Je m'étais convaincu de lire "Le Bleu est une couleur chaude" avant de voir sa fameuse adaptation au cinéma "La Vie d'Adèle". C'est désormais chose faite, et cela valait largement le coup. L'histoire comme les dessins pourraient vous donner des préjugés quand à la qualité dramatique et graphique de l'oeuvre. Mais vos plus complètes réticences seront dissipés dés les premières pages...
Parce qu'une adolescente qui refoule son homosexualité avant de succomber aux charmes d'une lesbienne assumée, et qui plus est avec des cheveux bleus, ça n'a rien de bien original. Leur relation tumultueuse apporte évidemment son lot de surprises, mais l'intérêt n'est pas là. En réalité, l'album arrive tellement bien à faire ressentir les émotions des personnages qu'on ne peut en aucun cas y rester indifférent. La BD se lit d'une traite, malgré ses 150 pages, et implique le lecteur bien plus qu'on pourrait s'attendre.
De plus, ses dessins qui n'ont à première vue rien d'attirant contribuent au charme de l'oeuvre. Un trait parfois hésitant et maladroit, mais qui permet étonnamment de rentrer dans la peau des personnages de manière fulgurante. Anecdotiques pour les décors, les dessins de l'auteure sont pourvus d'un talent inimitable pour représenter les moments d'intenses émotions, où ils subliment le récit. A noter une mise en couleur bien travaillée et astucieuse, qui atténue en grande partie les défauts du trait.
La bande dessinée ne raconte finalement pas assez d'histoires d'amours. Peut-être ne se sent-elle pas assez mature pour cela, mais l'auteure Julie Maroh nous prouve largement que c'est un tort. En partant d'une passion très simple, elle arrive à faire chavirer son lecteur grâce à un registre d'émotions puissantes.