Quand l'ancien Architecte du Diable se transforme en un passionnant autobiographe !!!

Albert Speer, c'est le gars sympa du Troisième Reich, un type apolitique, naïf qui ne se rendait pas compte qu'il avait vendu son âme au Diable, qui ne savait pas toute l'étendue de l'horreur de la Shoah, qui a fait employer des travailleurs forcés pendant qu'il était Ministre de l'Armement mais un peu malgré lui (en fait c'est Sauckel qui a tout fait !!!), qu'il a même envisagé sérieusement d'assassiner son maître vers la fin de la guerre, qui s'est montré sincère et rempli de remords lors du Procès de Nuremberg au bout duquel il a été condamné à vingt ans de prison... Enfin c'est ce qu'il a voulu nous faire croire...

En fait, il n'est pas interdit de penser que c'était un type intelligent qui a vendu son âme au Diable en pleine connaissance de cause, qui a profité de l'image naturellement sympathique qu'il donnait pour mettre un peu du sang qu'il avait sur les mains au niveau des travailleurs forcés sur celles de Sauckel, et qui n'a pas eu la bêtise de nier ce qui était facilement prouvable. Quant à la méconnaissance de l'horreur de la Shoah, il essaye tellement d'argumenter autour de cela que non seulement on a l'impression qu'il essaye de nous mentir mais qu'il essaye aussi du fond de sa cellule à Spandau de se mentir à soi-même. Quant à l'attentat envisagé contre Hitler, fumisterie... Son brillant sens de l'organisation dans la fabrication de l'armement a retardé la fin du Second conflit mondial de quelques mois. On ajoutera la signature d'ordres d'expulsion de juifs. Pour les remords, il n'est pas interdit de penser qu'ils sont en partie sincères, et il a contribué à éviter la politique de "terre brûlée" que le dictateur voulait faire appliquer quand il a vraiment pris conscience que tout était vraiment perdu.

Bref Albert Speer, c'était un être beaucoup plus complexe qu'il voulait le paraître. Loin d'être un monstre de cruauté et de froideur comme Reinhard Heydrich ou encore Heinrich Himmler, on est quand même pas proche du gars sympa...

Mais une chose qu'est sûre, c'est que "Au cœur du troisième Reich" est la preuve qu'un salaud peut être un écrivain passionnant.

Le Troisième Reich comme si vous étiez ou comment l'écrivain ancien architecte n°1 et ensuite Ministre de l'Armement et de l'Industrie d'Hitler réussit à rendre clair la désorganisation la plus totale qui régnait dans la hiérarchie nazie, loin très loin des images de propagande que donnaient les défilés impeccables d'une armée pleinement organisée, en rien arrangée par les petites gueguerres intestines que se livraient les pontes du régime entre-eux pour avoir les faveurs d'Hitler.

Et bien sûr, on ne peut pas passer à côté du portrait de celui-ci, qui à mille lieues d'être le bosseur "génie" militaire était un type médiocre, indolent pour ne pas dire paresseux, incroyablement amateur dans ses décisions, ne devant ses quelques tragiques réussites à son audace et à la lâcheté des autres pays, et qui n'avait pas saisi- heureusement- les possibilités des nouveaux armements (avions à réaction, bombes atomiques,...!!!) alors à un tournant essentiel pendant la guerre, restant à ce niveau encore à l'époque de la Grande Guerre, qui loin d'être un chef ferme se laissait au contraire manipuler facilement par son entourage. Il n'avait que pour lui un charisme et un talent oratoire exceptionnels. On ne passera pas à côté de sa mégalomanie effroyable (les chiffres vraiment insensés que Speer donne des constructions, en particulier ceux d'une immense avenue dans Berlin et d'une coupole destiné à être treize fois plus grande que celle de Saint-Pierre, qu'il avait envisagées avec le tyran de faire ériger après la "victoire" donneraient le tournis au plus blasé des blasés !!!) et de sa totale déconnexion et son refus des réalités au fur et à mesure que l'issue approche.

Bref on comprend que, sans enlever en rien les mérites de ceux qui les ont combattus, les principaux responsables de la chute du nazisme sont les nazis eux-mêmes.

En fait, l'homme qui a provoqué la plus atroce tragédie de tous les temps était un nul mais possédant- malheureusement- un immense pouvoir de fascination. Hitler à l'échelle d'être humain, fascinant mais terrifiant aussi, décrit à travers les relations très étroites, parfois proche de l'amitié mais avec une pointe d'affection certaine, qu'il entretenait avec notre protagoniste.

Une plongée passionnante et même essentielle dans les arcanes du pouvoir de ceux qui sont responsables de l'Horreur avec un grand "H".