L'indignation... et après ?
Un vieux monsieur très digne (93 ans, résistant de la première heure, ambassadeur à l'ONU), qui a connu d'autres messieurs très sages (Maurice Merleau-Ponty, Jean-Paul Sartre), nous rappelle que l'indignation est à la base même de la résistance à l'oppression, et donc la source de la survie démocratique.
La vingtaine de pages qui constitue cet opuscule, si elle est accessible à tous, n'en est pas pour autant passionnante, informative encore moins. Lire que le traitement réservé par l'armée israélienne aux gazaouis est inique, ne nous apprend pas grand-chose, même si, énoncé par un ancien résistant, lui-même déporté par les allemands, ce constat gagne quelque peu en force et en légitimité.
De même, la dénonciation de l'emprise croissante des intérêts économico-financiers sur l'évolution de nos sociétés, qui sent un peu le réchauffé depuis la crise de 2008, tombe légèrement à plat.
Le discours regagne en revanche un peu de consistance lorsqu'il énonce le paradoxe suivant : les régimes de protection sociale remis en question pour cause de difficultés de financement ont été mis en place après-guerre... alors que l'Europe toute entière était ruinée !
Mais pourquoi tant de battage autour de cette œuvre, au contenu, au final, passablement anodin ? Mr Hessel n'est ni l'homme des démonstrations économiques brillantes (le régime de sécurité sociale est économiquement tenable ? Formidable, mais prouvez-le !), ni l'homme d'une vision politique à long terme (Indignez vous ! ... et pour la suite voyez avec Attac ou la FIDH).
Nourri de bonnes intentions, convenablement présenté, et à 3 euros l'exemplaire, il n'y a même pas de quoi crier à la manipulation marketing. Qu'est-ce donc que cet objet ? « Indignez-vous ! » se voudrait-il une forme moderne de l'appel du 18 Juin ? Mmmouais. Je crains qu'en ces temps de grogne sociale, la sortie de ce livret ne sente surtout l'à propos éditorial. La recherche de cadeaux de fin d'année et l'enthousiasme médiatique ont fait le reste je suppose. Mais quelle déception.
Indignez-vous, indignez-vous, il en restera toujours quelque chose ?
Pas si sûr.