Bien moins connu que la Ferme des animaux, et bien entendu, du sacro-saint 1984, Hommage à la Catalogne n’en demeure pas moins un récit passionnant, instructif et intimiste de l’engagement d’Orwell dans la guerre d’Espagne.
Rédigé à son retour en Angleterre, l’ouvrage est à la croisée du journal intime, du reportage de guerre et du roman tragique. Orwell a su scénariser son expérience, en témoigne le choix délibéré de mettre en appendice les chapitres à propos des jeux politiques. C’est sans doute cette expérience qui sera le véritable point de bascule d’Orwell. L’engagement au service de l’utopie, la dévotion et l’idéalisation de la cause confrontés à la froide réalité du terrain, l’attente, l’ennui, la colère face à l’absurdité de la vie et du pouvoir. Très intelligemment, Orwell dresse un portrait intimiste de la guerre en Espagne, tout en prévenant le lecteur :
« Je crois que devant un évènement comme celui-là, personne n’est, ne peut être absolument véridique. Il est difficile d’arriver à une certitude à propos de quelque fait que ce soit, à moins d’en avoir été soit même le témoin oculaire, et, consciemment ou inconsciemment, chacun écrit en partisan. Au cas où je ne vous l’aurais pas déjà dit précédemment au cours de ce livre, je vais vous dire à présent ceci : méfiez-vous de ma partialité, des erreurs sur les faits que j’ai pu commettre, et de la déformation qu’entraîne forcément le fait de n’avoir vu qu’un coin des évènements. »
C’est en cela que la subjectivité et l'humilité d’Orwell rendent son récit crédible. Il va non sans dire qu’à travers cette expérience vécue, Orwell pourra mettre en avant et se rendre compte des mécanismes conduisant l’homme moderne à se diriger, bien malgré lui, vers le totalitarisme.
On pourra surement reprocher certains passages un peu ennuyants, ou trop descriptifs, mais ils participent à ce besoin d’Orwell de décrire ce qu’il vécu, de manière à combler du mieux possible peut-être, une peur de ne pas retranscrire assez fidèlement, l’absurdité d’un conflit et d’une situation qui le dépassèrent.
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le 24 mars 2020
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