Essai-fiction tragi-comique, Le langage de l’amour explore, de Shakespeare à Annie Ernaux, les complexités de la communication amoureuse. L’approche psycholinguistique et stylistique limite le langage amoureux à quatre phases : l’amour-fantasme, l’amour-fusion, l’amour-possession, l’amour-figé. Ces moments sont tours à tours analysés, non seulement à travers le prisme des plus célèbres mots d’amour de la littérature mondiale, mais aussi à travers l’art : l’autrice ne se prive pas de faire référence au cinéma, à la chanson, à la musique, ou même à la peinture pour justifier ses propos. A l’essai proprement dit se superpose aussi le récit de Juliette et de Roméo. L’une est pharmacienne, l’autre journaliste. Tous deux se rencontrent à Amiens : Roméo entre dans la pharmacie de Juliette et lui propose de réaliser un test antigénique filmé pour un reportage. Pour exemplifier ses micro-analyses et mettre au jour les topoï littéraires à l’oeuvre dans les romans d’amour, l’essayiste choisit d’alterner entre essai et fiction, jonglant entre une écriture créative et une rédaction plus académique. L’effort d’adaptation fourni pour cet ouvrage mêle héritage littéraire et vulgarisation contemporaine, la démocratisation des formes hybrides permettant ainsi d’élargir le lectorat cible. Cette nouvelle stratégie de diffusion n’accorde pas seulement plus de vertus pédagogiques aux essais, elle leur garantit également plus de chances de succès.


Des premières déclarations aux plus violentes disputes, cette étude propose un panorama des états d’amour, tout en prenant soin de spécifier le sens et les enjeux des mots en contexte amoureux. Somme toute, une étude bien étayée, lisible, crédible. Crédible ? Toute l’originalité de cet essai réside dans l’instrumentalisation de la fiction contemporaine pour étayer une étude stylistique et linguistique : est-ce alors une énième fiction sur l’amour, un énième essai sur le discours amoureux ? Toute la saveur de cette publication réside en tout cas dans son hybridité controversée. Les deux genres, rendus interdépendants, sont magnifiés par la tendance auctoriale pop. Si la rencontre entre les deux protagonistes a tout d’une mauvaise romance, on se laisse cependant vite séduire par les stéréotypes démythifiés et par la fusion de ces deux prénoms shakespeariens. Le lieu commun est emporté par une forme originale, dans la lignée de Roland Barthes et de Mona Chollet. L’essai incarné et le style vif de Julie Neveux donnent finalement naissance à une histoire d’amour unique, portant les stigmates d’une récente pandémie mondiale. Une recherche décomplexée qui informe sans lasser pour satisfaire littéraires amoureux et amoureux de littérature.







MademoiselleRose
7

Créée

le 17 janv. 2023

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MademoiselleRose
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