Ce 7ème tome a la particularité de se situer 30 ans après. En 30 ans, la société humaine a bien changé. La flotte de la Terre et Mars forment une coalition soudée. L’Union des Transports, mis sur pied à l’initiative de Holden et Avarasala à l’issu du violent conflit contre l’organisation terroriste ceinturienne, est désormais très influente et constitue une force majeure dans le système solaire. Elle gère le trafic entre les différentes colonies, et entend bien faire respecter strictement les règles qu’elle édicte, ce qui n’est pas toujours aux goûts de tous, surtout les nouvelles sociétés extra-solaires qui aspirent à se gérer elle-même.
Le célèbre équipage du Rocinante est toujours actif, malgré les cheveux blancs et les articulations douloureuses. Des décennies après, James Holden, Naomi, Alex, Amos, Bobbie, Clarissa ont maintenu cette famille particulière qui s’est unie et consolidée après les épreuves. Après un énième conflit moral, Holden sentait qu’il était temps pour lui de se retirer des affaires de l’univers et de couler des jours paisibles bien mérités. Mais l’univers n’en avait pas fini avec lui… L’Empire de Laconia, crée par la rébellion d’une partie de la flotte martienne 30 ans plus tôt, et restée jusque là silencieuse, décide de refaire surface. Mais ce sont des vaisseaux à la technologie bien supérieure, issue de la civilisation de la protomolécule, qui apparaissent, et qui s’apprêtent à bouleverser tout le système solaire et les nouvelles colonies…
La station Médina, dans la Zone Lente, est occupée, alors que Holden et les siens s’y trouvaient. Ils tentent d’organiser un mouvement de résistance avec d’autres occupants, mais les vaisseaux laconiens avancent inexorablement. La défaite semble inéluctable et rien ne semble pouvoir les arrêter.
Mais utiliser une technologie supérieure que l’on ne maîtrise pas pourrait bien ne pas être sans conséquences et réveiller une menace tapie entre les dimensions connues…


Si ce bond dans le temps conséquent présente beaucoup d’intérêt, pour élaborer de nouvelles intrigues, et montrer l’évolution de la société après les grands bouleversements qu’elle a connu après la découverte des portes et les violents conflits qui en ont résulté, il est étrange de retrouver nos vaillants héros vieillissants. On était plus habitué à suivre les aventures de solides gaillards dans la trentaine que de vieux soldats approchant la retraite… Il est d’ailleurs étrange de songer que l’équipage est resté exactement le même 30 ans après, sans qu’un membre ne soit parti ou d’autres ajoutés !


Après une intrigue éclatée sur différents endroits dans le précédent tome, ce tome 7 revient une avec une répartition beaucoup plus restreinte, puisque se déroulant exclusivement sur Médina, avec occasionnellement un point de vue dans le système solaire pour décrire l’avancée des vaisseaux ennemis.


La sage « the expanse » a l’habitude de décrire des situations qui peuvent trouver des analogies dans l’Histoire humaine (la découverte de nouvelles terres et la fondation de colonies, l’oppression des peuples et leur rébellion violente…). Ici, c’est la résistance face à une force d’occupation, et les velléités de domination d’un Empire qui en a les moyens. Ce qui dans nos contrées fait irrémédiablement penser aux nazis durant la 2nd guerre mondiale.
Durant 30 ans, l’Empire laconien a été fondée sur un fort conditionnement, surtout les plus jeunes (jeunesses hiltériennes…). Tous sont amenés à penser que Laconia, par sa supériorité tant technologie que sociétale, est destinée à contrôler toute l’humanité pour apporter une nouvelle ère de paix et de prospérité. Les autres être humains en dehors de leur système, sont considérés comme laconiens par nature, et dont leurs lois immuables et naturelles s’appliquent aussi. C’est une caractéristique de nombres d’Empire dans l’Histoire, qu’elle soit récente ou remontant à l’antiquité : les Empires, forts de leurs avancées, s’estiment légitime à apporter leurs progrés à leurs voisins et ne se perçoivent pas comme des envahisseurs.


