Adiemus est un mirage sonore où la frontière entre musique savante et instinct primitif s’efface. Karl Jenkins tisse ici une pièce qui évoque autant l’appel d’un monde ancien que la promesse d’une utopie lointaine. La voix libérée de toute sémantique grâce à un langage inventé, devient pur instrument, portée par un entrelacs d'harmonies célestes et de pulsations tribales.
La composition brille par son immédiateté émotionnelle : à peine les premières mesures entamées, une impression de familiarité étrange saisit l’auditeur, comme une mémoire archaïque qu'on aurait réveillée, ou une réminiscence de l'influence que Ridley Scott imposa à Hans Zimmer en l'utilisant comme temp track pour Gladiator.
Pourtant, derrière cette accessibilité radieuse, certains pourront reprocher à Adiemus une certaine linéarité et un exotisme stylisé, presque manufacturé, qui peut évoquer une publicité de luxe (ou de compagnie aérienne) autant qu’un authentique rituel.
C’est là toute l’ambivalence du morceau : un chef-d’œuvre d’évocation sensorielle, mais aussi un produit d’une époque avide de spiritualités clés en main.