Le bal des monstres

Black Out ou plus justement Snow White Must Die, est un polar atypique et palpitant, dans le sens où une contre enquête sera menée à la fois, par celui qui a été accusé et condamné à tort d'un double meurtre, mais aussi par un policier externe à la ville, No Sang-Cheol(Ko Jun), impartial dans son analyse et dans son jugement sur l'affaire, et prompt à rétablir la vérité sur cette affaire bâclée. Dans cette histoire de faux semblants, Ko Jung-Woo(Byun Yo-Han) sera amené à rétablir son honneur et laver sa réputation et celle de ses parents, dont la machination remonte à sa dernière année de Lycée. Incarcéré durant 10 ans pour le double meurtre de sa petite amie et d'une autre élève dont les corps n'ont jamais été retrouvés, il va dès sa sortie reprendre l'enquête à zéro pour comprendre ce qui s'est réellement passée cette nuit macabre, dont il n'a aucun souvenir et qui a ruiné sa jeunesse. Isolé, et hormis le flic qui doit se remettre de l'assassinat de sa femme, il ne sera épaulé que par son ancienne amie de Lycée Choi Na-Kyeom(Go Bo-Gyeol) devenue une célèbre actrice, et par Ha Seol(Kim Bo-Ra), une jeune fille travaillant momentanément dans l'ancien restaurant des parents.

Ce qu'on peut noter en premier dans ce polar, c'est l'ambiance qui y règne, à la fois lourd et pesant, malaisant et mystérieux. On est pris dedans dès le début et on ne va jamais plus lâcher. L'arc narratif est tout simplement exemplaire de compréhension, car on va nous emmener sur une pléthore de fausses pistes, ou bien certaines qui vont aboutir pas forcement où on pensait. Le réalisateur bien aidé par la base scénaristique de très haute qualité, va s'amuser avec nos nerfs et nos méninges pour nous montrer et nous décrire une galerie de personnages à la fois intrigant, méprisables et manipulateurs. Car dans ce drama, 90% des protagonistes sont mauvais, que ce soit consciemment ou inconsciemment. C'est un véritable bal des monstres auquel nous avons été conviés. Absolument tous les personnages sont bien construits et c'est une véritable étude psychologique qui va nous être proposé. C'est cette galerie de portraits va nous révéler la vraie nature des gens qui se dissimulent sous des masques de vertu. C'est aussi un moyen de nous faire poser la question suivante: jusqu'où iriez vous pour sauver vos enfants?

Dans Black Out, il est de prime abord de discerner les vrais amis des faux de Jung-Woo. On assiste à un véritable poker menteur dont le voile va commencer à se dissiper passé plus de la moitié de la série. Vous serez surpris plus d'une fois par la vraie personnalité des gens, qui s'hésitent pas à se trahir pour se protéger et sauver leur peau, au fur et à mesure que l'étau se resserre sur eux. On va se rentre compte que c'est un véritable complot qui a été orchestré par des proches des parents de Jung-Woo. Mais le plus de cette histoire, c'est qu'on va s'apercevoir que les deux meurtres ne sont absolument pas liés, et qu'une sordide histoire est sous jacente. On a désigné un seul coupable, monté et fabriqué un dossier bidon, et tout cela est passé comme une lettre à la poste grâce, ou cause de gens d'influence. Un innocent désigné coupable, car surtout trop riche. Oui, car au delà du polar, c'est la réussite d'autrui qui est mis aussi en évidence ici, et donc la jalousie. Chaque personnage a son importance et n'est jamais là au hasard. Vous allez même trouver des ordures pathétiques, et leur trouver des circonstances atténuantes pour certains, malgré tout le dégout qu'ils dégagent.

Le mal incarné est porté par des acteurs et actrices de très haut calibre qui font presque oublier le héros principal. Ils sont tous extraordinaires dans leur jeu et nous font ressentir toute la haine ou la pitié qu'on porte à leur égard. Mention spéciale à Kwon Hae-Hyo qui interprète le chef de la Police Hyun Gu-Tak. Ce personnage complexe est un des piliers de l'histoire, tiraillé entre des secrets à protéger et son dégout de lui-même. Le rythme est savamment dosé, s'accélérant vers la fin quand les derniers secrets seront enfin dévoilés sur toute cette horreur. Il faut bien faire attention aux environnements et surtout aux dialogues, très subtils. Parfois j'ai trouvé le héros trop mou, trop naïf, trop lisse et pas assez nerveux, pourtant il y aurait eu de quoi péter un câble. Heureusement que le flic compense avec sa ténacité et sa soif de vérité. Les gens qu'il croyait connaitre n'ont aucun honneur, aucune dignité, et sont souvent dans le déni. Même sa propre mère ne l'a pas cru, ce qui accentue encore son mal être post prison. Les mots souffrance et torture mentale vont prendre toute leur dimension dans ce polar. Car en plus, un ou des psychopathes rodent et viennent remettre une pièce.

Au final, je pense que c'est un des meilleurs polars psychologiques que je n'ai jamais vu en k-drama. C'est bien construit, c'est bien joué, c'est bien réalisé, et dans l'ensemble on va avoir la fin qu'on aurait souhaité à la vue de tout ce déballage sur la route de l'horreur . Il y a du suspense et du ressenti à chaque épisode, aucun temps mort et le panel d'émotions est intense. Parfois vous allez avoir bon dans vos déductions, et souvent vous allez avoir tort d'avoir juger et pris parti trop vite pour certaines personnes. Black Out est à la fois un récit complexe et clair, tortueux mais finalement limpide comme l'eau claire, quand on connait tous les aboutissants. C'est une descente aux enfers qui nous fera avant tout une description de toute la noirceur de l'humain quand il est adossé au pied du mur et sans défense. Comment des gens à l'apparence normale, peuvent se muer en de véritables ordures dénuées de toute empathie et de miséricorde. C'est enfin une remise en question et une dénonciation des affaires criminelles bâclées qui désignent un coupable un peu trop idéal. Autre chose, il est stipulé que le drama ne comporte que 14 épisodes, mais c'est bien 16 qui sont proposés dans un schéma classique. Dernier point: pourquoi Blanche Neige? Vous le comprendrez lors du dernier épisode.

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