Rideau pour "Succession" après 4 saisons de bons et loyaux services sur HBO.
Un show qui aura suscité la dithyrambe et une pluie de récompenses tout en nous captivant avec une famille aussi pourrie qu'étrangement attachante.
Loin de moi l'envie d'aller à contresens, j'ai pris énormément de plaisir à suivre les tribulations économico-familiales des Roy. Cependant, son statut de nouveau classique HBO semble un tantinet exagéré vu la concurrence moribonde et l'aveuglement critique envers certains défauts.
En effet, "Succession" étire et répète trop souvent ses intrigues et situations ce qui nuit parfois à sa crédibilité et à son rythme (chaque saison pourrait tenir en 8 épisodes). La mise en scène initiée par Adam McKay ("Vice", "Don't Look Up",...) constitue aussi une limite formelle tant cette grammaire est plus fonctionnelle qu'esthétique.
Mais "Succession" compense cela par des comédiens démentiels lancés dans des stratégies politico-médiatiques et des joutes verbales jubilatoires. La famille Roy à beau représenter le pire du capitalisme, de l'égoïsme et du cynisme, leurs escarmouches à bâtons rompus n'ont d'égal que leurs coups bas et manipulations.
Ce qui paradoxalement nous les rend attachants ou dégueulasses d'un épisode à l'autre, voire au sein du même.
Comme chez Shakespeare, le pouvoir est aussi corrompu que séduisant et chaque personnage joue des faux semblants pour remporter la couronne. Ce que la saison finale achèvera de manière inattendue, à la fois très morale et profondément cynique sur le monde des 1%.
Un monde que la série écorne et ne valorise jamais, bien décidé à montrer l'abyssale vacuité de ses héros. Des êtres hors sol, naviguant entre les dollars bien mal acquis et un jeu d'egos dont nous sommes tous, malheureusement, les pions. Alors quitte à contempler la laideur capitaliste en action, autant se payer leur fiole.
"Succession", c'est l'autopsie d'un monde pourri jusqu'à la moëlle emballé dans un divertissement smart, sexy et méchant. Et c'est à voir !