Ainsi le commandant Singh, officier prometteur, droit et intègre, malgré son esprit rationnel est fermement convaincu de la légitimité de ses actes. Promu gouverneur de Médina, il s’adresse à ses occupants avec de bonnes intentions sincères. C’est aussi un père de famille aimant qui n’aspire qu’à retrouver sa famille une fois sa mission accomplie. Mais quand de premiers actes de rébellion ont lieu, le ton change. Puisque ces hommes ont refusé les lois laconiennes, ils doivent donc être traités en criminels, ainsi que tous ceux les ayant aidés, peu importe la revendication légitime de leurs actes. La peur des attaques, une certaine fierté l’empêchant d’écouter les conseils d’officiers plus âgées, l’entraînent à recourir à des mesures de plus en plus extrêmes… Pour le bien de sa mission et de l’Empire, Singh se sait capable de verser de grandes quantités de sang. Un être qui aurait pu être un grand homme s’il avait né dans un autre endroit, et pour lequel on compatit donc… même s’il se trouve dans le mauvais camp.
Plusieurs moyens sont employés, pousser des résistants à trahir les leurs, persuader des personnes hauts placés de travailler pour lui… Méfiants envers l’Union des transports, de nombreuses colonies accueillent sous un joug favorable ce nouveau pouvoir qui pourrait leur accorder plus de faveurs. Mais elles pourraient bien déchanter en constatant qu’elles n’ont guère le choix dans les décisions prises… (en guise de parallèle historique, les conquistadors espagnols avaient convaincu les peuples sous le joug des Incas à se rebeller et combattre à leurs côtés, avant de les asservir à leur tour).
Holden et Naomi, aspirant à couler des jours heureux, se retrouvent à nouveau dans le feu de l’action, alors que Bobbie devait hériter de la responsabilité de l’équipage… Ce qui est difficile à gérer pour cette soldate martienne, qui malgré l’âge a conservée sa rage. En effet elle doit désormais exister face au poids inégalable de la légende Holden, inconscient, dans sa naïveté, de l’influence qu’il exerce ; mais aussi de Amos qui commence à perdre pied alors que la santé de Clarissa, à qui il est très attaché, se dégrade… Bobbie qui retrouve un rôle de personnage principal dans ce tome.
Le reste de l’équipage a également le droit à un ou deux chapitres. On y retrouve ainsi Alex, qui a laissé s’échouer un second mariage avant de définitivement s’unir avec son vaisseau, et qui tente de continuer à accomplir le rôle qu’il s’est donné de maintenir la cohésion entre l’équipage ; et Naomi, qui avec le poids des âges, supporte de moins en moins de voir Holden risquer sa vie sans savoir s’il va revenir… le déroulement des opérations pourrait bien mettre ses nerfs à bien rude épreuve.
Au poste de présidente de l’Union des transports, Drummer entendait régir d’une main ferme cette organisation, mais se gardant devenir une force militaire. L’apparition de la flotte laconienne totalement imprévisible s’annonce comme une épreuve à laquelle cette femme de caractère n’était pas du tout prête à faire face, et pourrait bien l’amener à revoir sa vision des choses. Elle ne peut que constater impuissante l’avancée des forces ennemis, à la technologie que même les meilleurs savants ne parviennent à comprendre, avec l’impression d’être une marionnette d’une mauvaise farce ou plus rien n’a de sens. Ce qu’Avarasarala, qui se trouve à ses côtés, et dont l’infirmité n’a en rien diminué son franc parlé, avait bien éprouvée en son temps.


Sur Médina, la résistance s’organise donc. Holden et les siens rejoignent donc d’autres Ceinturiens, certains dans d’autres temps aguerris aux techniques de résistance. Malgré le temps écoulé, les vieilles méfiances reviennent bien vite… Mais ils doivent aussi composer avec des éléments plus virulents menaçant de compromettre leurs actions. Piratage des communications, décodage, sabotage, diversion, plusieurs techniques sont utilisées pour tenter de mieux connaître l’ennemi et le frapper de l’intérieur. Après avoir versé dans l’horreur, la guerre, la politique ou la science-fiction, ce tome s’oriente plutôt dans le genre d’espionnage et action. Les résistants doivent régulièrement changer de lieux, afin d’éviter un ennemi qui resserre sa surveillance, et compter sur des alliés pas toujours très fiables.


Les précédents tomes avaient plutôt laissés de côté la menace cachée qui a détruit la civilisation de la protomolécule, mais celle-ci est belle et bien toujours présente. Et il semblerait que l’Empire Laconia, en utilisant des technologies laissées à l’abandon sur une des nouvelles planètes du réseau des portes, ait emmené ce danger très très prêt de l’homme…


Averti par Holden de la menace que cela représente, le Haut Consul Duarte ne se montre nullement effrayé. Fort de sa position, et de sa maitrise jusque-là de la technologie supérieure, il déclare même son ambition de contrôler cette menace…
A noter que ce réseau des portes, une menace inconnue qui a détruit une ancienne civilisation, et des hommes suffisamment ambitieux pour vouloir maitriser des forces qui les dépassent, tout cela n’est pas sans rappeler la saga de jeux mass effect.


La situation ouverte à la fin de ce tome laisse entrevoir un tome 8 très excitant avec de nombreux enjeux.


Plus encore que la précédente, cette nouvelle trilogie à l’intérieure de la grande saga de « the expanse » part dans une toute nouvelle direction. Se situant bien après, dans un cadre bien plus grand que le système solaire lui-même, avec plus de forces que les trois grands peuples initiales, l’humanité amorce un tout nouveau futur… qui pourrait bien voir précipiter sa fin.

Enlak
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le 15 avr. 2020

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