Purée, c'était magistral, didactique, bien rangé et accumulant les péripéties qui sentent bon les anecdotes réelles récoltées auprès de gens qui ont vécu cette époque... Alors, The Deuce, en tous cas sa saison 1, c'est pas tant sur l'arrivée de la pornographie au cinéma que sur le rapport des gens (et son évolution) au sexe tarifé. On brasse large à ce niveau et le passage de "pimps" qui brassent quelques liasses aux mafieux qui trimbalent des valises entières est fascinante. Documentaire, rigoureux, bénéficiant d'une reconstitution magnifique (dans les décors, costumes et dans l'évolution qu'elle montre, en sourdine, tout au long de ces 8 épisodes), The Deuce n'oublie jamais que toute la machination proxénète ou pornographique ne fait que graviter autour de son sujet principal : les filles, et leurs tragédies. Elles sont toutes différentes et pourtant la série semble être l'histoire de chacune. Ni victimisant, ni condescendant et ne sombrant jamais dans le pathos gratuit, The Deuce prend un malin plaisir à exposer la cruauté qui se niche au delà des clichés les plus évidents (et permet à Gyllenal d'étaler un talent incoyable) n'hésitant jamais à pointer toutes les petites humiliations du quotidien, toutes les réflexions blessantes ou maladroites et tous les gestes déplacés (la prostituée qui couche par envie et à qui on offre de l'argent pour le taxi après, la façon dont le réalisateur de film renvoie toujours Eileen à son statut de pute), parfois jusqu'au gag (l'inceste paternel, qui revient tout le temps)...
Si sur The Wire, et Show me a Hero, Simon s'attaquait à ses sujets en mettant en scène les véritables protagonistes, sur The Deuce, l'approche est anonyme (que ce soient les mafieux, ou la corruption de la police), plus fictionnelle et ne jette que quelques clins d'oeils au réel (la plus évidente restant les -peut être un peu attendues - références à Deep Throat)... et puis c'est également amusant de voir la journaliste se lamenter de ne pouvoir donner les véritables noms de son histoire (qui est aussi celle de la série quelque part), tout ce travail "non sourcé" n'ayant servi qu'à écrire "une histoire larmoyante de pauvres filles et de macs sans coeur"...