Mort à Crédit - Louis Ferdinand Céline

Mort à crédit est un livre autobiographique, dont certains aspects, je l'imagine, ont été grossis voire inventés. Ce roman autobiographique est paru en 1936. C'est le deuxième livre de Louis Ferdinand Céline.
Au début de ma lecture j'ai au beaucoup de mal à me faire au style de l'auteur. À vrai dire, je n'avais jamais lu aucun de ses romans.
À la fac, on avait parlé de l'auteur et de son style très "oral", "parlé". La première impression que j'ai eu. Ce fût celle d'une conversation retranscrite à l'écrit de l'auteur à son lecteur. J'ai eu beaucoup de mal à accrocher. Mais au fil des pages, pour en revenir au style l'auteur, je me suis aperçu, qu'il y avait quand même une structure. Je ne sais pas si on parler de syntaxe. Ferdinand Céline a réussi à rendre "l'oral littéraire". Je m'explique : je trouve qu'il a réussi à rendre un style très verbal transposable à l'écrit et intelligible, malgré l'usage de phrases courtes et l'onomatopées.
Par contre, il faut s'accrocher durant les 15/20 premières pages (de mémoire). Car ce roman ne "s'offre" pas facilement au premier lecteur venu. Nous ne sommes pas directement plongé dans l'œuvre, du moins le "gros" de l'histoire, dès le début du roman. Car nous suivons le narrateur lorsqu'il est adulte. Et ce moment là m'a été franchement difficile à lire. Au point de me dire : "putain mais pourquoi m'a t'on filé ça ?". Car le style déboussole, je sortais de "La Forêt des 29" d'Irène Frain, puis (sans spoiler) le personnage de Ferdinand est pris de fièvre. Et là accrochez vous, car l'auteur nous retranscrit parfaitement le délire psychédélique dans lequel il est plongé. Ceci n'a vraiment aucun sens. On ne sait pas du tout où l'auteur veut nous emmener.
Heureusement, ce n'est qu'un épisode, une sorte de test, qui une fois terminé/passé. Nous donne accès au "vrai" sujet du récit.
Celui de l'enfance de Céline, celle à Courbevoie, "Au Passage" où se situe la boutique de sa mère, puis différents endroits, tels que l'Angleterre, chez son oncle, "Au journal" de Courtial un inventeur excentrique, une ferme puis un retour chez son oncle qui conclut l'oeuvre.
Ce sont, en gros, les différentes parties de l'oeuvre. Évidemment, d'autres éléments viennent s'intercaler entre chacune de ces parties, qui mettront le personnage dans différentes situation, qui lui permettront de faire, là encore différentes expériences.
Si je parle d'expérience. C'est qu'appartenant au genre "autobiographique", Mort à Crédit comprend une part d'apprentissage de la part du personnage, qui va se construire tout au long du roman. Même si un événement en particulier viendra chambouler le personnage de Ferdinand, qui lui fera, en quelque sorte, prendre conscience de sa nature profonde (ceci arrive à la toute fin du livre).
Une nature, qui est souvent exposée par le père de Ferdinand, un employé aux assurances, qui semble avoir percé son fils à jour.
Les conflits entre Ferdinand et ses parents (surtout son père) sont nombreux durant un bon quart du livre. Ferdinand est assez jeune, ingrat et fait souvent des conneries. Ce qui fait sortir le père de Ferdinand de ses gonds. Qui lors de ses envolées lyriques ne manque pas d'assommer son fils par ses monologues parfois assez long.
Mais je ne les ai pas trouvé ennuyeux, car la maîtrise de l'oralité de l'auteur couplé à un argot de l'époque, ne m'ont pas empêché de mourir de rire.
Je trouve que c'est vraiment la force du livre. J'ai été nourri durant ma plus tendre enfance par le dessin animé "South Park", donc dès que ça parle de bite et de chatte, ça me fait rire (je caricature).
L'argot et la vulgarité souvent présents dans le livres m'ont fait souvent rire.
De plus, certaines situations m'ont, elles aussi, beaucoup fait rire.
La seule chose qui m'a un peu "déçu" et le mot est fort par rapport à la réalité. C'est le début, comme je l'ai expliqué plus haut. L'effet Breaking Bad, m'avait un peu refroidi car le livre met un peu de temps à se lancer.
