Je ne vais pas me lancer dans une critique exhaustive de ces classiques de la poésie japonaise qui posent les bases pérennes du haïku traditionnel. Il y a tant à dire que d'autres l'ont déjà fait et le feront encore mieux que moi. Matsuo Bashō est considéré comme 


l'un des précurseurs et des grands maîtres du genre,



et le génie de cette édition réside en quelques points : le plaisir de la découverte via une traduction humble et inspirée, la richesse de la présentation qui met en parallèle texte original et conversion phonétique autour de la version française, et l'agencement intelligent des œuvres qui ainsi raconte quelques histoires.


Traduction humble écrivais-je, et inspirée : Joan Titus-Carmel pose les mots à l'orientale. Où la nature omniprésente pose sa marque et son tempérament, le traducteur a l'astuce de nous emmener sous les cerisiers, le voyage est tangible. 


Ici le Japon se découvre au francophone,



aussi resplendissant que dans les ultimes films d'Akira Kurozawa, aussi austère aussi, par moments, que dans ses plus anciens. Il nous semble entendre même le froissement des kimonos à l'heure du thé, sous un soleil de printemps.
Les mots du senseï résonnent. Sublimes.
Jusque dans l'invitation à s'immerger dans le texte original, une ligne verticale par page, transcrite à l'occidentale, où l'on découvre quelques mots, où l'on se surprend à reconnaître là cet idéogramme qui revient en écho de ces mots qui se répètent de haïku en haïku : la lune, le soleil, quelques volatiles et des arbres, les quatre saisons qui s'égrainent.



Invitation au dépaysement, à la curiosité,



la lecture se fait à l'affût.
L'agencement enfin, autour des quatre saisons qui racontent alors une année qui passe. Printemps, été, automne, hiver. Une vie qui fuit. La nature qui fait son œuvre d'incessant renouvellement tandis que l'homme dépérit, témoin silencieux à la présence discrète, retenue. Un regard, le sursaut lointain du vent qui s'ébroue jusqu'à nos oreilles, quelques silhouettes. Matsuo Bashō invite à l'humilité, au retrait, à la



contemplation.



Amis poètes, le haïku est un exercice périlleux, sentez-vous libres. 
Découvrez Matsuo Bashō avec envie, prenez-y plaisir du voyage en un long temps figé. Les instants s'y dilatent un moment, les saisons et l'existence s'y contractent autant. Découvrez Bashō senseï, puis laissez-le de côté : nous ne vivrons plus jamais


les heures de quiétude de ce Japon médiéval



qui l'inspiraient, si propices à l'isolement, si propices à la méditation.


Saisissez la chance
de poser vos propres mots
sur votre nature.

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