Déclaration d’amour à un père admiré, Quand Dieu boxait en amateur, deuxième roman de Guy Boley, mêle habilement boxe et théâtre.


Guy Boley avait surpris une partie du monde littéraire avec son premier roman, Fils du feu, publié chez Grasset en 2016, lauréat de nombreux prix littéraires. Son deuxième roman parle aussi de la forge dans laquelle évolue le père du narrateur : né et mort au même endroit, ce père a été admiré, si ce n’est vénéré, par son fils. D’un côté, René Boley, un garçon élevé par sa mère qui aime lui rappeler la mort tragique de son géniteur : « Paf ! Écrasé entre deux wagons, comme une crêpe, le pauvre ! ». De l’autre, un jeune homme touché par la grâce et qui deviendra abbé, l’abbé Delvault. Pourtant, une amitié noue les deux garçons.


Adultes, alors que l’un est forgeron mais se passionne pour le théâtre où il joue des petits rôles et chante dans des opérettes, son ami l’abbé doit trouver une idée de spectacle pour attirer les foules paroissiennes. « Ce fut le vrai déclic, celui que seule le Grâce – c’est-à-dire le Seigneur, en ces lieux consacrés – parvient à provoquer. Il la tenait, sa nouvelle idée théâtrale, celle qui allait parvenir à hisser les masses à hauteur du sublime. Il en avait plus qu’assez de tous ces soi-disant spectacles qui, s’ils maintenaient le peuple dans un certain apaisement, ne l’élevaient pas, mais le rapetissaient, le confortaient dans sa paresse d’esprit et dans sa léthargie tant intellectuelle que spirituelle que lui-même, hélas, par manque de choix, avait été contraint, toutes ces années, de cautionner ». Ca sera la représentation de La Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ, avec son ami René, boxeur amateur, dans le rôle-titre.


Teinté d’humour, ce récit aux longues phrases est une magnifique déclaration d’amour d’un fils à son père : à la fois portrait d’une génération et d’une France périphérique, Quand Dieu boxait en amateur n’oublie pas de tresser un éloge du divertissement au sens pascalien et de la langue française, tels ces mots que René découvre dans le dictionnaire et recopie dans un petit carnet. Enfin, bien sûr, le nerf de guerre du roman est peut-être l’attention portée à la boxe, sport qui réunit René et son père autour d’une autre figure mythique, celle de Mohamed Ali.


« Car lire est dangereux, ça instille dans les cœurs des mondes inaccessibles qui ne portent au fond d’eux qu’envies et frustrations ; ça rend très malheureux, quand on est gens de peu, de savoir qu’il existe, dans un ailleurs fictif, des vies sans rides, ni balafres, où les rires, l’argent, la paix, l’amour poussent aussi joliment que du gazon anglais. »

JulienCoquet
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le 15 juin 2021

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