Pour en revenir au caractère autobiographique de l'oeuvre. Je préfère le dire tout de suite, j'aime beaucoup de genre, du moins le genre du roman d'apprentissage, car j'aime beaucoup suivre un ou différents personnages et les voir évoluer au fil de l'oeuvre.
Car ici nous retrouvons différents thèmes tel que la relation de l'enfant avec ses parents, l'envie de découvrir le monde et de se détacher de leur tutelle.
Dans ce livre nous pouvons voir Ferdinand trouver son premier travail, se confronter à cet univers qu'il ne connaît pas. Enfin, un milieu professionnel en tant que salarié, car nous pouvons régulièrement voir le personnage aider sa mère, lorsqu'elle va faire les marchés ou de la vente à domicile.
Nous y découvrons aussi le thème de la rencontre, ainsi que les joies et les déceptions qu'elles peuvent entraîner.
Mais aussi la déceptions des parents à l'égard de leur enfant. Le désir est aussi souvent présent, notamment le désir charnel. La question de l'avenir, la place de l'individu dans la société et vers quel direction direction il tend. Le thème de la mort et de la maladie y sont aussi traités.
Si nous pouvons revenir sur le thème de la société. Il faut comprendre que Ferdinand vient d'un milieu modeste voire pauvre. Ses parents galèrent à joindre les deux bouts, d'une part parce que son père ne semble pas porter sur l'évolution, son développement personnel (je fais ici référence aux passages de la machine à écrire). Tout comme ça mère, qui elle semble avoir du mal à se renouveler, à chercher de nouvelles modes ou suivre celles qui fonctionnent. Car elle préfère continuer de proposer ce qu'elle a toujours fait, en attendant que sa mode à elle reviennent au goût du jour. Cependant, nous pouvons remarquer, qu'elle essaye de diversifier son mode de distribution, en faisant le tour des marchés, brocantes et ventes à domicile. De plus, si nous pouvons parler de "qualité" pour un personnage. La mère de Ferdinand est une femme au mental d'acier et courageuse. Mais son entêtement ne l'aidera pas à trouver cette impulsion, qui lui permettront de s'émanciper de son milieu social.
La mère de Ferdinand est l'antithèse, d'un des mentors de Ferdinand, Courtial, un inventeur, qui le prend comme apprenti par l'intermédiaire de son oncle.
Courtial est un personnage haut en couleur et qui, s'il a réellement existé, marque profondément l'existence de Ferdinand. La mère de Ferdinand était commerçante. Courtial est, lui, ce que l'ont pourrait appeler aujourd'hui un entrepreneur. Farci de connaissances scientifiques et touche à tout. Courtial fera preuve d'inventivité et de créativité afin de générer des revenus grâce à son nom et son cœur de métier. Si on peut faire ici une parenthèse "business", je pense que l'ont peut prendre exemple sur ce personnage, mais pas entièrement, car je laisse au lecteur le soin de découvrir les différents travers de ce personnage, qui lui aussi sera l'une des sources de déceptions et de désillusion que devra affronter Ferdinand.
Pour finir, j'avais parlé du père de Ferdinand, qui avait percé à jour la nature de son fils. Et c'est sur ce point que le livre se boucle, car nous partons de cette notion exprimée dans le premier quart du livre et cette notion revient dans les dernières pages du livre.
Derniers point : pour ce qui s'attendent à autre chose que ça comme fin risquent d'être un peu déçu (Je n'ai pas encore lu Guignol's Band qui, il me semble, arrive juste après.) Car il n'y a pas de "fin" à proprement parler. Le livre se conclu sur une dernière ligne de dialogue.


Points forts :
- Style de l'auteur
- Humour
- Personnages assez denses
- Relations entre les personnages


Points faibles :
- un démarrage poussif
- une fin qui tombe, comme un cheveu dans la soupe

MarcSwindler
9
Écrit par

Créée

le 18 déc. 2019

Critique lue 778 fois

Marc Swindler

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