La fiction pour exacerber le réel.

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L'avis sans spoil : C'est lent même pour moi, mais ça fonctionne plutôt bien. Des choix audacieux de réalisation pour une série TV. Pourrait déplaire par sa lenteur qui pourrait paraître creuse et superficielle.

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J'ai eu du mal avec le premier épisode et le côté esthétisant où j'ai vraiment pensé que c'était superficiel. Puis quand j'ai compris que le "chemin de fer" allait être traité de façon littérale, et donc fantastique, je me suis laissé faire, j'ai même trouvé la métaphore très belle. Ensuite, la série m'a conquis, son style devenant un langage en soi dans lequel je suis rentré.

Les deux références affichées sont Les Voyages de Gulliver et L'Odyssée (deux de mes ouvrages préférés). Les deux œuvres ne sont pas pillées ou sur-référencées pour autant, The Underground Station reprend juste l'idée des univers et des "stations" auxquelles s'arrête le récit (j'avais toujours pensé ces œuvres en terme de "stations" à la façon du chemin de croix du Christ mais ici c'est carrément au premier degré). Deuxième point positif que d'avoir gardé son autonomie face aux monuments cités.

Deux épisodes centraux, très lents, m'ont particulièrement plu et absorbé. La jeunesse du chasseur de prime (qui permet d'évoquer les amérindiens avec le Grand Esprit) m'a touché. Et le périple infernal et pesant en charriot dans les territoires carbonisés.

J'ai un peu décroché sur la fin avant que le dernier épisode ne vienne recoller les morceaux et embarquer la mise. J'aime beaucoup sa double fin inattendue.

J'avais beaucoup eu de réticences envers Moonlight mais ici Jenkins s'enfonce dans des choix artistiques qu'on pourra ne pas aimer mais qui donnent une consistance unique à l’œuvre. Aucune complaisance dans le traitement des sévices et l'esthétisation ne vient pas non plus enjoliver les choses.

Il y a deux moments où les effets spéciaux m'ont semblé pas terribles, mais je saurai mettre mon mouchoir dessus.

La musique est absolument géniale et vient s'enlacer au traitement du son très appuyé.

Il y a beaucoup de plans d'afroaméricains en train de poser. J'ai cru à un traitement pictural avant de comprendre que ça faisait surtout référence à la photographie naissante à l'époque et ses longs temps d'exposition. Ça paraissait un peu surfait (surtout le premier épisode pour lequel j'avais des réticences) mais ça a fini par installer un effet de masse troublant. Comme les monceaux de cheveux, lunettes, valises et autres effets personnels dans les camps de concentration. Une idée de l'infini de l'horreur. Une idée des générations et générations d'africains maltraités et abusés. Et enfin, dans ces poses, nous sommes regardés et nous devenons tous témoins et héritiers de cette histoire, pas la fictionnelle fantastique mais la vraie.

NB: rentre dans la catégorie des œuvres que j'ai beaucoup aimées mais que je doute revoir.

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8,5/10

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