Fate/zero
7.6
Fate/zero

Anime (mangas) Tokyo MX (2011)

Bien que mes connaissances en anime restent au mieux médiocres, je commence à savoir reconnaître leurs défauts et qualités les plus récurrents. Et cette série, mesdames et messieurs, en est un gros concentrés des deux. Coup de bol, j'adore tout ce qui est bon dans les animes et ce qui est idiot me fait rire.
Et c'est heureux, car le synopsis vous entraîne dans les plus bas fonds des clichés japonais : Un groupe de personnages sélectionnés doivent s'affronter sur un terrain donné avec un pouvoir spécial, dans l'espoir d'obtention d'un prix.
Original, hein ? Je suis sûr que vous n'avez jamais vu un truc qui y ressemble dans 87 autres séries. Mais c'est là que ça devient intéressant. Les personnages, étrangement, ne sont pas des clichés, la trame est sans merci, le background est construit et immersif, la baston pure et dure ne prend que quelque minutes par épisodes, le fanservice est complètement absent, certaines thématiques volent assez haut... l'exact inverse de ce à quoi on pourrait s'attendre ! Mais que se passe-t-il ? Mais que se passe-t-il ? Mais qu'est ce qui se passe ?
Il se passe que tel un phénix, Fate/Zero surgit des cendres de ses propres défauts pour nous donner un spectacle satisfaisant, parfois intelligent, parfois simplement fun, mais est ce que ce n'est pas déjà quelque chose ?

Simili prequel de Fate Stay/Night, un anime bien inférieur de l'avis général, Fate Zero prend place dans un monde alternatif où des familles de mages, guidés par de nombreux codes et traditions, se transmettent de génération en génération leurs savoir et pouvoir ancestraux. Vient la première bonne surprise : quelqu'un s'est vraiment donné la peine de bâtir un monde, des règles et un environnement cohérent. La magie et les lignées de sorciers sont bien présentés et apportent vraiment quelque chose à l'histoire. Car le scénario est en effet dédié à un affrontement rituel entre puissant magiciens, la guerre du saint Graal, événement qui voit sept "élus" invoquer chacun un héros des temps anciens afin de pouvoir vaincre et s'emparer... du saint Graal, donc, qu'on suppose capable d'accorder n'importe quel vœu. Pour certains, l'occasion de se couvrir de gloire, pour d'autres, celle d'accomplir le souhait métaphysique de leur famille, quand ce n'est pas une motivation chevaleresque qui lance dans la lutte. Un ou deux n'ont pas vraiment de raisons, et se retrouvent entraînés là-dedans sans en mesurer les conséquences.
Notre héros, Emiya Kiritsugu, a une autre idée. Lui désire utiliser le Graal pour... sauver le monde. Ni plus ni moins. Et quand je dis ni plus, je veux dire qu'il n'a aucune idée précise de comment c'est censé se faire, sinon quelques vagues visions de paix mondiale, d'humanité illuminée et, sans doute, de licornes roses. A cette fin, il tue sans pitié tous ceux qui s'opposent à lui, fume d'un air pensif et prend la pose chaque fois que c'est possible.

Vous aurez peut-être compris que je ne suis pas un fan absolu de notre personnage principal, qui semble pourtant bien décidé à appliquer à la lettre tous les clichés du badass. Notamment parce qu'à force de marcher solennellement quand il pourrait courir pour sauver ses copains, ce grand couillon bouffe un max de temps d'antenne pour le reste de la joyeuse équipe. Mais rassurez vous, tout les participants à la guerre, maître ou héros invoqués, ont tout de même le droit à une personnalité un peu travaillée. Le système mage/servant permet d'ailleurs de combler le manque d'intérêt que vous pourriez porter à l'un pour le reporter sur l'autre.

