Bien sûr que Miroir de nos peines était un succès annoncé. Impensable pour les lecteurs des deux opus précédents de Pierre Lemaitre de faire l'impasse sur le roman censé clore cette trilogie de l'entre-deux guerres. Il s'agit cette fois du temps qui va de la "drôle de guerre" à l'exode, autrement dit à la débâcle qui précède l'armistice et les 4 années d'Occupation allemande qui suivent. Drôle est bien le qualificatif qui convient, dans toutes les acceptions du terme, pour caractériser cette période, de la confiance et de l'arrogance initiales de la France à la grande débandade. Le livre de Lemaitre est drôle aussi de toutes les manières, captant parfaitement l'esprit de l'époque par le biais d'une narration éclatée où les agissements de ses principaux personnages, Louise, Raoul, Fernand et Désiré, entre autres, nous sont racontés en parallèle, reliés à la rapide avance de l'armée allemande. Moins ingénieux et flamboyant que ses prédécesseurs, Miroir de nos peines souffre un peu de cette dispersion du récit, la personnalité de Louise, héroïne des scènes les plus marquantes, dépassant de loin celle de tous les autres protagonistes. Mais le talent de feuilletoniste et de grand fablier de l'auteur n'est plus à prouver, son sens du rythme également, et il parvient toujours à nous inciter à lire encore un chapitre avant d'interrompre à regret la lecture. Il n'y a pas d'énormes surprises pourtant, ni de rebondissements gigantesques, avec un dénouement attendu et finalement optimiste, en dépit des temps très sombres qui s'annoncent, pour l'ensemble des français, s'entend. Pierre Lemaitre a annoncé la fin de sa trilogie et règle d'ailleurs le sort de ses personnages en une brève biographie à la fin du livre. Mais qu'est-ce qui pourrait bien l'empêcher, si l'envie lui en prend, de s'attaquer prochainement à la période 1940-1944, riche de potentialités avec ses collaborateurs, ses résistants, ses victimes et ses simples français essayant simplement de survivre ? Difficile peut-être d'y mettre de la fantaisie, de la légèreté et de la bonhomie mais pas impossible pour le talent de conteur du romancier.

Cinephile-doux
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le 26 janv. 2020

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