :


Passer sa vie à chercher le pourquoi du comment, l’insaisissable, quitte à, peut-être, ne jamais répondre à la question, et au risque de passer à côté de tant de belles choses ?


Ou bien, vivre et profitez de chaque instant présent comme si c’était le dernier ?


L'enseignement que l'on peut en tirer et que le jeu veut nous mettre en avant, est, que le principal n'est pas de comprendre pourquoi ils ne sont plus là, ni d’où vient cette malédiction, mais de nous montrer que malgré toutes les tragédies auxquelles nous sommes confrontées, ce qui est réellement important, c’est de prendre conscience de la chance de notre existence et de savourer chaque instant, de vivre pleinement en somme.
C’est une lettre d’amour à la vie envoyée au joueur, « acteur » et en même temps spectateur des toutes ces histoires poignantes.


Je n’ai pas vu beaucoup d’interviews concernant la réalisation du jeu, mais je ne peux me résilier à penser que ce jeu ait été fait avec énormément "d’implications personnelles".
Quand on pense que l’on vit dans une société qui nous apprend à enfouir nos émotions, à les garder, pour mieux les laisser nous consumer, venir avec ce jeu est un vrai pavé dans la mare et surtout, une philosophie de vie.


Je suis conscient du fait que ce jeu peut-être vécu de bien des manières, suivant votre âge, vos expériences, vos opinions et qu’il ne plaira pas à tout le monde.
Peut-être que mes quelques années passées en Médecine n’y sont pas anodines, le fait d’avoir eu un contact directement avec ce monde, le rapport à la vie et à la mort, a changé ma vision des choses, notamment sur ma prise de conscience, simplement du fait de la chance que j’avais d’être en bonne santé.
Un exemple parmi tant d’autres, certains seront peut-être d’autant plus affectés par telle ou telle histoire, qui leur rappellera tout à chacun, directement ou indirectement, un fragment de leur vie passée et/ou présente.


Ce jeu ne peut pas et ne doit pas être réduit au rang de simple « walking simulator », il transcende le genre du jeu narratif à la première personne.
Comme le dit bien Ian Dallas, WROEF n’a pas été conçu pour être appréhendé comme un jeu narratif en première intention. Il faut comprendre par-là, un jeu dans lequel vous êtes purement spectateur. Ce qu’il voulait faire, c’était transmettre, faire passer des émotions, et surtout susciter l’interrogation, le questionnement, l’imagination, tout en racontant une histoire.
En d’autre terme, il préfère nous laisser avec notre libre arbitre plutôt que d’imposer sa vision et de « subir » l’histoire.


Il y a encore des personnes qui se demandent si le jeu vidéo peut être considéré comme un art. Si cette question reste encore à débattre dans votre conscience, il ne reste plus qu’à jouer à ce jeu pour vous en convaincre : oui, le jeu vidéo est un art. Du moins, en mon for intérieur, je le sais.
De la direction artistique, en passant par le level design, les mécaniques de gameplay, le scénario, l’OST …Il est rare d’avoir l’impression de disposer entre nos mains d’un titre, dont la réalisation frôle la perfection de bout en bout.
Quel meilleur média, si ce n’est celui du jeu vidéo, pour nous raconter ces histoires avec autant d’impact ?


Certains pointeront la durée de vie du jeu, qui, certes, est très courte (2h environ), mais alors, quelle aventure !!! Intense et prenante.
D’autres également la quasi inexistence de rejouabilité du soft, qui, au-delà du fait que je trouve cet argument non pertinent pour ce genre de jeu, en ce qui me concerne, c’est un des rares que j’ai dû refaire avec plus d’un an d’intervalle, et qui m’a autant surpris la première que la seconde fois.


Au même titre que : The Cat Lady, Dark Souls, NieR : Automata, The Last of Us, Persona 5 et j’en passe …. WROEF vous laissera une sensation de « vide » intérieure doublée d’une empreinte indélébile au sein de votre cortex cérébral, comme un sentiment « controversé », très difficile à décrire sur le papier d’ailleurs, mais qui signe que vous avez vécu quelque chose de grand, de fort, de fantastique, parfois d’unique, mais surtout, que vous n’oublierez jamais. Ce genre de jeu qui vous rappelle pourquoi vous jouez au jeu vidéo.


Pour ma part, cela a été un véritable électrochoc, je ne comprends toujours pas comment, autant d’ingéniosité, de créativité a pu être trouvé par un groupe de personne … Quand on sait à quel point toutes les questions qu’ils soulèvent autour de ces thématiques citées plus haut, sont déjà extrêmement difficile à aborder, quand bien même devoir faire un jeu vidéo avec ces dernières pour principal fil conducteur … Et de réussir ce tour de passe-passe en nous proposant un excellent jeu … Juste brillant.


Merci Giant Sparrow !


PS : J’ai vraiment apprécié le clin d’œil à « The Unfinished Swan » durant l’histoire de Milton qui s’imbrique parfaitement dans la trame scénaristique ! Bravo

hixeN_
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le 4 déc. 2018

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