Les grandes figures appelées depuis les brumes du temps, d'abord, sont pour le moins diverses et variées. On voit les scénaristes se sont creusés la tête pour trouver des concepts originaux. On aura droit à rien de moins que Gilgamesh, Alexandre le Grand, la secte des Hachichins, Diarmuid, Lancelot du Lac, Gilles de Rais et le roi Arthuria. Si tout ces noms vous disent quelque chose du premier coup, vous gagnez ma profonde estime et un pins proclamant votre statut de monsieur je-sais-tout. Et oui, vous avez bien lu, le roi Arthuria. Car le roi Arthur était une femme, oui oui. Avec grands yeux bleus, longs cheveux blonds, robe de combat et poitrine que vous ne verrez jamais, par un sursaut de bon goût bienvenu. Et laissez moi vous le dire, l'anime réussit à exploiter la majorité de ce qu'il y avait d'intéressant à sortir d'un concept de ce genre. Remake de mythes tragiques, quête de rédemption, confusion mystique, débats philosophiques ( à voir, le banquet des rois, où Gilgamesh, Alexandre le Grand et Arthuria discute posément de leurs visions respective de la royauté. Vous ne trouverez pas ça ailleurs ), tout est utilisé pour redonner chair à ces personnages légendaires. Même si celui qui y gagne le plus est sans nul doûte leur invraisemblable Alexandre le grand, vraiment grand, pour le coup, et roux. Un géant rigolard, badass et qui cherche à atteindre Okeanos, la frontière du monde ? Je signe tout de suite.
Au delà de ça, rien que l'idée est merveilleusement stupide. Gilles de Rais avec des yeux de grenouille qui invoque Cthulhu pour tuer des enfants ? Gilgamesh en diva prétentieuse qui tire des armes magiques par des portails dimensionnels ? Diarmuid qui revit sa malheureuse histoire à la virgule près ? Alexandre le Grand qui joue à des jeux vidéos ? Arthuria qui... Arthuria, quoi, bordel ! Fuck yeah ! Et quand on voit ce glorieux n'importe quoi de concept, on peut encore plus admirer qu'ils aient vraiment essayé ( et réussi ) de travailler la personnalité de ceux qui ne sont au final que des armes vivantes. Un peu comme si Pikachu se mettait à faire de longues tirades sur l'espoir et la solitude.

Les "maitres" ne sont pas en reste, et forment un tableau étonnamment mature. Dans tout les sens du terme. Non seulement ils sont plutôt intéressants et bien écrits, mais... ils sont pour la plupart dans la force de l'âge ! Si on excepte un gamin paumé, on a affaire qu'à des hommes et des femmes pleinement matures ( physiquement ) et investi dans la société ou leur devoir. Summum de l'étrangeté, la seule scène dans un lycée qu'on aura montrera un cour ! C'est vous dire si on est loin des codes animés habituels.
Plus sérieusement, ces mages ont tous le minimum de développement nécessaire pour qu'on s'intéresse un tant soit peu à leur sort. Nos sept concurrents sont tous d'horizon diverses, attendent chacun quelque chose de spécial de cette compétition, et apportent donc chacun un arc bien distinct des autres, avec ses propre qualités. Ils sont également bien aidés par un background fouillé ( familles, rituels, règles, etc... ), un design élégant, et de la magie intéressement décrite et représentée. Les batailles entre magiciens sont à la fois esthétiques et inventives ( et parfois un peu salissantes quand l'un des protagonistes vomit son sang sur le tapis ).
Cependant, je voudrais profiter de cette critique pour réparer une injustice. Il y a dans cette série trois personnages honteusement sous-exploités : Kariya Matou, Kayneth Archibald et Tokiomi Tohsaka. Respectivement noble héros loser idéaliste, mage arrogant mais bizarrement ingénu, et chef de famille traditionaliste et réservé. Comme vous pouvez l'imaginer, ils finiront tous très bien. Ces pauvres seconds couteaux serviront grosso modo de punching ball pour les penchants sadiques des scénaristes, quand ils ne seront pas tout simplement oubliés dans un coin. Et paradoxalement, je les considère comme les personnages les plus intéressants de l'animé. Peut être est-ce mon amour des personnages de troisième ordre dont personne n'a rien à foutre ? Peut être que contrairement à Kiritsugu qu'on voit beurrer sa tartine au ralenti, ils conservent une certaine part de mystère ? Peut être que ce sont juste ceux qui mettent le plus en avant l'originalité de l'univers et que leurs petites histoires respectives valent bien, voire plus que l'intrigue principale. Quoi qu'il en soit, ça ne semble pas être l'avis des créateurs de la série ou des autres protagonistes, qui s'acharnent sur eux de toutes les manières possible. Alors une petite pensée pour Kariya, Kayneth et Tokiomi, je vous prie : puisse le dieu des seconds rôle leur ouvrir son paradis de spin off éternels.

Pour l'aspect technique en général, là encore, il faut saluer de vrais efforts. Les graphismes sont bien et, si je peux me permettre l'expression, colorés. L'animation pourrait être plus fluide, mais on a vu pire. Les combats, s'ils sont souvent interrompus par des dialogues ou des monologues à la dragon ball Z, restent plaisant à suivre. La musique est très bonne, surtout dans le registre épique. Les doubleurs font un job honorable, voire excellent. En gros,on retrouve les limitations habituelles du média, mais aussi ses habituels moyens de les contourner et de les faire oublier.

