La Mort immortelle par Gabriel Cadoux

L'ambition est tellement élevée que le contenu déçoit. L'écriture de Liu Cixin me semble être devenue plus sèche et plus directe que dans le premier livre. Je ne retrouve plus les envolées lyriques (hors des contes de Yun Tianming) de certains passages du 1er ou les remarques beauf mais pleines de vie du commissaire Shi ou l'attachement ressenti en suivant le combat sourd que mène Luo Ji lors du 2eme épisode. Ce personnage de Cheng Xin est bien trop plat, il est même bidimensionnel, si vous voyez ce que je veux dire.

Première dimension, c'est simple Cheng Xin sert de support au voyage dans le temps de la civilisation humaine. Elle ne sert que de passeuse de cette histoire et cela la rend transparente la plupart du temps. Et niveau caractère dimension unique d'amour envers son prochain, bien trop banal pour porter un personnage entier. Surtout certains passages sont carrément misogynes, indiquant clairement qu'une femme n'est pas faite pour diriger avec force et clairvoyance, non. Elle doit se cantonner au rôle de mère aimante de toute l'humanité.

Le début du livre est un énième retour à la civilisation de l'ère Commune et un énième programme spatial onusien qui laisse présager un manque d'idées. Il n'en est rien et heureusement ce programme décolle rapidement pour nous ramener là où nous avions laissé l'aventure à la fin du 2eme tome.

J'ai tout de même eu un coup de cœur littéraire au milieu du livre, telle une pépite coincée entre 2 plaques de métal froid; les contes de Yun Tianming. Ces contes sont une bouffée d'air dans le livre et apportent toute une série de questions qui m'a fait essayer de deviner les métaphores cachées dans les histoires enfantines. Et il faut le dire ce sont de bonnes histoires en soi, assez loufoques pour être un chapitre de Don Quichotte.

Mais voilà la vie dans le vide interstellaire reprend ses droits et son froid glacial revient à grands coups d'hibernations décousues du personnage principal. Cela devient tellement flagrant que Cheng Xin hiberne juste pour pouvoir raconter l'histoire que finalement ça ne colle plus. Le personnage est tellement disjoint dans le temps qu'il n'a plus d'âme. A chaque fois les raisons invoquées pour les hibernations semblent sortir de nulle part et sont "forcées".

Quand à la fin, que dire si ce n'est qu'elle est ratée et que même l'auteur voulait en finir. Les protagonistes arrivent sur une nouvelle planète qui est censé être là première planète habitable que l'humanité découvre et qui abrite la vie, mais on a droit à une description de 2 lignes et de quelques espèces ressemblant vaguement à celles terrestres. Avatar en moins bien.

La fin en soi revient à un nouvel Eden, avec l'impression de lire un roman de Weber. Heureusement que les retrouvailles n'ont pas eu lieu avec Yun Tianming, il y aura eu au moins une dernière chicane croustillante du scénario à se mettre sous la dent.

En bref, j'ai beaucoup aimé l'ambition énorme de cette trilogie, mais l'écriture s'est essoufflée et j'en viens à souhaiter qu'un auteur reprenne cette trame de fonds pour en faire un roman où l'on suit des dynasties et des aventures avec des personnages plus réalistes et plus profonds.

La trilogie restera un très grand moment de lecture mais ce dernier tome ne vaut pas plus que 4/10.