La Paix du ménage, dont l’intrigue se déroule en 1809, est une œuvre du Balzac mondain, en qui il y a quelque chose de XVIIe – le siècle, pas l’arrondissement – : « Jamais, au dire des contemporains, Paris ne vit de plus belles fêtes que celles qui précédèrent et suivirent le mariage de ce souverain avec une archiduchesse d’Autriche » (p. 95). Autrement dit, la nouvelle a beau n’occuper qu’une quarantaine de pages, noms et titulatures sont à retenir si on ne veut pas être perdu.
Ça ne tombe peut-être pas plus mal, car le personnage principal pourrait être un objet : une bague, alors objet mixte, sur la portée symbolique duquel je ne m’étendrai pas ici. J’éviterai aussi de résumer, s’agissant d’une nouvelle à chute. Que dire de plus ? Pas grand-chose, je le crains.
L’éditrice du texte en « Pléiade » souligne qu’il est « la seule œuvre [de la Comédie humaine] dont l’intrigue se déroule en une heure environ et dont les personnages, à peu près inexpliqués, sont sans passé, sans avenir, sauf par quelques indications ajoutées tardivement » (p. 87) et je me demande si de là ne vient pas le peu d’intérêt que la Paix du ménage a suscité chez moi.
Car pour le reste, on trouve les principaux leitmotivs de Balzac : le langage des yeux (« Il est de ces regards de femme à femme qui sont comme des flambeaux amenés dans les dénouements de tragédie », p. 114), le physique reflet du caractère (« ces créatures qui tiennent toutes les promesses que fait leur beauté », p. 105) quitte à en passer par des formules ambiguës (« son nez pointu annonçait l’épigramme », p. 115), et même ce goût pour les fins brutales : « Le général Montcornet n’épousa point madame de Vaudremont, malgré la bonne intelligence dans laquelle tous deux vécurent pendant quelques instants, car elle fut une des victimes de l’épouvantable incendie qui rendit à jamais célèbre le bal donné par l’ambassadeur d’Autriche, à l’occasion du mariage de l’empereur Napoléon avec la fille de l’empereur François II » (excipit, p. 129-30).
Mais malgré cela, Balzac m’a paru échouer à donner sa patine à l’argument de la Paix du ménage, qu’il a emprunté aux nouvellistes de la Renaissance. Quitte à lire une histoire de bal, autant jeter un œil au Bal de Sceaux, deuxième récit de la Comédie humaine, et tout de même plus riche – et plus balzacien ? – que celui-là.

Alcofribas
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le 2 mars 2020

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