Mais bon, dire du bien, tout ça, c'est marrant, mais beaucoup moins que pinailler et baver sur les défauts, pas vrai ? Et il s'avère que cet animé, malgré toutes ces qualités, n'est pas parfait.
Tout d'abord, l'action est très lente à se mettre en place. Je n'ai rien contre les scènes qui peuvent paraître inutiles et qui visent, mise de rien, à construire la tension et à approfondir les personnages, mais là, on arrive parfois à un niveau un peu frustrant. Du genre "Dans le dernier épisode : la préparation de ce qui va peut être se passer dans celui là ! Mais on est pas trop sûr...". L'anime prend son temps, parfois un peu trop pour garder l'intérêt éveillé à 100% tout du long. Pour remédier à cela, je vous recommande de le voir à plusieurs, des commentaires idiots sur tel ou tel détail ont toujours vite raison de la lassitude qui pourrait s'installer.
La répartition des rôles des différents personnages est parfois un peu artificielle. Vous connaissez déjà notre ami Kiritsugu et sa cigarette bien aimée, je vous ai déjà parlé du trio des personnages que si tu les apprécie tant pis pour ta pomme, je vous glisse juste un mot sur le harem d'Emiya, sympa mais un peu trop développé. Mais sachez que ce n'est pas tout. l'anime stalke littéralement l'un des protagonistes pour qu'il soit le grand méchant de l'histoire. Alors que lui, ça va, il est juste là pour prendre des photos. Ce qui donne des situations très comiques durant le cours de la série, où tout le monde va se méfier de ce pauvre type, l'accuser des plus noirs dessins, le tenter méphistophéliquement... A ne pas rater, la première fois que notre héros pose les yeux sur une photo de notre terrible-ennemi-mais-pas-trop, et qu'il déclare, sûr de son fait, que son dossier est trop innocent pour être honnête. A se demander s'il ne craquait pas tout simplement sur sa coiffure bizzare. A partir de là, on aura droit à une espèce de remake d'Akira, avec des "Kireeeeei !!!!" et des "kiritsuguuuuuu !!!!" échangés sans trop de raisons. Le pire étant que ça marche. A la fin, Kirei, sans doute excédé de ce harcèlement, devient une petite pute vicieuse. Sans qu'on sache vraiment si c'est à cause de sa nature profonde ou parce que tous ces blaireaux autour ont fini par le pousser à bout.
Ce côté forcé vient probablement du fait que Fate/zero est un préquel. Pire encore, le préquel d'un animé que tout le monde s'accorde à reconnaître comme pas terrible. Ce qui nous donne droit à pas mal de conventions un peu en décalage, à l'établissement d'intrigues qui n'ont rien à voir, et à trois épisodes tellement hors-sujet que l'ami avec lequel j'ai regardé l'animé les a skippé et qu'il a fallu que je les regarde de mon côté. De là vient aussi un aspect souvent un peu fouillis de l'univers, puisqu'on est déjà censé tout connaitre et qu'on nous balance le tout avec le minimum d'explications nécessaire. Qu'est le graal ? Pourquoi trois familles originelles ? Comment ça marche ? Que foutent des curés ici ? Mystère et boule de feu.

Mais vous savez quoi ? Ca n'a presque pas d'importance ! Parce que cet anime fait quelque chose que j'adore : de la philosophie !
Ouais bon, pas du très haut niveau, hein, Platon ne fait pas partie des esprits héroïques invoqués. Mais jugez plutôt : deux psychopathes qui discutent de l'existence de Dieu, l'accomplissement du potentiel contre la sécurité, la tradition contre l'efficacité, le mal au service du bien, le rôle des légendes, la nécessité ou non d'un idéal dans la vie, le vrai devoir d'un roi, et mon petit coup de pute préféré : comment un miracle se réaliserait-il si on a pas soit même la moindre idée de la façon dont ça pourrait marcher ? Tout amateur d'honnête baratin pseudo-profond ne peut qu'apprécier. Et cela constitue pour moi le point culminant de la série.

Je reste assez abasourdi par tous les rapports parlant de la suite de cette série comme peu aboutie et donnant en plein dans tout les écueils que son préquel a su éviter. A la fin de celui-ci, on a au moins cinq personnages qui feraient d'excellents protagonistes à l'origine intéressante, et un superbe univers qui ne demande qu'à être développé. Ce serait si facile...
Mais oui, je sais !
Si je trouve le Graal, je sais quel voeu lui soumettre ! En espérant que je ne serais pas transformé en dinde analphabète pour ma peine.

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le 23 déc. 2014

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Kevan

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