On peut penser ce qu'on veut sur le philosophe, Sartre est indéniablement un grand auteur. Les Mouches est une (énième) illustration théâtrale de l'existentialisme théorisé par JP. Je lui reprocherai sa longueur, et un propos un peu confus sur le début, qui m'a longtemps laissé dans l'attente d'un l'éclaircissement : je n'en voyais pas la finalité, le fil rouge.
Ceci étant dit, je trouve que son détour par la tragédie grecque est réussi et maitrisé, on retrouve le lyrisme des grandes tragédies sans l'aspect pompier qui moi, m'ennuie. Oreste décide de tuer sa mère et le meurtrier de son père, et devient une figure existentialiste en refusant le repentir : se repentir serait lâche, ce serait refuser la responsabilité de ses actes.
J'ai particulièrement aimé les passages avec les Érinyes, déesses persécutrices chargées d'harceler les personnages qui ont fautés. Sartre modernise brillamment leur rôle, elles deviennent la personnification de la responsabilité assumée d'Oreste face à ses actes.
(et je viens de réaliser qu'elles sont les "serpents qui sifflent sous vos têtes" dans l'Andromaque de Racine)
Je trouve que la philosophie sartrienne est particulièrement agréable sous comme récit fictionnel ; c'est sûrement aussi pour cette raison qu'elle a du mal à gagner ses lauriers aux yeux des philosophes : trop verbeuse, pas assez rigoureuse, à géométrie variable... Elle fait de beaux récits, c'est déjà ça.