Nouvelle collaboration entre Jason Momoa et Apple TV+, se penchant cette fois sur l'Histoire, avec un projet de cœur puisque co-écrit par l'acteur qui en a également réalisé l'épisode final (glorieux à bien des égards, au demeurant), en plus d'interpréter le personnage principal. Il y joue Kaʻiana, un chef de guerre originaire de l'île de Maui, fin 1700, alors que l'archipel d'Hawai est divisé en quatre royaumes qui s'affrontent pour la conquête totale, suite à une prophétie prédisant leur unification imminente.
Avec un rôle presque taillé sur mesure, Momoa se montre aussi intransigeant et barbare que dans See sur le champ de bataille, transcendé par ses racines ethniques. Utilisé dans la conquête, il en vient à mener une vendetta personnelle pour préserver son peuple. Il fait notamment face à Cliff Curtis, chef réprouvé totalement illuminé qui rappelle le colonel Kurtz de Coppola, ou encore Temuera Morrison (le père d'Aquaman chez Wan), et se joint au plus célèbre Kamehameha, interprété par le sportif Kaina Makua, véritable descendant de celui-ci et avec un sacré charisme du fait de son physique imposant et sa sérénité bienveillante. La présence occidentale à travers les navigateurs influence directement le conflit entre des rois fanatiques manipulant leurs guerriers selon les desideratas de leurs oracles et leurs dieux. On sent les acteurs fiers de leurs racines, souhaitant faire honneur à cette frange de leur histoire. Ils ont d'ailleurs passé la majorité du tournage en pagne, les fesses à l'air. L'authenticité est également palpable dans les lieux de tournage (Nouvelle-Zélande et Hawaii), les dialogues (une bonne partie en hawaïen), le casting évidemment, mais aussi les costumes culturels, l'utilisation de matériaux d'époque ou les apports musicaux. Zimmer a participé à la composition avec James Everingham, et surtout Kaumakaiwa Kanakaʻole pour apporter les sonorités et instruments traditionnels qui donnent immédiatement une empreinte différente au show. Les rites et coutumes ont une place prépondérante, tout comme l'aspect mystique et les croyances spirituelles de ces peuples, surtout à l'approche des batailles.
Pour l'ambiance solennelle et l'efficacité de la mise en scène, on peut estimer que Chief of War prend le relais de Vikings et Shogun, en version polynésienne, avec une touche d'Apocalypto. Le tournage en steadycam colle les personnages et leurs actions pour nous faire vivre cette conquête sanglante qui ne lésine pas sur la barbarie. On apprécie la dynamique fluide du champ de bataille avec le support logistique entre les guerriers. Brutal dans ses affrontements, intense dans ses traditions, le show accuse toutefois quelques baisses de rythme. On remarque une nette différence entre les deux premiers épisodes réalisés par Justin Chong, plaçant le contexte, et les suivants - hormis le final avec son climax de 25 min qui lorgne vers The Northman. On peut alors reprocher ce parasitage trop facile de l'anglais, ainsi que des séquences visuellement arriérées (la course de luge de l'épisode 5). Globalement, le compositing numérique est peu réussi. Par ailleurs, si la fidélité de certains points historiques est très réfléchies, d'autres tournures scénaristiques apparaissent bien paresseuses pour le simple drama, feuilletonnant alors pas mal en conflits annexes. Cette première saison est culturellement captivante et couvre seulement les premiers pas de Kamehameha au pouvoir sur l'île d'Hawaiʻi, gardant les autres étapes de l'Histoire sous le coude pour de futures saisons.