Obi-Wan Kenobi
5.4
Obi-Wan Kenobi

Série Disney+ (2022)

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De prime abord, Obi-Wan Kenobi sentait le projet inutile, pensé et vendu pour exploiter un personnage dont l’interprète n’est pas encore assez vieux pour se faire éclipser par le souvenir d’Alec Guiness. La vie du Jedi entre les épisodes 3 et 4 ayant été brièvement évoquée dans Un nouvel espoir et la série Rebels (exil, solitude, un Dark Maul qui revient chercher des noises, amitié et surveillance du petit Luke), on ne voyait pas trop ce que cette nouvelle série Star Wars estampillée Disney pourrait nous raconter de bien palpitant.

Sauf que…

Rogue One ayant prouvé il y a six ans que Vador n’avait rien perdu de son pouvoir de fascination sur les fans (qui durent hélas se contenter du vilain garnement Kylo Ren comme grand méchant pendant la dernière trilogie), l’idée principale de la mini-série Obi-Wan Kenobi sera de sortir le Jedi vieillissant de sa retraite pour le confronter une seconde fois à son ancien élève devenu sa némésis.

Et tant pis si Un nouvel espoir suggère qu’Obi-Wan n’a pas réaffronté Vador depuis la fin de La Revanche des Sith (remember : « La dernière fois j’étais votre élève, cette fois je suis le maître » ), le fan service de Disney justifiant à lui-seul l’existence de cette mini-série. Les scénaristes n’auront qu’à combler les incohérences du mieux qu’ils pourront.

Qu’en est-il de la qualité de ces six micros épisodes ?

Rien de bien folichon.

Depuis l’échec financier (et plutôt immérité) de Solo, leur dernier film Star Wars, Disney a revu ses ambitions à la baisse en ce qui concerne cet univers et, depuis le succès de The Mandalorian, ne fait plus que de le brader au format petit écran.

Certes, le petit format permet peut-être l’exploration de bon nombre d’itinéraires bis (Boba Fett, Cassian Andor) susceptibles de plaire à certains fans. Mais il faut bien avouer que si, à travers ces séries, l’univers de Star Wars gagne en possibilité de développement narratif, il perd aussi beaucoup de sa puissance épique et de sa dimension spectaculaire.

Obi-Wan Kenobi en est la preuve évidente. Conçue et produite sur la seule perspective de retrouver Kenobi, Leïa et Vador à une époque transitionnelle, la mini-série trahit rapidement ses velléités purement commerciales. On ne trouve quasiment rien à sauver dans ces six épisodes faméliques si ce n’est le plaisir émoussé de redécouvrir cet univers mais dans une époque méconnue de la mythologie créé par George Lucas.

La réalisation de Deborah Chow, faiblarde et manquant cruellement de rythme, ne fait que répondre à la piètre qualité d’un scénario alignant les situations prévisibles, les répliques attendues (« Vous n’avez pas tué Anakin, je l’ai fait. » ) et les facilités narratives (avez-vous remarqué la fuite bien pratique et totalement injustifiée d’Obi-Wan alors qu’il était cerné de toute part sur le toit de l’immeuble au terme du second épisode ?).

Qui plus est la musique, d’une médiocrité remarquable, nous rappelle à coups de mélodies lamentables, qu’on est bien dans un Star Wars TV, très loin des grandes heures ciné sublimées par le génie symphonique de John Williams et très loin aussi de l’originalité du travail de Ludwig Göransson sur The Mandalorian et The Book of Boba Fett.

La piètre qualité des décors traversés, souvent épurés, ne font rien pour remonter le niveau tant ils font souvent fake. D’autant plus que, format télé oblige, Deborah Chow abuse un peu trop des gros plans et d’une mise en scène plate, à peine plus imaginative lors de certaines scènes d’action. Heureusement, la réalisatrice a le bon goût de ne pas tout miser sur les effets numériques et, comme elle l'avait fait avec Jon Favreau sur les deux précédentes séries, préfère opter pour un mélange d’infographie et d’effets de plateaux. Ce qui est toujours plus intelligent que ne l’était la démarche full CGI de George Lucas pour sa prélogie.

