Tout a commencé par un prix. Un prix décerné à Élias Carnel comme producteur de l’année. Mais tout se termine aussi sur ce prix : sa carrière si prometteuse semble régresser. Élias, travailleur acharné chez Galaxie Studio, s’était vu confier un grand projet : superviser le film du célèbre Martial Caldeira tourné en Afrique. Mais pour une raison qu’il ignore, ce projet, qui était la récompense de son investissement chez Galaxie Studio, lui est retiré. Pire, il comprend que celui qu’il croit être son ami a hérité du projet à sa place, tandis que lui se retrouve cantonné à des films de second ordre, comme mettre en scène la vie de Margot Lazarus, une jeune écrivain qui tente de se suicider après chaque rupture amoureuse.

C’est le début d’une lente remise en question, car Élias n’est pas seulement mis au placard, il vient de se séparer de Clarisse. Durant six ans, il a supporté son alcoolisme, ses frasques et ses violences, ses rechutes et ses exaltations, jusqu’à devenir son protecteur.

Dépossédé du tournage qui lui aurait permis de fuir ses pensées, sa ville et sa vie, et mis au placard, il s’égare. Ses repères, autrefois Clarisse et son travail, disparaissent. Veut-il vraiment faire des films nourris de la vie des autres, jusqu’à les transformer pour faire apparaître une trame narrative, un climax et un happy end projetables sur grand écran ? Son travail est-il de prostituer l’imagination et la réalité vécue par les autres pour les faire entrer dans le moule du cinéma ?

Et son amour pour Clarisse n’est-il pas simplement le besoin de se sentir exister pour un autre ? la satisfaction d’être son garde-fou quand elle s’égare, misérable et défoncée, sur le bord de la Seine ?

On s’habitue aux fins du monde, c’est le récit de quelques mois, pas très remplis, de la vie d’un homme malheureux, dont on sait pertinemment qu’il va quand même trouver le bonheur à la fin du livre, car dans les livres comme dans les films, les créateurs se sentent obligés de terminer sur un happy end. Environ à la moitié du livre, on comprend ce que sera ce happy end, la question n’est pas de savoir comment, mais quand.

Élias navigue entre déprime et questionnement, violence et routine. On comprend bien qu’il ne voit jamais le côté positif de la vie, à envisager le bonheur même quand il est sous ses yeux et qu’il ne sait pas être heureux.

Le héros semble torturé, pour des raisons parfois peu lisibles, ce qui donne l’impression qu’il se noie dans une goutte d’eau ; ou bien on a l’impression d’un roman bâti sur une goutte d’eau.

La suite de la critique sur mon blog :
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le 30 juin 2013

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