L'An mil
6.9
L'An mil

livre de Georges Duby (1967)

Et les chevaliers-paysans de l'an mil au lac de Paladru ?

J'aime beaucoup tout le travail qui a été fait (et qui continue) au sujet de cette période que, à défaut de mieux, on appelle "Moyen Age" et qui vise à débarrasser ce millénaire de toutes les légendes, tous les amalgames, toutes les superstitions qui y sont accrochés. Duby, LeGoff, leur travail permet de donner du Moyen Age (des Moyens Ages) une image la plus juste possible, loin des imageries populaires qui nous hantaient depuis la Renaissance.
Dans le premier chapitre, qui sert d'introduction au livre, Duby nous informe donc que l'on ne sait que très peu de choses sur l'An Mil précisément, sinon que ce ne fut pas la grande terreur telle qu'on pouvait nous la présenter dans certains livres d'histoire. Cette légende de "la peur de l'an mil" est née à la Renaissance, période qui se présentait comme "avancée" et qui ne perdait aucune occasion pour dénigrer la période précédente, la traitant de sombre, de barbare, etc.
Donc, puisque l'on n'a pas d'informations suffisantes sur cette année sûrement banale de l'an mil, Duby décide de traiter, dans son livre, d'une période un peu plus vaste, allant de 970 à 1030 environ.
Une période dominée par l'importance accrue des monastères et des abbayes. La révolution carolingienne est passée. Ce ne sont plus les évêques qui dirigent la culture du pays, ce sont les moines et les abbés. L'écriture et la littérature deviennent les apanages des monastères.
Duby nous dresse donc le portrait d'un Occident sous la férule catholique. Avec tout ce que cela comporte d'exclusions, de signes annonciateurs de la fin des temps (une fin des temps que l'on annonce depuis la mort du Christ, il y a 970 ans maintenant), d'univers symbolique où les événements sont interprétés à des fins religieuses, de miracles et de reliques sacrées, etc.
Ce monde est aussi dans une période de transition, les Seigneurs locaux acquérant un pouvoir qui va nous emmener vers la féodalité.

C'est donc de cette période dont Duby nous parle.
Enfin, et c'est le côté frustrant de ce livre, L'An Mil est surtout une collection d'extraits de textes de cette époque. Des textes signés par trois ou quatre auteurs seulement. Des textes dûment sélectionnés par Duby. C'est très bien, mais parfois j'aurais préféré des explications de l'historien lui-même. Or, en règle générale, dans ce livre, pour deux pages de textes, il n'y a que trois lignes de Duby. C'est un peu dommage parce que ces textes sont parfois obscurs, parfois peu intéressants aussi, alors que Duby est juste clair et passionnant. C'est, je le répète, frustrant de lire un livre d'un tel bonhomme et d'avoir si peu accès à son texte lui-même.
En gros, j'attendais plus de ce livre, même si Duby nous donne, finalement, par ce choix de textes, une image réussie de cet âge reculé.

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le 4 août 2014

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SanFelice

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