Kingdom
7.3
Kingdom

Drama Netflix (2019)

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Kingdom est une série coréenne produite par Netflix, mise en ligne en janvier 2019.
Elle raconte l'histoire de Lee Chang, un prince de la dynastie Joseon dans la Corée du XVe ou XVIe siècle, accusé de trahison et confronté à une mystérieuse épidémie où les morts ne le restent pas.
Curieux mélange que celui-là : entre zombies et intrigues de cour dans la Corée des temps lointains…
Inhabituel pour moi sous tous ses aspects, puisque je dois préciser que je n'avais encore jamais vu ni film de zombies, ni cinéma coréen (honte à moi), donc encore moins de sageuk (nom donné aux drames historiques coréens). C'est peut-être en partie pour cela que la série m'a autant plu…
Et malgré des défauts évidents, je la surnote assez allègrement.


Mais ce choix original entremêlant horreur et politique s'explique par le propos fort dénonçant la corruption et l'injustice, propos qui donne tout son sens et sa pertinence à la série.


La Corée de l'époque peine à se remettre d'une guerre contre le Japon et dans cette société très hiérarchisée, les pauvres croulent sous les taxes : la plus grande partie de la population meurt de faim. Manger est donc le thème central de la série.
La question de la nourriture est omniprésente dès le premier épisode, où les malades de l'hospice n'ont rien, malgré les promesses du gouvernement censé leur envoyer de riz et dans lequel un mystérieux guerrier n'hésite pas à leur donne à manger de la chair humaine, expliquant à une médecin révulsée que le cannibalisme est une réalité dans le pays et la seule option pour survivre.
Traitée tantôt de manière comique, tantôt de manière tragique, depuis la gourmandise des nobles ou du garde du corps du prince, la joie de femmes enceintes hébergées et bien nourries sans apparente contrepartie jusqu'au désespoir de la médecin Seo-bi qui cherche des racines pour ses patients, faute de riz ou de viande (la chasse est interdite et la transgression des règles injustes semble impensable, même pour cette femme acculée), la nourriture est une obsession pour tous les personnages et un marqueur de la constante opposition entre manants et nobles (eux aussi affamés, mais de pouvoir et de richesse).


La grande menace sourde et tenace, c'est donc d'abord et avant tout la faim. Faim qui conduit à dévorer un cadavre contaminé… Ceux qui y ont touché meurent en apparence et restent froids et inanimés tout le jour, mais ils se réveillent la nuit, privés de conscience et avides de chair humaine. La faim ne s'apaise donc jamais et elle rattrape même les nobles. En effet, les zombies n'opèrent aucune distinction entre nobles et paysans, qui, zombies à leur tour, après morsure, sont impossibles à différencier : haillons ou soieries, les vêtements sont couverts de boue et de sang, les visages et mains noircis, tordus…
Mais il serait trop facile et trop rapide de croire que le malheur établit l'égalité ou favorise l'union entre les classes sociales pour contrer la menace.
L'épidémie n'est pas tant une métaphore de la revanche des pauvres qu'une description des ravages engendrés par les luttes des puissants.
Et là encore, si la situation est inéluctable pour tous, y compris la haute société dont les moyens de défense sont inopérants, les pauvres, les plus faibles, les enfants (particulièrement malmenés par le scénario) restent les premiers à souffrir.


Kingdom est aussi une œuvre sur l'enfermement : le roi confiné dans son palais, les morts-vivants "endormis" dans des caisses qui semblent fuir la lumière.
Ceux qui cherchent à leur échapper se cachent et se barricadent exactement de la même façon.
La claustration est aussi symbolique, avec la séparation entre les classes sociales.


Avant de revenir sur les défauts de cette série, il faut souligner que c'est une vraie claque visuelle : les paysages, les décors, les costumes sont magnifiques… comme bon nombre de plans, puisque la série bénéficie d'une mise en scène soignée et intelligente, notamment au niveau des scènes d'action très bien maîtrisées.
Si l''économie de personnages et d'intrigues est appréciable, l'attachement aux héros assez archétypaux n'est pas immédiat, le principal problème étant le manque d'interaction entre eux (les dialogues ne sont d'ailleurs pas toujours très réussis, trop bavards à force de vouloir resituer le spectateur et expliquer l'intrigue). Les acteurs sont (presque) tous bons, Kim Sung-Kyu et Ryu Seung-Ryong en tête.
La série souffre également d'une certaine prévisibilité et de quelques problèmes de rythme : les deux premiers épisodes sont un peu mous et l'utilisation des flash-back comme celle de l'écoulement du temps parfois discutable.


Mais dans la balance, les qualités de cette série l'emportent largement sur ses défauts et j'attends la saison 2 avec impatience !

pyrrha
7
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Créée

le 14 déc. 2019

Critique lue 319 fois

pyrrha

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