Quand on m’a parlé de Foreverly, j’ai d’abord été intrigué. Un album collaboratif entre Billie Joe Armstrong (le leader de Green Day, symbole du punk californien) et Norah Jones (la voix suave du jazz-pop contemporain) ? Autant dire que je ne l’avais pas vu venir. Pourtant, leur pari est simple : revisiter Songs Our Daddy Taught Us, l’album folk traditionnel des Everly Brothers sorti en 1958. Le résultat est un objet musical à part, humble et respectueux, que j’ai trouvé touchant, même s’il m’a parfois laissé sur ma faim. Une expérience que je note 7/10.
Le premier mot qui me vient à l’esprit en écoutant Foreverly, c’est “respect”. Celui des deux artistes l’un envers l’autre, mais surtout envers les chansons qu’ils reprennent. Armstrong, que l’on connaît pour sa fougue, se montre ici étonnamment doux et en retrait. Norah Jones, fidèle à son style feutré, guide le projet avec une grâce discrète. Leur entente est palpable : aucune compétition, juste une volonté commune de rendre hommage à un héritage musical qui semble leur tenir à cœur.
L’album repose presque entièrement sur les harmonies vocales – et c’est là qu’il est à la fois le plus beau et le plus frustrant. Leur voix se marient bien, ça fonctionne. Il y a de vrais moments de grâce, notamment sur Silver Haired Daddy of Mine ou Long Time Gone. Mais j’ai aussi ressenti un certain manque d’audace. Tout est très (trop ?) lisse. L’émotion reste contenue, comme si les artistes avaient eu peur de trop s’impliquer, ou de trop s’éloigner de l’original.
C’est un choix artistique assumé : Foreverly ne cherche pas à moderniser ou à tordre les chansons. Il s’agit d’un hommage pur et sobre, sans fioritures. Mais en choisissant cette voie, le duo prend le risque de l’uniformité. À force de retenue, l’album manque parfois de relief. On aurait aimé que leurs personnalités ressortent davantage, que le punk de Billie Joe s’invite, ne serait-ce qu’un peu, ou que la sensibilité jazzy de Norah vienne colorer davantage certains morceaux.
Il faut reconnaître que Foreverly n’est pas un disque qu’on écoute à la volée. C’est un album pour les moments calmes, pour l’introspection, pour ceux qui aiment les projets sincères, même imparfaits. Il ne cherche pas à faire le buzz, il propose simplement une bulle musicale, douce et rétro. En cela, il est attachant. Et si je n’ai pas été transporté à chaque morceau, j’ai apprécié cette proposition honnête, un peu à contre-courant.
Foreverly est une curiosité musicale, une rencontre improbable qui fonctionne par moments, mais reste un peu trop sage pour vraiment marquer les esprits. On sent que le projet vient du cœur, et c’est ce qui le sauve. C’est un album modeste, sans prétention, qui mérite d’être écouté pour ce qu’il est : un bel hommage, porté par deux artistes qui osent sortir de leur zone de confort… mais sans trop s’y perdre.