L’écriture des personnages, elle, laisse souvent à désirer tant elle reste prévisible. L’Inquisitrice Reva Sevander agace par le jeu caricatural de son actrice (Moses Ingram) et ne fait aucun mystère de son trauma originel. Les scénaristes ne chercheront même pas à justifier sa survie à la fin (Vador n’ayant pas coutume de laisser pour mort ses victimes, pourquoi ne l’achève-t-il pas ?) mais se serviront de manière très artificielle du personnage pour apporter un second enjeu dans le dernier acte (deux confrontations finales filmées en parallèle, comme dans tous les Star Wars).

Côté gentils, on retrouvera bien sûr le sempiternel allié prêt à se sacrifier héroïquement. Ici, il s’agit de Tala Durith (Indira Varma), une ancienne officière ayant déserté l’Empire et qui servira de modèle de leadeuse à la petite Leïa, ainsi qu’à la Rébellion (évoqué via le proto-symbole de la future Alliance rebelle). Un personnage secondaire évidemment très archétypal et dont la mort attendue est censée provoquer une grosse émotion chez le spectateur (violons à l’appui).

La série ne trouve même pas de raison d’être dans le traitement convenu de son personnage-titre. Exilé depuis des années et refusant de se servir de la force par peur d’attirer l’attention, Obi-Wan a beaucoup de mal à retrouver ses facultés de Jedi (ce qui par ailleurs, n’était pas du tout le cas du Obi-Wan d’Un nouvel espoir, pourtant toujours exilé dans le désert de Tatooine et bien plus vieux). Un « blocage » qui ne durera bien évidemment pas longtemps puisqu’il devra sauver la petite princesse d’une chute fatale, et jouer du sabre laser à plusieurs reprises.

Non, la seule bonne idée, s’il faut vraiment en trouver une, est d’avoir fait revenir le personnage de Vador. Toutes les meilleures scènes sont, sans surprise, celles où il apparait (le massacre des villageois sur Mapuzo, l’interception musclée du vaisseau des fuyards au décollage). L’occasion pour les scénaristes de présenter le personnage sous un jour plus cruel et redoutable que dans la trilogie originale, un peu à la manière de son traitement dans Rogue One. D’autant plus que la seule intelligence du script sera de nous montrer un Obi-Wan choqué et horrifié par la découverte de la survie de son ancien élève et fuyant sa présence en refusant le combat (à partir de la fin du troisième épisode). Le tout s’acheminera bien sûr vers une dernière confrontation, seule grande scène de la série, où le Maître Jedi et le terrible Sith s’affronteront avec une utilisation de la Force assez ravageuse et spectaculaire (de façon à contrebalancer leur duel ridicule dans Un nouvel espoir).

Mais la présence d’Hayden Christensen dessert finalement l’aura du personnage, la réalisatrice ayant la fâcheuse tendance à montrer un peu trop le visage défiguré derrière le masque (même si l’image de la face double Vador/Anakin parait aujourd’hui inévitable).

Le gros problème de cette mini-série est surtout qu’elle ne fait jamais oublier son prétexte.

De même que Lucas avait conçue sa prélogie uniquement pour en venir à la transformation finale d’Anakin en Vador, Obi-Wan Kenobi n’existe que pour confronter à nouveau le Maître Jedi à son ancien élève. On regarde la série en attendant qu’une chose : le duel final entre Kenobi et Vador. Tout ce qui précède n’est que du remplissage.

Aujourd’hui, alors que Disney rentabilise son gros achat en nous servant du Star Wars discount en veux-tu en voilà, j’imagine facilement George Lucas, bien assis sur ses milliards, ne prenant même pas la peine de jeter un coup d’œil à toutes ces séries dérivées, tant elles tentent de combler les trous d’une chronologie qui n’a plus grand chose à raconter.

Peut-être serait-il temps pour les décisionnaires de Disney d’envisager sérieusement l’après (ou l’avant) Skywalker et d’avoir l’audace de se lancer dans le développement d’un tout nouvel arc historique dans l’univers Star Wars, un peu à l’image du jeu Knights of the Old Republic qui avait su créer de nouvelles icônes tout en s’affranchissant de la chronologie des films.

Buddy_Noone
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le 10 mai 2023

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Buddy_Noone

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