2021 : journal de lectures

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Plus d'un mois pour venir à bout de cet essai de plus de 300 pages, édité comme un pied en livre de poche, puisque les phrases ont la police écrasée sur une ligne, une page sur deux environ. On a vu mieux, en termes de confort de lecture. Peu de gens semblent vraiment l'avoir lu ici, et en l'ayant terminé, je comprends mieux pourquoi : le niveau est assez compliqué, Beauvoir reste l'une des plus grandes spécialistes de la philosophie qui ne soit jamais née sur le sol français, et, en outre, elle ne prend pas de gants. Il faut donc s'accrocher devant ce texte, souvent aride, dont la structure mélange des questions, des références à Sartre, et des développements autour de l'existentialisme.
Épaissi à gros traits, le but (avoué) du livre est de fournir des clés pour adopter une attitude existentialiste dans la vie, répondre aux éventuels contre-arguments, tout en étant dans une attitude concrète. Les bases sont posées, ce qui n'est pas bien vu aussi, ce qu'il faut faire, comment le faire au mieux, et voilà. Beauvoir se débarrasse trop vite de la question divine, tout en proposant une base qui couvre un maximum d'aspects de la vie. On tient là une philosophie athéiste assez correcte et complètement, individualiste sans être égoïste, devenue désuète aujourd'hui, mais qui rappelle tout de même qu'à une époque, on s'intéressait énormément à l'individu et à son émancipation, sans se moquer de lui avec des délires collectivistes. Certains développements sont malgré tout absurdes, notamment sur la notion de liberté, intimement liée au choix, dans un système où on la considère ontologiquement présente, y compris dans les cas extrêmes. Dire qu'un homme torturé est par exemple libre de résister, qu'il s'agit d'un choix, c'est à la fois vrai (une tautologie) et une aberration qui prouve les limites du concept. Cela dit, on tient probablement ici l'une des meilleures défenses de Sartre, et Beauvoir reste plus intéressante à mon avis dans ses essais, sur le féminisme (Le Deuxième sexe), sur l'existentialisme (ici) que dans son autobiographie.

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Le livre est plus intéressant pour obtenir des compléments sur le cheminement de la pensée intellectuelle de Foucault, qui a changé manifestement après 1975 que pour avoir une vision omnisciente des effets du LSD sur un cerveau. Seule la synesthésie est amplement décrite, sans qu'on ne sache vraiment pourquoi le LSD a produit des intuitions dans le cerveau de Foucault qui l'ont amené à réécrire complètement son "Histoire de la sexualité", dès le seconde tome. En cela, d'autres expériences, relatées avec plus de détails seront plus intéressantes pour ceux qui s'intéressent d'abord à cette drogue, avant de l'être par Foucault.

On trouve aussi dans ce court manuscrit (deux, trois heures de lecture maximum, pour les plus lents) un aperçu de la communauté californienne des années 70, amateure de prises régulières de LSD, aux moeurs libres, vivant à l'écart de la société dans des cabanes aménagées, avant que cette drogue ne soit vilipendée par les autorités et caricaturé dans le reste de la société. La sortie aujourd'hui du livre n'est d'ailleurs pas anecdotique, puisqu'on commence à se rendre compte qu'on s'est moqué un peu trop vite du LSD, utilisé en micro-doses dans des protocoles thérapeutiques d'un nouveau genre à travers le monde. Quoi qu'il en soit, les effets synesthésiques décrits dans le livre sont authentiques.

Annotation :

Les frères Karamazov m'a pris six mois de lecture de l'année 2021, mais je ne regrette rien, il me fallait au moins un délai pareil pour digérer ce livre, que j'ai parfois posé dix jours en y revenant, et dans lequel j'ai relu trois, quatre fois certaines phrases. C'est le plus dur de tous les pavés de Dostoievski, celui qui à mes yeux condense tout ce qu'il a écrit jusqu'alors, et qu'il soit mort avant d'avoir pu mener à bien ce projet (le livre est achevé, mais il voulait écrire la suite) ne le rend que plus sublime.
Certains personnages sont des quasi copies du cheptel dostoievskien, que ce soit les personnages féminins, entre les hystériques et les riches excentriques, ou les hommes, Aliocha est comme le prince Mychkine dans l'Idiot, Ivan est un alias de Stavroguine, Dmitri a un côté moujik, on reste donc en terrain connu, avec des passages assez difficiles à appréhender, comme celui du grand Inquisiteur. Qu'on aime ou pas, ça reste un chef d'oeuvre de la littérature mondiale.

Annotation :

Petit livre écrit par Toussaint qui fait partie du genre d'essais d'écrivains expliquant aux autres comment ils écrivent. Certains sont dans la réticence (un peu comme celui de Jérôme Ferrari), et dans d'autres, comme celui-ci, il y a des éléments plus concrets, on sent que la personne qui l'a écrit est très contente de s'ouvrir au lecteur sur "comment il fait". Le livre n'a rien de particulièrement original ou intéressant, je le réserverais d'ailleurs plus aux lecteurs de Toussaint, mais il a des jolies anecdotes, plus quelques considérations à propos des auteurs qu'il a lus et qui l'ont marqué. Rafraîchissant et sans grande ambition, en somme (mais on ne lui en demande pas autant).