Île
7.4
Île

livre de Aldous Huxley ()

Les utopies sont les moteurs de nos sociétés !

Bonjour à tous,


Cette fois-ci, je m' attaque à un livre trop peu connu d' Aldous Huxley ( l' auteur du meilleur des mondes ). C' est une excellente surprise que voilà.


Bienvenue à Pala, une île où l'Orient et l'Occident s'embrassent, où tout est pour le mieux dans le plus juste, le plus sage, le plus pacifique environnement qui soit. Utopie ? Soit. Mais pour Will Farnaby, journaliste et heureux naufragé, le rêve est bien réel. Communion des hommes et de la nature, paradis artificiels, méditation, sagesse, liberté, respect des ressources et des individus... On la disait imaginaire : Pala s'ouvre à lui, bien réelle.Hélas, la perfection n'est pas appelée à durer. Cette enclave idéale ne tarde pas à attirer les plus funestes convoitises. Le sultanat voisin menace bientôt sa douce quiétude. À croire que ce que l'homme a fait de plus beau, l'homme peut le défaire. Le meilleur des mondes, décidément, n'est pas pour demain.....


Qu'il est bon de lire une utopie sortant de l'imaginaire d'un homme aussi intelligent qu' Aldous!
Après le meilleur des mondes qui était plutôt une dystopie, Aldous nous fait découvrir tous les secteurs d'une société qu'il voit comme idéale.
Une vision qui donne une perspective à notre société occidentale à la dérive!
A lire absolument !


Mais, argumentons, un peu.


De quoi parle ce livre ? Will Farnaby, journaliste et agent secret d'un groupe pétrolier, fait naufrage sur les côtes de l'île interdite. Blessé, il y est accueilli et prend contact avec la mère du Rajah encore mineur, en vue de l'octroi d'une concession pétrolière. Il étudie la civilisation et la philosophie de l'île soigneusement fermée au progrès de l'Occident et où un mélange de sagesse bouddhique, de rationalisme, de physiologie et de chimie permet de réaliser une société humaine idéale où les privilégiés accèdent au dernier sommet de la félicité par l'absorption d'une drogue à base de champignons. Ce "yoga de l'amour" provoque une extase suprême. Will conquis refuse de continuer les négociations et après une nuit d'extase, il assiste à l'invasion de l'île par les troupes de l'île voisine conduite par le Rajah à la solde des pétroliers et qui anéantissent l'existence idéale en imposant le progrès moderne.....


L'auteur d'une des plus célèbres dystopies (Le Meilleur des Mondes, 1932) est aussi celui d'une utopie, trente ans plus tard, qui a connu beaucoup moins de succès : Île.


Le contexte a en effet changé. Huxley (1894-1963) s'est davantage intéressé à la fin de son existence aux questions spirituelles, voire mystiques et parapsychologiques, teintées de philosophie et de pratiques orientales (méditation, yoga), avec des expériences personnelles de drogues hallucinogènes. En revanche, sa préoccupation originelle reste intacte : comment une société peut-elle échapper à toute forme de dictature, d'autant plus redoutable qu'elle est acceptée par les êtres humains qui la font vivre ? Parmi d'autres de ses ouvrages, Île s'inscrit donc dans cette réflexion, pendant les derniers mois de sa vie.


La société utopique de l'Île reprend un des thèmes majeurs de la réflexion de Huxley : la réconciliation entre les sciences et l'humanisme, notamment en replaçant les sciences et techniques au service de l'homme. L'auteur est en effet convaincu qu'une forme de totalitarisme a pu se développer insidieusement dans nos sociétés modernes car sciences et technologies constituent des forces autonomes, auxquelles les être humains sont soumis.


La forme du livre est traditionnelle, celle du récit de voyage, où le lecteur suit la progression d'un journaliste également agent pour un magnat du pétrole, naufragé sur un île fictive (Pala), où une société utopique et autonome s'épanouit depuis 120 ans. Celle-ci est issue de la rencontre de traditions occidentales (les libertés individuelles, les sciences, les drogues) et orientales (le bouddhisme, la médiation, l'hindouisme). L'île est cependant convoitée par une nation voisine soumise à un système capitaliste. La guerre se profile : la société utopique a-t-elle les moyens pour se défendre ? Huxley renoue ainsi avec une longue tradition initiée par Platon de l'enclave utopique assiégée.


