Petite(s) histoire(s) pour mystérieux moment agréable

Après un épisode pilote qui promet à peu près tout et n'importe quoi, la série est un mystère qui vaut le détour ! Préférons donc un pilote médiocre pour une série réussie que l'inverse (décevant, décevant Mr Robot). Même si les histoires de départ sont vraiment simplistes voire franchement caricaturales (un mariage en Inde, chercher des médocs au Kenya, etc.) on se laisse prendre au jeu. Je suis donc bien d'accord avec toutes les critiques qui le soulignent très justement, la caricature déborde de partout. Mais quel magnifique basculement de ces personnages caricaturaux en des personnalités vraiment attachantes ! L'intérêt ne serait-il pas un peu là ?

J'avoue qu'après quelques épisodes, je continuais à me demander honnêtement ce qui était si prenant dans cette série, assez déconcertée de devoir choisir entre ces petites histoires a priori de rien du tout, et ce grand bazar psycho-bio-loufoque. Chaque personnage n'est suivi qu'une dizaine de minutes par épisode (calcul doublement approximatif si on ajoute les interactions), donc oui, l'attente (multiple) est palpable. Mais si chaque histoire devait être une série, je n'en regarderais sans doute aucune. Plus encore, mon engouement me surprenait tant certaines ficelles sont faciles pour ne pas dire fatigantes ! La fin du 10e épisode par exemple : quelle grossière mise en scène de leur "trucs" (pour ne pas dire passe-temps) au cours des différents accouchements, la piscine pour Wofgang, la musique pour Riley, et même la télé pour Lito !! Mais paradoxalement, la scène, à l'image de la série, est très accrochante ! Alors, c'est surement dans la lenteur avec laquelle l'histoire centrale émerge et se tisse qu'il faut y voir sa force. Elle laisse le temps à une esthétique contemplative de se mêler à une fresque de personnages et à une fresque d'émotions, venant consolider un suspense bien ficelé. La facilité réside alors autant dans l'histoire centrale que dans la myriade des parcours, mais jamais dans le rythme et la beauté de l'image. Pourquoi la complémentarité est parfois si grossière quelle en devient lourde et même ridicule ( comme on attribuerait par exemple quatre éléments à quatre super héros ! )? Pourquoi faut-il qu'une énième industrie pharmaceutique diabolique les pourchasse ? Comment va-t-on encore sortir Untel de l'hôpital ? Et pouf, bizarrement ces clichés et répétitions disparaissent, au profit de cette envie de voir l'épisode suivant... Après tout, la réunion des personnages, si géniale dans ces symbioses involontaires, déconcertantes et si sensibles au moment de sa découverte, devait bien être mise au service d'une lutte contre le Méchant ! Et c'est pari réussi au vu du dernier et sublime épisode (accompagné par la voix extraordinaire du chanteur de Sigur Ros), qui à lui tout seul vaudrait qu'on oublie toutes les erreurs de la série ! Alors pour ressentir, cette série est magique, mais faut vraiment s'empêcher de cogiter sur le scénario parce que ça gâche quand même le plaisir.

Dernière chose et pas des moindres, quel dommage que les personnages ne parlent pas leur propre langue. Quelques scènes tentent le coup, mais, noyées dans des épisodes en anglais, à quoi bon ? Alors qu'entendre tour à tour du coréen, de l'anglais, de l'allemand, de l'islandais, de l'indi, etc., ça aurait été quelque chose ! Je ne chipote pas quand dans Troie, il parlent anglais et non le grec ancien, mais là tout cet anglais, quel gâchis ! Le cosmopolitisme, l'humanisme si central aurait tellement été magnifié, la force esthétique aurait imprégné la bande son par un multilinguisme généralisé ! La série aurait alors été plus qu'un bon moment, elle aurait été à la hauteur de ses ambitions. Bref, money is money, mais les Américains pourraient bien lire quelque sous-titres de temps en temps.