Au lendemain de la publication de "Rien ne s'oppose à la nuit", Delphine de Vigan a dû affronter les diverses réactions de ses lecteurs et surtout de sa famille. Certains ont applaudi tandis que d'autres ont crié à la trahison.
Mais ce livre n'est pas une confession sur l' "après". Ou plutôt, pas seulement. Car l'auteur, au cours d'une soirée va croiser le chemin de L., une femme de son âge qui lui ressemble beaucoup. L. va rapidement envahir l'existence rangée de Delphine. Tout en refusant de (ou en veillant à ne jamais) rencontrer les proches de l'auteur (ses enfant, ses amies, François Busnel...), L. s’immisce chaque jour davantage dans sa vie. Avec un leitmotiv, presque une exhortation : ne plus écrire de fiction, poursuivre avec ce "vrai" qui confère à l'oeuvre littéraire (ou cinématographique) sa profondeur, sa dimension. Et conditionne l'intérêt du public.
Mais Delphine de Vigan ne partage pas cet avis. Elle aimerait au contraire revenir au roman, inventer des situations, camper des personnages sortis tout droit de son imagination. Mais L. n'en démord pas. Delphine ne ferait que régresser après un livre prometteur. Elle doit aller de l'avant, poursuivre dans cette voie. Elle est un écrivain de talent qui ne doit plus s'abaisser à écrire des contes. Si elle insiste tant, c'est pour le bien de Delphine. Et comme elle sûre de son fait et que Delphine s'entête, L. va devoir insister lourdement... L., une amie qui vous veut du bien !
L'écrivain nous compte les mois de sa vie durant lesquels elle fut sous l'emprise de cette femme intrusive. L'influence que celle-ci eut sur elle. La dépression qui l'a empêcher d'écrire une ligne, ne fut-ce une liste de course. Un roman dans lequel se mêlent étroitement l'autobiographie et la fiction. Car Delphine en est persuadée : n'importe quel lecteur peut être la dupe d'une fausse autobiographie. Impossible selon elle de déceler le faux du vrai, de reconnaître à coup sûr l'accent de vérité qui séduit tant le public avide d' "histoires qui ont réellement eut lieu", de distinguer le vrai de la fiction. Il est ainsi probable que ce roman - qui se veut sincère - soit en réalité une sorte de laboratoire visant à prouver cette conviction. Delphine de Vigan est l'expérimentatrice et nous sommes ses cobayes.
Un livre fort bien écrit. Un livre difficile à poser pour une intrigue très prenante. Presque angoissante. Une réussite - un coup de coeur de cette rentrée 2015 !