N'avez-vous jamais eu l'un de ces moments où votre péché mignon est dévoilé ? Quand cette petite chose peu recommandable que vous vous permettez, sachant pertinemment qu'elle ne jouera jamais en votre faveur, aussi inoffensive qu'elle soit, vous revient en pleine face ?
Black Mirror, c'est ce retour de médaille. Ce moment où vous aurez envie de dire "Oh, ça va. Il n'y a pas mort d'homme. Je faisais que regarder mes mails... Je faisais que me détendre un peu... J'étais curieux de voir quel malheur est arrivé à telle célébrité". Avec un enchaînement assez ironique de "que", "rien de mal à ça", nous essayons désespérément de nous sortir de la panade, car nous savons que nous avons un peu tort.
Combien d'entre nous n'ont pas "juste" regardé un SMS en conduisant ? Rien de grave. Ou regarder une émission de téléréalité complaisante "juste" pour nous vider la tête ?
Avec un cynisme et une justesse dérangeante, Black Mirror met en avant les aléas de notre société qui, dans une mesure contenue, ne font pas de mal à une mouche, puis les exacerbe pour nous montrer que, finalement, il n'y a pas "encore" mort d'homme.
Et pourtant, nous ne sommes pas "vraiment" directement attaqués. Les histoires, indépendantes entre elles majoritairement, se passent dans un futur relativement proche, pas si impossible que ça, mais qui pourtant n'est pas encore le nôtre, heureusement. S'en sent-on alors dédouané ? Loin de là.
Devant plusieurs épisodes, j'ai probablement eu tendance à me dire que c'est exagéré, que c'est surréaliste, personne n'oserait faire ça. Personne n'oserait aller aussi loin. Vraiment ? On pense que ces événements sont anecdotiques, improbables, que cela ne nous concerne pas. Et pourtant...
L'anonyme prend vie lorsque, au détour d'une référence, d'une action, d'une pensée, la réalité nous frappe : "Ah... Mais je fais ça". "Mais en fait, ça arrive".
Dans un monde où nous courrons après la technologie, Black Mirror nous offre une idée dérangeante de ce que pourrait être notre avenir sans garde-fou. Un monde où nous arrêtons de penser, où nous nous laissons berner, avec notre propre consentement.
Je ne pense pas que je vais revendre mon smartphone. Et cela ne fera probablement pas disparaître les téléréalités médiocres qui pullulent à la télévision. Cependant, Black Mirror aura probablement le mérite de m'avoir fait réfléchir sur le bien-fondé de notre mode de vie et, peut-être, tout remettre en question.
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