Écouter Big Wheel and Others, c’est accepter de ne pas toujours savoir où l’on va. Et parfois, c’est exactement ce dont on a besoin.
Cass McCombs ne propose pas un album, mais un territoire. Un espace flou, long, sinueux, où les morceaux sont comme des mirages qui apparaissent et disparaissent, au rythme de notre écoute intérieure. Ma note de 7.5/10 n’est pas une sanction, mais plutôt l’expression d’un ressenti ambigu : je suis fasciné par l’univers qu’il crée, mais je ne peux nier que je m’y suis parfois perdu, sans boussole.
Il y a dans ces 22 titres une volonté manifeste de ne rien simplifier. McCombs prend son temps. Il flirte avec le silence, laisse traîner ses accords, et pose sa voix comme on parle dans un rêve – à demi-mot, sans urgence. "Angel Blood", "Morning Star", ou "There Can Be Only One" sont autant de moments suspendus, fragiles, où la beauté surgit sans crier gare. Il ne cherche pas à séduire, il laisse faire.
Là où certains albums imposent un tempo, Big Wheel and Others impose un climat. On y entre comme dans une pièce où la lumière filtre à peine. L’ambiance est poussiéreuse, les émotions ne sont jamais frontales, mais toujours diffuses. Cette distance volontaire peut parfois frustrer – notamment sur des morceaux plus expérimentaux ou anecdotiques qui freinent le flux – mais elle participe aussi de ce charme mélancolique qui habite tout l’album.
Ce que j’admire profondément ici, c’est cette cohérence dans l’éparpillement. Oui, c’est long. Oui, tout n’est pas nécessaire. Mais il y a une vraie vision. Une manière d’habiter le monde – en biais, avec douceur, avec patience. Ce disque ne vous attrape pas, il vous frôle. Et si vous vous laissez faire, il vous accompagne longtemps.
Big Wheel and Others n’est pas un disque parfait, ni un disque facile. C’est un compagnon de solitude, un reflet un peu flou dans un miroir ancien. Et même si j’aurais aimé qu’il m’empoigne davantage, je respecte profondément ce qu’il propose : un voyage lent, libre, profondément humain.