La Douleur
7.7
La Douleur

livre de Marguerite Duras (1985)

La retranscription de ce "journal de guerre" d'une femme amoureuse a ceci de passionnant qu'il relate l'absence de l'être cher de manière fantasmée en se basant sur la plus douloureuse des réalités.
En effet Marguerite Duras avoue elle-même n'avoir aucun souvenir d'avoir tenu ses "carnets" quand elle les retrouve plusieurs années après. Elle n'a donc aucun scrupule à faire mentir les souvenirs et ses propres écrits.
Ceci étant dit, il est important de préciser que cela n'enlève rien à la qualité du texte, à la puissance évocatrice des mots choisis par l'écrivaine pour évoquer l'attente, le doute, la panique, le désespoir, le manque...

Je vais maintenant m'attarder plus longuement sur l'adaptation qu'en ont crée Dominique Blanc et Patrice Chereau pour la scène.
J'ai eu la chance de pouvoir admirer cette composition d'actrice sidérante de charisme et de naturel. Un talent qui m'a fait vivre une soirée théâtrale d'une grande intensité. Sa voix, son expressivité étonnante, sa présence magnétique associées au texte de Duras se sont suffit à elles-mêmes. La scène est en effet assez dépouillée : Une table, quelques chaises alignées dans le coin sont les seuls éléments d'un décor aussi sobre que les mots et l'histoire racontés sont riches.
J'oubliais (volontairement) l'accessoire principal de cette mise en scène : le téléphone !
Un téléphone symbole de plein de choses : frustration, espoir, compagnon d'attente, ennemi trop présent, ami maladroit et encombrant. Il suscite un sentiment ambivalent d'amour/haine, d'attraction/répulsion. Il est à la fois objet de douleur et nécessaire lien vers l'extérieur, les importuns comme les autres.

Dominique et Patrice ont eu l'idée de ce spectacle ensemble. Une volonté commune de retravailler ensemble tout en restant libres. L'aventure aurait commencé par des lectures puis l'envie à amené la création du spectacle qui s'est promené pendant plusieurs années à travers différentes salles du pays. Le texte de Duras a accompagné la comédienne tout ce temps alors qu'elle était seule sur scène.
Seule dans la salle également car en regagnant mon siège, je la vois assise là devant moi, de dos en attendant que les lumières s'allument. Le rideau est levé mais elle est immobile fixant le fond de la scène.
Le silence s'est déjà fait dans la salle comme par une sorte de respect pour sa concentration j'imagine.

Tout les spectateurs s'installent, la lumière s'allume sur la scène et laisse entendre sa voix ! Une voix qui nous transporte dans ce Paris occupé de la guerre.
Place aux talents : Chut ! Ecoutez !
Rawi
8
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le 22 mars 2014

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Rawi

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