Être l'icône du roman national français n'est pas une sinécure : régulièrement jeanne d'Arc doit se défendre des attaques qu'elle suscite, encore, comme des fantasmes qu'elle fait naître, toujours. Jeanne ? Elle-même : car comment ne pas penser que c'est sa voix, cette fois, qui est venue chanter aux oreilles de Colette Beaune pour lui demander de bouter la légende et son florilège de clichés, d'indiquer le chemin et d'en retirer les pierres pour mieux accéder à sa vérité, la seule : la vérité historique de la femme ayant vécu, cru, combattu et souffert.
Par ce travail précis et rigoureux, sans jamais cesser d'être accessible, Colette Beaune rend le plus bel hommage qu'il se puisse à la femme Jeanne, car femme elle fut et mérite que son histoire soit ainsi entendue : l'histoire est écrite par les vainqueurs, même quand ce sont, en réalité, des vainqueures, des vainqueresses, des victorieuses.
Colette Beaune, comme dans toute bonne biographie, en abordant son sujet (pourtant tout sauf assujettie) nous donne à lire l'histoire d'un temps, de ses représentations, de ses croyances, des rapports de sociabilité et des enjeux de pouvoir qui le caractérisaient. La place de la femme dans l'histoire (telle qu'elle eut lieu) ainsi que la question de la femme dans l'histoire (telle qu'on la raconte) trouve ici, sans doute, un ouvrage majeur.