Je me souviens qu'on parlait pas mal de ce livre quand il est sorti. Franchement, je m'attendais à autre chose.
Ho, ce n'est pas mal écrit. On suit Orsenna dans ses pérégrinations entre les différents pays producteurs de coton. Au Mali, avec une ancienne entreprise d'Etat en pays dogon, qui s'ouvre à marche forcée au marché libre, sous pression du FMI. Aux Etats-Unis, où l'on mise sur la recherche OGM et les subventions massives pour garder la place sur le podium, et où les agriculteurs sont de la classe moyenne. Au Brésil, où la croissance repose sur les OGM et le fait de dévorer la forêt amazonienne. En Egypte, où l'on visite un musée du coton et l'on rend visite à Jean-Yves Empereur (ce voyage-là fait assez brodé). En Ouzbékistan, où l'on détruit la mer d'Aral et où le modèle ne semble pas soutenable. Enfin en Chine, pour voir ce que devient ce coton (visite de la capitale mondiale de la chaussette), avec un modèle rappelant Dickens. On termine dans ce qui reste du textile vosgien.
C'est joliment écrit, mais les échanges avec les personnes rencontrées sont trop spirituels pour être naturels. Le goût d'Orsenna pour les anecdotes, le cocasse fera sans doute passer la pilule pour beaucoup : personnellement je me suis fait suer, tout cela manque de naturel, de réel, et c'est au fonds assez convenu.
Au niveau politique, on jète un regard d'observateur extérieur, détaché, on fait mine de renvoyer dos-à-dos le mondialisme triomphant qui désavantage les pays du tiers-monde et ce qui reste d'économie planifiée, mais au fonds on ne se situe nulle part : c'est bien commode. De l'analyse sans proposition, au fonds, avec le voeu pieux vague qu'il faudrait qu'il y ait un gendarme de tout ça (à mettre en relation avec les remerciements à Pascal Lamy en fin d'ouvrage). Et au passage, un petit taquet à la France des trente-cinq heures, qui n'a plus le goût du travail : mon Dieu, pitié, délivrez-nous de ce prêt-à-penser stupide et mal informé.
Bref, ce n'est pas désagréable à lire, mais cela relève du carnet de voyage de M.-Tout-le-monde. L'introduction, qui fait une histoire et une géographie sommaire du coton, et la conclusion, qui tente (vite fait !) de ramasser le propos, ont un peu d'intérêt. L'intérêt du livre se trouve davantage du côté de l'exercice littéraire que du contenu, hélas. De toute façon c'est assez dépassé.