Adélaïde Henry, une jeune femme noire, souhaite un nouveau départ dans le Montana, où elle espère s'établir après avoir quitté une Californie marquée par une tragédie. Elle parcourt cette aventure avec une mystérieuse malle, qu'elle tient particulièrement à garder très très très fermée. Mais qu'est-ce qu'il y a dans cette malle ? Et LaValle parviendra à décupler notre curiosité, jusqu'à la révélation...
Mais, le roman ne se concentrera pas uniquement sur cette malle, qui sera vite oubliée (sauf son contenu, oui moi aussi je veux ménager l'effet).
Les Esseulées, c'est aussi un peu d'Histoire américaine que je ne connaissais pas : en 1915, le contexte historique des États-Unis est marqué par des inégalités raciales, mais aussi par des opportunités dans des territoires en pleine expansion comme l'Ouest. Ce qui donnera lieu à des lois comme le Homestead Act de 1862, qui permettaient à toute personne, quel que soit son sexe ou sa couleur de peau, de réclamer jusqu'à 160 acres de terres fédérales moyennant une somme symbolique, à condition d'y vivre et de l'exploiter pendant au moins cinq ans. C'est cette opportunité qui ouvrira la porte au récit de LaValle, donnant lieu à des portraits de femmes, dont on s'attachera dès notre rencontre.
Mais le Montana n'est pas une Terre facile. Cette terre, métaphore d'une promesse aussi fertile que hostile, rappelle que les rêves les plus purs doivent parfois s'enraciner dans un sol cruel. La solitude, les conditions météorologiques et la pauvreté constitueront des éléments de récits captivants, notamment ce passage où Adélaïde, n'ayant pas de cheval, doit traverser des kilomètres sous la neige. C'est aussi ainsi que de fortes sororités verront le jour.
Donc, on a un western, féministe et un mystère...
Et quoi encore ? Ce qu'il y a de rude et de brutal ne réside pas que dans la Nature. Oui, l'être humain peut être une vraie plaie, surtout dans un contexte où la justice appartient aux riches. Et les procès n'étaient pas quelque chose de courant, d'ailleurs on n'entendra pas parler de juge, ni de shérif.
Heureusement, dans la fiction, on peut réinventer la justice. Et c'est là que LaValle frappe fort : il nous offre une catharsis puissante, sanguinaire, jouissive et horrifique. Quand tout semble perdu, il sait nous rappeler que l'imaginaire permet de rétablir un équilibre là où la réalité échoue souvent. C'est brutal, sanglant, mais tellement satisfaisant. Car la violence a été tant amenée par les mêmes qu'il est bon de savourer la revanche.
Les Esseulées, des femmes courageuses, un western féministe horrifique ? À vous de découvrir.