C’est une série qui a le mérite de vouloir bien faire avec peu. Et elle remplit son contrat. Joliment. Avec cette modestie propre aux gens simples mais nobles dans l’âme.
Certes, l’image évoque (surtout en intérieur) ces productions à petit budget, un peu trop lumineuses, un peu trop lisses, façon "Sous le Soleil de Marseille". Mais la sincérité compense largement les moyens.
Le scénario, lui, est bien écrit. Les personnages possèdent une belle tessiture et une évolution crédible. Surtout notre héros arrogant, merveilleusement interprété par Kim Jung-hyun, dont le jeu se nuance au fil des épisodes. L’alchimie avec la pétillante Keum Sae-rok fonctionne à merveille : leurs joutes verbales sont un vrai plaisir. En contrepoint, le second couple, freiné par sa fierté, offre une réflexion rarement abordée dans les romances : le poids de l’argent dans le couple.
La série joue habilement sur la dynamique des duos, qu’ils soient amoureux ou familiaux.
Outre le couple principal, d’abord pétillant, puis tendre, formé par Gang-ju et Da-rim, plusieurs relations parallèles viennent enrichir le récit et illustrer différentes manières d’aimer.
Je rejoins complètement l’avis d’Aude : Kim Jung-hyun est un acteur remarquable, capable de passer du cynisme à la tendresse avec une aisance déconcertante. Il possède ce mélange rare de perfidie, d’ironie et d’un charme un peu désinvolte, un brin sexy malgré un physique loin des standards flamboyants. L’air de rien, il s’impose toujours sans forcer et laisse, à chaque rôle, une empreinte indélébile. Et c'est à cause de lui que je suis venue sur cette série.
Autour d’eux, les autres duos complètent avec finesse cette exploration des sentiments.
Yang Hye-ji, dans le rôle de Cha-rim, incarne l’opposé de Da-rim : une sœur ambitieuse, attachée à l’argent mais surtout parce qu’il symbolise pour elle, la réussite de son travail et l’expression de son talent. Elle incarne cette femme coréenne moderne qui veut réussir par elle-même, par le mérite et l’effort, sans dépendre des autres. Elle forme un duo intéressant avec Tae-woong, même si j’aurais aimé une évolution plus souple et plus longue entre eux.
À l’opposé, Choi Tae-joon apporte une douceur inattendue : un acteur attachant, qui donne à son personnage une maladresse sincère, dont la présence équilibre les excès des autres personnages. Tae-woong, par sa trajectoire, nous rappelle aussi que l’argent ne doit pas nous rendre superficiels ni cupides, et qu’il n’a de valeur que s’il sert à construire plutôt qu’à diviser.
La tante Mi-ok (Kim Sun-kyung) et Ki-dong (Jo Bok-rae), du restaurant voisin, forment un tandem de deux âmes cabossées, très attachantes, qui interrogent la place de l’argent et de la fierté dans le couple.
Plus en retrait mais tout aussi touchante, la relation entre Bong-hee (Park Ji-young) et Seung-don (Shin Hyeon-jun), le père biologique de Tae-woong (Choi Tae-joon), aborde avec pudeur le thème du pardon et de la seconde chance. Ces deux-là se croisent comme on se frôle dans la vie : entre regrets, bienveillance et non-dits.
Et que dire de nos grands-parents ! À 87 et 80 ans, Kim Young-ok et Park In-hwan prouvent qu’il existe encore de beaux rôles d’aînés, véritables piliers d’une intrigue. Merci à cette série de leur rendre hommage. Irrésistibles de tendresse et de complicité, ils incarnent à eux seuls la chaleur, la bienveillance et la sagesse qu’un monde moderne semble avoir oubliées.
À travers eux, la série rappelle aussi l’importance de la piété filiale, cette valeur confucéenne essentielle qui lie les générations dans le respect, la reconnaissance et l’amour mutuel.
Difficile de résumer cette série touchante sans trahir sa simplicité. En confiant un trésor à une famille modeste, elle nous interroge sur notre rapport à l’argent, à la morale et à la tentation. L’enjeu de départ est profondément humain, et nul ne songerait à remettre en cause leur décision tant elle semble guidée par la sincérité et le bon sens.
Mais dans la culture coréenne, le vol n’est pas seulement un délit : c’est une faute morale et spirituelle. Le christianisme y voit une transgression du commandement « Tu ne voleras point ». Le bouddhisme l’interdit à travers le précepte « Ne pas prendre ce qui n’est pas donné ». Et le confucianisme, socle de la société coréenne, y voit une honte publique, une atteinte à l’honneur familial et à la confiance collective. Voler, c’est briser le lien social, trahir la droiture et l’intégrité qui fondent la communauté.
Iron Family nous rappelle surtout que, face à la tentation, l’argent ne fait pas le poids.
Il s’alourdit de culpabilité, de remords, de honte. La seule valeur qui reste légère, durable, indestructible, c’est la famille. Et c’est peut-être là que réside toute la noblesse de cette série modeste : dans cette idée toute simple, mais précieuse, qu’on ne mesure pas la richesse d’un foyer à ce qu’il possède, mais à ce qu’il partage.
Si j’ai beaucoup apprécié la sincérité de l’ensemble, j’avoue avoir trouvé la conclusion un peu appuyée. La série force légèrement le trait pour rappeler sa morale, au risque de perdre un peu de naturel. On comprend le message, mais tout cela aurait gagné à plus de mesure et de simplicité à l’image du reste de l’œuvre. Aussi, même si je ne partage pas l’enthousiasme de Aude, cette pétillante série (bien qu’un peu trop longue) m’a permis de patienter entre d’autres productions au budget bien supérieur… mais à la déception tout aussi grande.