Un western pas comme les autres

• Ici nous sommes tranquille... Mais !?! Une squaw ! Et bien, c'est réussi ! J'ai délivré une squaw ! Mais, que faisais-tu au fort ? Pourquoi est-ce que ces deux brutes te frappaient ?


• Chinook a été enlevée à sa tribu par les deux hommes mauvais, il y a plusieurs lunes... Chinook était malheureuse avec les hommes blancs. Chinook voulait retourner chez les siens, mais les deux hommes mauvais ne voulaient pas ; Chinook était leur esclave. Alors le visage pâle aux cheveux jaunes est arrivé, et il a sauvé Chinook. Chinook le remercie.


• Ouais, ça va, ça va !

La grande aventure

Claude de Ribaupierre, dit "Derib", propose avec « Buddy Longway tome 1 : "Chinook" », un western pas comme les autres. Une œuvre qui ouvre les portes à un scénario original cherchant avant tout à raconter autre chose que des attaques de diligence. Autre chose que la sublimation des tuniques bleues. Autre chose que la lutte fantasmée d'un shérif animé d'une soif héroïque. Autre chose que le périple d'un chasseur de primes au regard sombre filant vers le soleil couchant. Autre chose que les conflits usuels entre des gentils cowboys blancs contre des méchants indiens. Une véritable virevolte scénaristique par rapport à ce qui se faisait autrefois pour le genre. Étant un grand amoureux des Indiens depuis sa plus tendre enfance au point de toujours incarner un peau rouge et non un cowboy lorsqu'il jouait, Derib va sauter sur l'occasion lorsque le rédacteur en chef du journal de Tintin : "Michel Louis Albert Regnier", dit "Greg", cherchait des idées nouvelles pour renouveler le journal. Fort d'une petite expérience obtenue pour son travail sur "Arnaud de Casteloup" et "Attila" pour l'hebdomadaire Spirou ainsi qu' avec "Go West" qui marque son arrivée au journal Tintin en 1970, Derib va proposer au rédacteur un western à contre-courant, qu'il compte aussi bien scénariser que dessiner. Un cheminement qui trouve son origine auprès de "David Crockett", pour lequel Derib se passionne à travers ses périples. En se renseignant sur l'histoire nord-américaine, il découvre que les trappeurs avaient une bonne relation avec les Indiens et que les mariages hétérogènes étaient fréquents. Étant fasciné par l'idyllisme angélique du couple, celui-ci a alors l'idée de retranscrire cette composante à travers un couple mixte. Celui d'un trappeur et d'une indienne. La communion entre deux êtres différents pour un amour honnête et sincère à travers un univers violent et dangereux.

Une idée nouvelle qui va plaire à Greg qui va dans un premier temps lui accorder en 1973 un essai sous forme d'histoires courtes. Des petites histoires qui vont paraître durant plusieurs mois jusqu'à trouver du succès auprès des lecteurs. C'est ainsi que débute officiellement l'aventure "Buddy Longway", qui va trouver une première édition en album aux éditions du Lombard en septembre 1974. S'amorce alors une petite révolution culturelle auprès des lecteurs grâce à des personnages à la dramatique consistante sur une toile de fond sincère et authentique de l'Histoire nord-américaine. Buddy Longway : "Chinook", c'est une rencontre humaine, une histoire d'amour, et une aventure qui sonne vraie. Un périple qui nous régale de son contraste réaliste où on découvre l'importance de la chasse pour la traque de la fourrure. L'élément de commerce primordial à l'époque. S'ensuivent de nombreuses péripéties qui vont conduire à la rencontre entre Buddy et Chinook. L'aspect merveilleux se concilie efficacement avec la dureté des décors sauvages, qui prennent bien des formes entre les vastes plaines avec ces longues étendues d'herbes, jusqu'à une montagne enneigée venant transpercer de sa froideur les personnages. On se prend à la tension de certaines actions, comme lors de l'épreuve de la flèche imposée par le chef des crows : "Grand Arbre". On se régale de la capture d'un mustang précédé de son dressage. On fait des rencontres authentiques comme avec "Slim le Borgne", ou encore "Adamski", un marchand spécialisé dans le troc qui fait affaire avec les peaux rouges. Côté dessins, le trait de Derib est très particulier notamment autour des yeux des personnages. Les décors manquent de détail et de précision. Pour autant, la particularité des illustrations accompagnées d'une colorisation un peu fanée apporte une atmosphère unique qui imprègne le lecteur. Ce n'est pas parfait, mais la patte artistique est bien là.

CONCLUSION :

« Buddy Longway tome 1 : "Chinook" », de Claude de Ribaupierre, dit "Derib", aux éditions du Lombard, est le démarrage d'un western pas comme les autres. Une nouvelle proposition intelligemment accueillie par les lecteurs qui vont découvrir une autre façon de consommer le western. Une aventure avec un grand "A", pour une retranscription de l'histoire avec un grand "H", et tout cela, au nom de l'amour. Un excellent démarrage qui chancelle encore sur quelques points mais qui reste une entrée en scène efficace dans l'univers Buddy Longway.

Un joli diamant brut que Derib va devoir encore tailler pour en faire une magnifique pierre.

Ce renard argenté est une belle pièce... Avec elle, mon stock de fourrure est maintenant suffisant... Pour ma première saison de chasse, je ne m'en tire pas trop mal.