L'éducation imaginée par Huxley est donc radicalement alternative. Programmes, salles de classes, enseignants professionnels cèdent le pas à la recherche de l'harmonie entre corps et esprit. La compréhension des liens entre tous les éléments vivants prend la place de la tradition de la spécialisation académique, condamnée surtout quand elle est trop précoce dans l'éducation de l'enfant. Dans ce qui est enseigné et dans les méthodes pédagogiques, de nouvelles préoccupations typiques des années soixante apparaissent, le respect de l'environnement, le souci de commencer par une découverte pratique de son environnement pour progresser vers les sciences explicatives et abstraites, la place majeure du jeu (dont la roulette pour comprendre les probabilités), une approche des sciences et technologies non destinées à accroître les capacités de production ou la puissance d'un pays mais à améliorer la vie des êtres humains, une éducation également émotionnelle, sentimentale et psychologique. Les enfants ont également la possibilité de s'appuyer sur des adultes qui ne sont pas leurs parents biologiques.


Le genre utopique permet aux auteurs de fictions de faire passer toutes sortes de revendications de contestations, d’avouer leurs inquiétudes sur l’avenir, de lancer au final ces fameuses utopies qui selon Bachelard sont à la vie ce que l’hypothèse est à la science. De nature éminemment pamphlétaire l’utopie expérimente ses recettes pour qu’aboutisse le monde du bonheur pour tous, une sorte de mythologie de substitution, un éternel retour ayant renoncé à retrouver ses Edens sacrés pour se satisfaire d’un paradis sans doute profane mais fait par l’homme pour l’homme.


un naîf débarque sur une île et rencontre une autre culture. Dans celle-ci une place centrale est faite à la spiritualité et à la liberté. il décrit une éducation, une économie, une médecine (abordant le sujet des soins palliatifs prônant ce qu'il a lui même décidé pour sa propre fin de vie : départ en extase chimiquement provoquée) des rapports de couple, de famille, de partage du pouvoir dans l'espace social...bref la société idéale version Aldoux Huxley.


Cependant c'est un roman et il met en rapport des personnages "non sages" sous la dépendance de leur blessures intérieures, de leurs souffrances avec des membres de cette société idéale.Des enjeux économiques liés à des ressources pétrolières, de pouvoir et diplomatique en résultants, l'auteur va faire tout le moteur extérieur de l'intrigue.Le moteur intérieur étant la confrontation du naïf et de ses complexes psychiques avec l'ouverture, la conscience et la sagesse des habitants de cette île, au gouvernement et à la culture "parfaite".
Excellent ouvrage avec une grande finesse psychologique des personnages (qu'on se réfère aux nouvelles du "sourire de la joconde" du même auteur) et le pendant au "meilleur des mondes": "île" est le meilleur des mondes d' Aldous huxley.


Avec Huxley, cette utopie prend une allure de testament que confirme la proximité de sa disparition. Les excès d’une éducation rigide, les rigueurs du puritanisme l’injustice de la prédestination, les fables de faux prophètes avec un coup de griffe discret à l’adresse du théosophisme, la surpopulation comme problème majeur des décennies futures, la surproduction et l’épuisement des ressources dans une course non maitrisée au profit, autant de thèmes qui résument sa pensée inquiète. Cette fois s’il opte pour l’utopie et non pour la dystopie comme il le fit avec « le meilleur des mondes » pour exprimer ses craintes, cela ne change rien à l’affaire car utopie et contre-utopie ne différent véritablement que par leur but, l’une voulant le bonheur pour tous, l’autre souhaitant asservir la masse au seul bonheur de quelques-uns. En revanche la dystopie n’a besoin de démontrer ni sa réalité ni sa capacité à durer car elle se confond le plus souvent la réalité elle-même dont elle assimile toutes les tares. L’utopie au contraire n’a jamais réussi à faire la preuve de sa pertinence, et pour cause. L’égalité absolue est sans doute un souhait plein de bons sentiments, mais c’est un état totalement incompatible avec la nature humaine qui vit et survit selon les lois de la concurrence et des motivations fondées sur l’envie et la convoitise. Il en va de même avec le bonheur qui est un sentiment naturellement exposé à une usure à laquelle il peut résister seulement en étant précaire et instable. Face à cette impasse les auteurs d’utopies éludent généralement la question, et lorsque les signes d’intolérance au bonheur et à l’égalité apparaissent mettant en cause la réalité utopique, ils règlent les tensions avec un Soma quelconque, c’est-à-dire par la magie castratrice d’une intervention chimique.


Un ultime ouvrage - et pas le plus facIle - d'un auteur qui, il y a bien longtemps, m'a fortement ébranlé dans mes certitudes d'adolescent.


lisez " Ile " qui est un excellent livre. Portez vous bien. Tcho. La lecture est le fondement de l' âme humaine, qu' on se le dise.... @ +.

ClementLeroy
9
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Créée

le 27 mars 2015

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San  Bardamu

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