Le personnage houellebecquien, toujours au centre d'intrigues ordinaires, dans un univers romanesque en phase avec son époque devant lequel le héros demeurera inévitablement dépassé.
Sérotonine - surtout dans ses dernières pages - sonne le glas de ces hommes, blancs, mâles, hétérosexuels, solitaires malgré eux, dont le manque d'affection parentale fait d'eux des êtres transparents en société.


Si l'on se détache des polémiques absurdes qui ont fait passé dans les médias Michel Houellebecq d'un écrivain de génie destiné à la postérité à un pauvre con de droite, c'est parce que l'on a tendance à confondre auteur et personnage. Mon humble avis étant que ledit auteur n'en a strictement rien à foutre. On ne peut que lui donner raison : être en tête des ventes sans s'impliquer personnellement dans la promotion -hormis deux colonnes dans un journal américain- autorise à mettre des petits taquets çà et là dans son livre. Et c'est peut-être là que Sérotonine se perd.


Partant d'un quarantenaire aisé commençant une cure sous anti-dépresseur, Houellebecq pouvait une fois de plus réécrire "l'histoire d'un mec..." Bien lui en a pris, Michel a décidé de ne pas (trop) se complaire dans ce schéma narratif, et ce malgré le sempiternel "pauvre type de droite qui ne bande plus". Tout partait sur cette remarquable critique de notre société de consommation néo-libérale et occidentale que nous, fidèles lecteurs, cherchons dans chaque Houellebecq et que nous peinons à retrouver chez d'autres contemporains.


En 347 pages, il en est question certes, mais les occurrences aux années 2017-2019 ainsi que les provocations répondant à un public moralisateur qui n'attend que d'être scandalisé pour l'ouvrir parsèment le roman de tâches de moisissures qui en font un roman à obsolescence programmé.


Et puis Michel à 62 ans. de son époque, voilà 25 ans qu'il en parle. Il a raconté la société d'une génération. Houellebecq est certainement le seul écrivain français de sa génération à atteindre la postérité, ayant réalisé l'exploit d'avoir été lu sur les quais de métro comme sur le bureaux d'universitaire. Mais l'auteur ne commence-t-il pas à vivre le même dépassement que le héros de Sérotonine ?

VictorGodin
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le 24 janv. 2019

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Dandy Travesti

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