Un nazi vaut mieux que deux tu l'auras

Les livres sur la seconde guerre mondiale, spécialité nazisme, écrit par des journalistes de libération, il y en a plein, et ce n'est pas ma tasse de thé. Mais le titre est aguicheur, et c'est ma grand mère qui me l'a tendu, juste avant que mon grand père qui a vu la guerre ne meure. Je me sens un peu obligé de le lire.

La première scènette me fait peur et accumule tous les poncifs du genre. Je n'ai pas la larmichette facile, encore moins sur ce sujet vu et revu, encore moins quand un auteur essaie de me la soutirer avec la douceur du tractopelle. Quand le narrateur pleure parce qu'il retrouve des carnets écrits par des enfants juifs enlevés par les nazis, je me dis que 300 pages, c'est beaucoup trop long.

Heureusement, cette introduction passée, nous passons au coeur du sujet, le développement d'une relation père-fils où le fils est un journaliste de la gauche de 68 et le père, un ancien nazi, ce qui fait de l'un un salaud, et de l'autre, un fils de salaud. L'introduction du personnage du père amène le vrai intérêt du livre, mais qui ne restera qu'un ersatz, la vision d'un des vaincus de la guerre sur le monde des vainqueurs.

Mais le soufflet retombe, et l'incrédulité du fils se transforme en terreur, prenant trop de place sur les interventions du père. En filigrane, on comprend que le regard de l'auteur sur ce père n'est pas double, mais celle du lecteur l'est : on aime ce personnage fantasque, menteur et aux mille vies, vies remplies d'aventures possibles uniquement pendant la guerre. Mais alors que l'auteur veut nous le faire aimer comme on aime un tonton raciste, qui bon gré mal gré, reste la famille, je veux en savoir plus sur ce qui transforme les guerriers en salopards.

En décrivant la vie de l'enfant de salaud, et son regard critique sans éraflures sur la période nazie (la moitié du texte décrit le procès Barbie, comme un cheveu sur la soupe), Sorj Chalandon échoue alors que le contexte et la période étaient parfaits pour amener, pour une fois, une autre idée, une autre vision sur cette époque et ses troubles, sur la vision manichéenne du monde. Le père n'est ni écouté, ni cru, et très souvent pris de haut sur la forme comme le fond. Comme beaucoup trop de gens aujourd'hui ?